Le mouvement a demandé aux groupes parlementaires de l'opposition de saisir le Conseil constitutionnel sur l'interdiction des manifestations. Le mouvement Mouwatana, de fraîche création, a de la suite dans les idées. Mais fait aussi preuve de volonté à éviter que le pays ne sombre dans une catastrophe nommée 5e mandat. Hier, en conférence de presse, animée à Zéralda par la porte-parole du mouvement, Me Zoubida Assoul, assistée de deux avocats, Me Salah Dabouz et Abdelghani Badi, il a été question de la candidature de Bouteflika en 2019 mais également de l'environnement politique et juridique qui entrave l'action de l'opposition. Me Zoubida Assoul a dénoncé une nouvelle fois les appels lancés par les partis du pouvoir au chef de l'Etat afin de briguer un autre mandat. "Nous avons vu que le Président est inapte à gérer les affaires du pays. Cela n'empêche pas ses partisans de le supplier de ‘poursuivre'", a-t-elle dénoncé, ajoutant qu'"un 5e mandat sera une catastrophe pour le pays". Au passage, Abdelghani Badi a dénoncé l'utilisation des institutions de l'Etat au profit du pouvoir exécutif. Il a réagi à la sortie, la veille, du président du Conseil de la nation : "De quel droit Bensalah, qui est normalement à la tête du pouvoir législatif, demande au chef du pouvoir exécutif de se représenter à l'élection présidentielle ?" Cependant, c'est par l'action concrète que le mouvement Mouwatana veut aussi se distinguer. Ainsi, il agit pour faire enlever les interdits qui empêchent l'exercice libre de la politique, notamment la liberté de manifester. Pour ce faire, le mouvement s'est adressé aux groupes parlementaires de l'opposition afin de saisir le Conseil constitutionnel dans le but de faire sauter deux lois qui empêchent les citoyens d'exercer "leur droit de manifester librement". "En tant que simples citoyens, nous n'avons pas le droit de saisir le Conseil constitutionnel. Nous avons donc décidé de demander aux groupes parlementaires de le faire", a indiqué Zoubida Assoul, porte-parole du mouvement Mouwatana. Elle a rappelé que lors du dernier amendement de la Constitution, 50 députés et 30 sénateurs ont le droit de saisir le Conseil constitutionnel. Deux lois sont particulièrement ciblées : la loi 89/28 relative à la tenue de manifestations publiques, promulguée en 1989, amendée en 1991 et limitant les manifestations aux lieux fermés, notamment les salles, ainsi que le décret exécutif annoncé le 18 juin 2001 interdisant les manifestations dans la capitale. "C'est un décret fantôme avec lequel on nous menace à chaque fois", a indiqué Mme Assoul. "Nous avons fouillé dans tous les Journaux officiels depuis 2001, nous n'avons trouvé aucune trace de ce décret", dénonce la présidente de l'Union pour le changement et le progrès (UCP). "Non seulement, le décret n'existe pas, mais il est anticonstitutionnel, puisque la Constitution de 1996 donne le droit aux citoyens d'exercer leur droit de manifester librement", a indiqué Zoubida Assoul. Pour passer à l'action, les membres de ce mouvement ont adressé un courrier et une requête aux 6 groupes parlementaires de l'opposition (Parti des travailleurs, El-Adala, MSP, FFS, El-Moustaqbal et Indépendants), en plus des 9 députés du RCD. "Nous voulons les mettre devant leurs responsabilités. Mais nous ne voulons émettre aucun jugement de valeur", a précisé Zoubida Assoul en réponse à la question de savoir comment réagira le groupe si les partis de l'opposition ne saisissent pas le Conseil constitutionnel. Avant d'aller vers de probables actions de rue, le mouvement Mouwatana veut "construire" dans la durée. Ses membres se réunissent aujourd'hui pour élaborer une "charte d'éthique" qui comprend notamment l'interdiction d'utiliser la religion à des fins politiques et l'acceptation de l'alternance au pouvoir. Ali Boukhlef