La publication du Dr AllouiI Rafik comporte les principaux résultats de l'Année internationale du tourisme durable pour développement du tourisme 2017, abordant les changements nécessaires dans les politiques, les pratiques commerciales et le comportement des consommateurs pour le tourisme et contribue efficacement à l'agenda 2030 pour le développement durable. Ce travail scientifique vient à l'inverse de sa non-prise en considération par les décideurs et autorités de son pays, l'Algérie. A l'issue de sa soutenance avec succès pour l'obtention d'un DBA, l'unique en Algérie (Doctor of business administration), au niveau de l'université Sofia Antipolis de Nice, il a saisi toutes les autorités pour leur offrir ce travail combien important pour atteindre les objectifs du SDAT 2030. En vain. Aux abonnés absents.
Le monde a connu différentes sortes de tourisme depuis l'Antiquité. Les Grecs, les Romains ou encore les Egyptiens ont connu des formes de déplacement d'une région à une autre pour des raisons commerciales, curatives, de divertissements, de découvertes et aussi de guerre. Le terme tourisme apparaît pour la première fois en Angleterre au XVIIIe siècle. Il se définit par la formule «voyager pour son agrément». En Algérie, le tourisme a existé depuis toujours, sous des modalités diverses, mais il a considérablement évolué dans le temps: 1- Période de découverte : c'est celle des voyageurs qu'on peut déjà appeler «touristes», animés par une vive curiosité à l'égard de régions jusque-là peu prospectées. On peut citer parmi les personnages les plus connus : des écrivains comme Gustave Flaubert, Alphonse Daudet, des peintres orientalistes, comme Eugène Delacroix, sans parler de géographes et d'archéologues. Ceux parmi eux qui ont entrepris de recenser tous les sites historiques, écologiques, géographiques, touristiques de l'Algérie sont unanimes pour dire: «La richesse en paysages et en patrimoine de l'Algérie est exceptionnelle.» En effet, l'Algérie se caractérise par des atouts touristiques naturels, culturels et historiques exceptionnels, nous y reviendrons en détail au cours de nos développements. 2- Périodes des hivernants : durant la fin du XIXe siècle et le début du XXe, s'établit en Algérie un tourisme de séjour, avec les «hivernants». En 1937, le Larousse définissait l'hivernant ainsi : «Qui va passer l'hiver dans le midi, en Algérie…» Durant plusieurs décennies, avant et après 1900, il y eut l'âge d'or du tourisme en Algérie, Alger rivalisait avec Nice et Cannes pour des séjours d'hiver. 3- Période des croisières : après la fin de la Première Guerre mondiale, ces hiverneurs furent relayés par les croisières maritimes et les «tours» organisés chaque hiver, les plus grands paquebots en provenance d'Angleterre et surtout des Etats-Unis, n'omettaient jamais l'escale d'Alger dans leurs circuits méditerranéens. Presque quotidiennement s'amarraient dans le port, pour une journée et parfois pour plusieurs, des géants de la Cunard Line, de la White Star et autres lignes renommées de l'Atlantique. 4- Période des auto-circuits : la Compagnie Générale Transatlantique lançait les auto-circuits des «voyages et hôtels nord-africains», des autocars spéciaux, aussi confortables que possible à cette époque, reliaient une vingtaine d'hôtels, dont quelques fondouks-hôtels, dans l'Algérie du Nord, y compris la Kabylie et l'Aurès un peu plus tard, une dizaine au Sahara (circuit du Grand Erg, d'Oued Ghir). Les hôtels du centenaire (réalisés à l'occasion des 100 ans de présence française en Algérie), parmi lesquels l'hôtel Aletti d'Alger, dans lesquels, Anglais, Nordiques et Américains ont séjourné. 5- Période de l'euphorie touristique: suivant l'explosion mondiale du tourisme et malgré la guerre d'Algérie, une cinquième période s'engage à la faveur du prodigieux essor économique suscité par les richesses du sous-sol saharien. Un plan d'équipement mûrement élaboré, appelé «Plan de Constantine», proclamé dans cette ville en 1958, programmait, entre autres, des hôtels, des villages de vacances, des auberges de jeunesse, des stations d'altitude, à la mesure de la vogue nouvelle des plages et de la neige. Les initiatives privées n'étaient pas en reste suivant un enthousiasme généralisé. Cet engouement a encouragé les pays touristiques à se doter d'une organisation internationale. Le premier Congrès international des organismes nationaux de tourisme, réuni à Londres en 1946, a décidé de créer une organisation internationale non gouvernementale, «l'Union internationale des organismes officiels de propagande touristique (UIOOPT)». Cette instance a misé à fond dans un premier temps sur le tourisme international (le tourisme apporte des devises, crée de l'emploi, assure un équilibre régional, etc.) et a vivement recommandé à tous les pays de se lancer dans l'exploitation de leurs ressources touristiques. Les Unités touristiques nouvelles (UTN) ont été créées, tandis que dans les stations balnéaires, on a construit de gigantesques «barres» d'immeubles résidentiels. Partout dans le monde, à la mer comme à la montagne, les capacités d'hébergement, les moyens de transport et les équipements se sont développés, suivant la demande d'une clientèle de plus en plus nombreuse et diversifiée. L'Algérie a accédé à son indépendance en 1962, en plein essor mondial