Depuis trop longtemps déjà, les automobilistes ne cherchent plus à éviter les crevasses, ils s'ingénient seulement à chercher les moins profondes, les moins dangereuses pour les amortisseurs qui coûtent cher à remplacer. Hormis quelques axes routiers, notamment ceux généralement empruntés par les cortèges officiels, il n'existe plus, depuis belle lurette, une rue à Oran où l'on peut rouler une vingtaine de mètres sans s'engouffrer dans une cavité plus ou moins profonde, plus ou moins large. Les conducteurs ne savent plus quoi faire de leur colère, ni contre qui la diriger devant un réseau routier qui se dégrade chaque jour davantage par la grâce des eaux pluviales qui s'abattent sur la cité qui se paie le luxe sarcastique des obstacles nommés par euphémisme « ralentisseurs ». Si bien que les usagers ne peuvent guère faire de différence entre les pistes d'un douar enclavé et le réseau routier urbain. De timides opérations de réfection ont été tentées ça et là, par la commune, au grand plaisir de la population motorisée et piétonne. La joie fut de courte durée. Les ouvriers qui entreprirent les travaux de colmatage s'étaient vite découragés devant le nombre effarant de crevasses qui engloutissaient tout le bitume. Les responsables de la direction des travaux décidèrent alors d'utiliser les gros moyens. On commença par racler la couche de bitume endommagée. Car, pour appliquer un tapis d'enrobé, il fallait d'abord ravaler la chaussée sur toute sa longueur pour justifier le déplacement coûteux des engins. Ce qui laissera de véritables sentiers cahoteux qui se transforment en véritables marécages en temps de pluie.