Dans un conflit que les journalistes étrangers ne peuvent couvrir depuis la bande de Ghaza en raison du refus d'Israël d'ouvrir librement l'accès du territoire, le contrôle des images et du message est presque aussi important que les opérations militaires. Côté israélien, on martèle sur la chaîne de l'armée YouTube (www.youtube. com/user/idfnadesk) par la voix du porte-parole et grâce à des images aériennes que le Hamas est une « organisation terroriste » se servant des civils comme « boucliers humains » ou des mosquées pour cacher des armes. PalTube (www.palutube. com), dont le serveur est basé à Moscou, dénonce, lui, ce qui est qualifié « d'holocauste sioniste à Ghaza » en faisant l'apologie de sa branche armée, les Brigades Ezzedine al-Qassam, et du « martyre ». La page d'accueil est sans ambiguïté : une bannière est frappée de photographies d'une vieille femme pleurant et de corps ensanglantés d'enfants. On peut également y regarder en direct la chaîne Al Qods, liée au Hamas et basée à Beyrouth. « L'ennemi sera défait et battra en retraite », clame un des slogans du site, qui fonctionne sur le même principe que YouTube et sur lequel les internautes peuvent regarder ou poster des vidéos. Sur l'une d'elles, un membre du Hamas lit son testament avant d'aller combattre à Ghaza, où plus de 900 personnes sont mortes depuis le 27 décembre. Une autre vidéo, postée par un internaute sous le pseudo « Al Qanas » (le sniper en arabe), montre les tirs de roquettes contre Israël, des images tirées de la chaîne officielle du Hamas, Al Aqsa. La chaîne de l'armée israélienne sur YouTube, sur fond gris-bleu, est plus sobre. Outre les porte-parole justifiant les attaques contre le Hamas, on peut y voir par exemple une vidéo exposant des documents du Hamas trouvés par des soldats lors d'une mission dans le nord de Gaza. « Nous utilisons une plateforme très populaire pour expliquer les positions de l'armée au monde (...) et illustrer les pratiques des terroristes du Hamas qui utilisent les civils comme boucliers humains », affirme le capitaine Ishaï David, un porte-parole de l'armée. Le site connaît un certain succès avec près de 1,4 million de visiteurs en deux semaines. Selon Jérome Bourdon, sociologue et responsable du département de communication à l'université de Tel-Aviv, aussi bien Israël que le Hamas utilisent « un moyen très moderne pour une stratégie au final très classique : la propagande ». « C'est un phénomène en vogue comme on l'a vu avec la campagne du président américain élu Barack Obama. Tout le monde, y compris les institutions les plus conservatrices, pensent à YouTube », ajoute M. Bourdon. Mais selon lui, l'utilisation de ce nouvel outil a des limites. « Il atteint des deux côtés des personnes déjà convaincues et un public militant. Il permet au plus de mobiliser les troupes et de leur redonner le moral. »