Plus de 700 hectares. C'est la superficie de forêt ravagée par les flammes depuis le 1er juin, selon un bilan de la direction générale des forêts. Ainsi, une moyenne de 5,2 ha sont incendiés chaque jour. Pour ne pas tomber dans le même scénario que l'année passée, tout a été mis en œuvre par les services de la DGF et de la Protection civile. Etat des lieux. Chaque été ou presque, la problématique des feux de forêt secoue la société algérienne à tous les échelons. Les incendies font des ravages. La saison estivale de l'année dernière a été catastrophique, causant d'énormes pertes 51 908 ha ravagés par les flammes selon un bilan de la direction générale de la Protection civile, de nombreux blessés et une victime tragique à Aït Yahia Moussa, dans la région de Kabylie. La Commission nationale de protection des forêts estime que la saison estivale 2017 était «impressionnante» : les incendies ont touché 27,821 ha de milieux forestiers, 1588 ha de récoltes et 14 103 ha de broussailles. Pour éviter le scénario-catastrophe de l'année dernière, les autorités redoublent d'efforts en termes de moyens et de prévention. Lors de la rencontre nationale sur la prévention et la lutte contre les feux de forêt, en mai dernier, coprésidée par le ministre de l'Intérieur, Noureddine Bedoui, et son homologue de l'Agriculture, Abdelkader Bouazghi, des recommandations ont été formulées pour «renforcer le cadre juridique et institutionnel» afin d'éradiquer ces catastrophes. La Protection civile va mobiliser 27 groupes mobiles comptant 14 400 agents et 499 unités opérationnelles en plus des moyens aériens avec l'utilisation de 6 hélicoptères et l'achat des canadairs, selon les informations présentées lors de cette rencontre. Pourtant, Ali Mahmoudi, directeur général des forêts, a anticipé les événements début juillet, lors d'une visite de travail à Bouira, où il a déclaré : «Il y a eu d'importantes précipitations, ce qui a favorisé le développement d'une strate herbacée que nous n'avons pas vue depuis au moins 40 ans.» Ali Mahmoudi a prévenu que «le risque d'incendie, cette année, est très grand». logique d'intervention Au niveau des wilayas les plus touchées l'année dernière, d'importants dispositifs sont mis en place par la Protection civile pour prévenir le risque de déclenchement d'incendie. A Tizi Ouzou et ses alentours, une deuxième colonne mobile supplémentaire a été installée sur l'axe routier de Bouhinoune. Elle est dotée de 22 véhicules et d'un effectif de 58 sapeurs-pompiers. La logique d'intervention, elle, reste la même, nous précise une source de la Protection civile : «Au départ d'un incendie, le comité opérationnel communal intervient pour essayer d'apporter des mesures adéquates.» Néanmoins, si le feu dépasse les capacités de la commune, «la wilaya peut déclencher le plan Orsec». La direction nationale des forêts peut «faire appel aux colonnes mobiles d'autres wilayas» en cas de sinistre important. Pour l'heure, les services de la direction générale des forêts ont enregistré «207 foyers d'incendie» du 1er juin au 25 juillet, qui ont décimé un total de 1079 ha dont 706 ha de forêt. Les régions de l'Est sont les plus touchés avec 65 foyers et 673 ha de fôret touchés. A Batna, un important incendie s'est déclaré à Bouarif, la semaine dernière, dans la région d'Azab, au nord du chef-lieu de wilaya. Néanmoins, Rachid Benabdallah, chef de bureau d'information et de prévention contre les feux de forêt à la direction générale, nous a confié que «la situation est en amélioration par rapport à l'année dernière». Le citoyen, un atout ? A la même période de la saison estivale 2017, les services de la direction générale des forêts avaient enregistré «plus de 1000 foyers de feu», nous rappelle Rachid Benabdallah. Même son de cloche du côté d'Alger. Khaled Ben Khalfallah, chargé de la communication à la Protection civile de la wilaya d'Alger, nous précise : «Aucun feu n'est à signaler à Alger pour le moment.» «Un dispositif mobile est prêt à intervenir au cas où.» Ce dispositif est renforcé les week-ends car la fréquentation assez importante des forêts de Bainem, Bouchaoui et Ben Aknoun par les citoyens «augmente le risque potentiel de déclenchement de feux de forêt». Pour prévenir et lutter de manière adéquate contre ce fléau, la direction générale des forêts et la Protection civile misent sur une stratégie qui s'avère pour le moment payante. Le plan est de «mobiliser la société à tous les niveaux», nous explique Rachid Benabdallah. Il tient à souligner l'importance des comités de riverains, au nombre de 2300 sur le territoire. Cette méthode de travail avec les comités de riverains fonctionne selon la logique du «donnant-donnant». Le chargé d'information et de prévention de la DGF nous a confié que ces comités «participent à la surveillance pour permettre une intervention efficace et adéquate des services de la Protection civile». En contrepartie, «les autorités compétentes se chargent de fournir à ces habitants de petits projets afin de satisfaire à leurs besoins au quotidien». Ces comités sont constitués de citoyens habitant près des forêts et sites de végétation chargés à la fois «de la surveillance», mais surtout «d'alerter le plus rapidement possible les services compétents pour intervenir dès le départ du feu». Réflexes de prévention Rachid Benabdallah insiste sur l'importance cruciale d'une intervention rapide lorsqu'il y a un départ de feu : «Plus on attend et plus la situation risque de s'aggraver.» Comme le dit l'adage : «Le feu s'éteint la première minute avec un verre d'eau, dans la deuxième avec un seau, dans la troisième minute avec une tonne d'eau, après... on fait ce qu'on peut.» De plus, le vent est un facteur des plus influents. Les flammes peuvent se propager à «une vitesse de 15km/heure», nous prévient le responsable. Par ailleurs, l'ensemble des éléments de la Protection civile et de la direction générale des forêts préviennent contre le comportement incivique de certains citoyens. Ces agissements peuvent causer des dégâts gigantesques. Parfois, il suffit d'un mégot de cigarette jeté au bord de la route, d'un barbecue familial sans prendre de précautions ou de bris de verre pour favoriser le déclenchement d'un feu qui peut ravager des dizaines d'hectares. Rachid Benabdallah précise que les services de la DGF ne sont que des «gestionnaires», avant d'ajouter : «Le complexe forestier sur l'ensemble du territoire algérien appartient à l'ensemble de nos citoyens». Dans cette perspective, les Algériens peuvent protéger, parfois par des reflexes de prévention des plus banals, ces extraordinaires dons de la nature qui garantissent la protection des sols, régulent le débit des sources et assurent un espace de loisirs pour l'ensemble des citoyens.