L'Algérie, où 90 % du commerce international se fait par mer, est toujours incapable de développer sa propre logistique maritime. Environ 97% du marché du transport maritime (12 milliards de dollars), près du cinquième de la facture globale à l'import, est, voilà bien des lustres, entre les mains d'armateurs étrangers, à leur tête le danois Maersk Line, n°1 mondial, le suisse Mediterranean Shipping Company (MSC), le français Compagnie maritime d'affrètement-Compagnie générale maritime (CMA-CGM) et le turc Arkas Holding. Mais avec la toute récente décision gouvernementale d'ouvrir le secteur aux capitaux privés nationaux, les magnats des affaires, à l'image de Haddad, Tahkout, Arbaoui, Kouninef, Mazouz..., sont susceptibles d'y être intéressés. arriveraient, peut-être, à stimuler au retour les élites maritimes, déjà parties, ou à dissuader celles qui projettent de le faire. Ces gens de mer, combien sont-ils en Algérie ? La protection de leur sécurité, de leur sûreté, ainsi que de leurs droits les plus fondamentaux, édictée par la Convention STCW de l'OMI, où siègent pour l'Algérie Kheireddine Benslim et Mohamed Lamine Siari, respectivement attaché maritime de la Mission permanente et représentant permanent suppléant, est-elle suffisamment garantie? Pour leur nombre officiel, l'on ne saura rien : Nos maintes tentatives de joindre la Direction générale de la marine marchande et des ports (ministère des Transports) ainsi que le service national des garde-côtes étant restées infructueuses. En tout cas, jusqu'au début 2000, le personnel de la navigation côtière (transport de marchandises et passagers) comprenait au moins 3000 inscrits maritimes, nous a confié un ex-haut dirigeant de la Compagnie nationale algérienne de navigation, la défunte CNAN). Depuis, souligne le même «cnaniste», «ces effectifs ont dû grossir, puisque outre CNAN-Nord et CNAN-Med, sont également présents sur le marché les compagnies Nolis-transport maritime, filiale du Groupe Cevital d'Isaâd Rebrab, l'Entreprise nationale de transport maritime de voyageurs (ENTMV) et l'Hyproc, filiale de Sonatrach, spécialisée dans le transport maritime des hydrocarbures et des produits chimiques». D'autres sources portuaires (Annaba) -le port de Annaba étant le 4e plus grand port commercial du pays- parlent, par exemple, de 1200 personnes, dont plus de 500 officiers représentant l'effectif navigant à Hyproc et 730 à 750 navigants sur un total dépassant 1200 agents que compte l'ENTMV (Algérie Ferries). Quant à la conformité et au respect de la réglementation interne et internationale pour offrir aux officiers, et surtout aux mousses de la navigation côtière, les conditions leur permettant d'évoluer dans un environnement social adapté et sûr, beaucoup reste à faire, à en croire notre source : partout ailleurs et pas qu'en Algérie, le métier de marin est vu par tout le monde «comme étant valorisant et fort enrichissant, mais en plongeant dans les profondeurs du monde des gens de mer, les innombrables contraintes et problèmes auxquels ils sont confrontés rend ce métier beaucoup moins enviable. Nombre de facteurs peuvent impacter négativement la qualité de vie en mer auxquels s'ajoutent les problèmes socioprofessionnels, comme le paiement des salaires (Le marin est payé à l'embarquement. Il est rémunéré, soit à salaires fixes, soit à profits éventuels ou par une combinaison des deux), la couverture sociale, les autorisations de descendre à terre..., l'éloignement, l'abandon, sans oublier la nature particulièrement dangereuse de la profession», s'accordent à préciser les experts de l'OIM et des marins nationaux interrogés. Quant à la question de la formation et de la mise à niveau des effectifs navigants, l'Algérie, à en croire nos différentes sources, jouirait d'un «haut potentiel», en la matière. En plus de l'université de Annaba qui est dotée d'un département dédié aux sciences de la mer (biologie et ressources marines), fort d'une douzaine de maîtres de conférences, maîtres-assistants et chercheurs, des formations diplômantes et qualifiantes sont dispensées par, entre autres, l'Ismal d'Alger (Institut des sciences de la mer et de l'aménagement du territoire), l'Ecole nationale supérieure maritime (ENSM) ex- ISM (Institut supérieur maritime) de Bou Ismaïl (Tipasa), l'Institut des sciences de la mer et de l'aménagement du littoral (Alger), les deux écoles techniques de formation et d'instruction maritimes (Etfim) à Béjaïa et Mostaganem et le Centre international des sciences et techniques des transports maritimes et des activités portuaires (CSTM), établissement privé basé à Tipasa. Mieux, toujours dans le domaine maritime, «les diplômes et les brevets attribués par l'ex- ISM, actuelle ENSM de Bou Ismaïl, habilitent la plupart des effectifs de la navigation côtière, pour le long et moyen cours, surtout, à exercer à l'international, car leurs diplômes sont conformes aux standards internationaux, les normes requises par la Convention STCW notamment», tiennent à souligner des marins (près de 25 ans de navigation) ayant exercé à la Compagnie internationale Bulk Carrier (IBC), filiale CNAN. Mieux, l'ENSM, qui n'a rien à envier au Centre européen de formation continue maritime (CECFM) de Bretagne (France), serait un établissement de renom, considérant son statut de section régionale de la prestigieuse Université maritime mondiale (UMM) de Malmoe (Suède). Fondée par l'OMI au début 80, cette université qui vient de célébrer son 35e anniversaire (4 juillet) s'est vu, en l'espace de quelques années, propulsée au rang de centre mondial d'excellence dans les domaines de l'enseignement, de la formation et de la recherche maritimes. D'où la reconnaissance internationale que se sont attirée les marins, toutes spécialités et tous grades confondus, sortis de l'ENSM ou y ayant bénéficié de stages de perfectionnement au cours de leur carrière, et ce, au même titre que leurs ex-camarades, originaires de nombre de pays africains et arabes, ayant également fréquenté la même école. D'ailleurs, nous a-t-on appris, de plus en plus nombreux sont ceux d'entre eux à avoir décidé de «lever l'ancre» en attendant des jours meilleurs.