du tourisme, et contrairement aux autres pays du pourtour méditerranéen, malgré ses potentialités touristiques, ce pays n'a pas accordé au secteur du tourisme un rôle conséquent dans ses différentes politiques de développement. Le modèle de développement retenu a, dans les faits, accordé une place négligeable à la promotion de ce secteur, bien que les orientations contenues dans les différents textes réglementaires soient en phase avec les recommandations internationales, qui donnent au tourisme des missions en matière de création d'emplois, d'apport en devises et de satisfaction des besoins sociaux. Dans le monde, la promotion du tourisme international s'est étalée sur près de deux décennies et s'est traduite par une concurrence entre les pays des différents continents. Néanmoins, cette course effrénée était hâtive et ne reposait pas sur une connaissance exacte des mécanismes qui président aux fondements de l'activité touristique. Le tourisme international, non seulement pourrait entraîner des effets économiques négatifs, vu la disparité entre pays émetteurs et pays récepteurs, mais était également susceptible de provoquer des perturbations très graves sur le plan social, culturel et écologique. Des réserves de plus en plus nombreuses, assorties de critiques, voire de remise en cause, ont fait leur chemin et ont provoqué un revirement de la tendance dans la doctrine des instances internationales, telle l'OMT, qui s'est substituée à l'UIOOPT en mai 1976. L'Algérie, qui est membre de cette organisation depuis la première année de sa création (1976), n'était pas en reste de ce revirement. En conséquence de ce retournement de tendance et pour trouver des solutions, l'OMT a multiplié les congrès et conférences au cours desquels tous les aspects du tourisme ont été abordés. Parmi ses plus importantes recommandations : 1- La mise en application d'un outil d'évaluation du tourisme «le compte satellite du tourisme, le CST» approuvé en 1999, lors de la conférence mondiale «Enzo Paci», sur la mesure de l'impact économique du tourisme, à Nice (France). 2- Un plan d'application pour un développement durable du tourisme, présenté lors du sommet mondial pour le développement durable tenu en 2002 en Afrique du Sud, au cours duquel a été présenté le programme ST-EP (le tourisme durable, instrument d'élimination de la pauvreté). L'OMT a préconisé essentiellement à tous les pays membres, dont l'Algérie, à mettre en œuvre ces deux recommandations. Dans ce contexte, comment a évolué le tourisme algérien ? A-t- elle pris en compte les prescriptions de l'OMT ? Avec ces potentialités éminemment reconnues, l'Algérie s'est-elle dotée d'une politique touristique ? Evalue-t-elle correctement ce secteur ? Et est-il géré de manière performante, avec le souci de l'adapter aux évolutions de la demande et de la concurrence internationale ? En réponse à ces questionnements nous pouvons avancer qu'en matière de tourisme et quel que soit le contexte dans lequel il a été inscrit au départ, les résultats de la politique menée en la matière et sur lesquels nous reviendrons en détail, ont été bien en deçà des objectifs fixés. Pour ce qui est du tourisme durable, l'Algérie a mis en œuvre en 2008 un Schéma national d'aménagement touristique (SDAT 2025) prolongé jusqu'au 2030, en conséquence des assises des 14 et 15 décembre 2015, consacrées au Schéma national d'aménagement du territoire (SNAT). Ce schéma, dont on reparlera, compte trois échéances : court terme (2009), moyen terme (2015) et long terme (2030), il montre comment l'Etat algérien compte assurer dans un cadre de développement durable le triple équilibre de l'équité sociale, de l'efficacité économique et de la soutenabilité écologique, à l'échelle du pays tout entier. Parmi les cinq lignes directrices qui constituent les orientations stratégiques du SDAT 2030, figure l'objectif de garantir une bonne gouvernance territoriale en matière du tourisme. Les quatre autres lignes directrices sont : 1- assurer un territoire durable. ; 2- créer les dynamiques du rééquilibrage territorial ; 3- assurer l'attractivité et la compétitivité des territoires ; 4- mettre en œuvre l'équité territoriale. Nous reviendrons sur les résultats de ces objectifs, mais on peut se demander comment l'Etat algérien compte garantir une bonne gouvernance territoriale en matière du tourisme ? Le SDAT ne répond pas à cette question, il mentionne simplement que «L' Etat doit agir par le perfectionnement des moyens d'intervention et de définition des outils et dispositifs lui permettant de mettre en œuvre ses politiques publiques et de les coordonner avec le secteur privé, qui assure progressivement l'essentiel du développement du système productif». Le terme «outil» est bien évoqué, mais s'agit-il d'un compte satellite du tourisme classique, limité aux seuls aspects comptables ? Cela peut-il régler le problème de la gouvernance ? En matière d'évaluation, l'Algérie continue, à ce jour, de travailler sur les données qui ne prennent en compte que les seules statistiques fragmentaires de l'hébergement, de la restauration et du transport aérien. Ces informations chiffrées, qui s'avèrent très insuffisantes pour mesurer l'impact économique du tourisme, mettent d'autant plus en évidence l'impérieuse nécessité de construire un compte satellite du tourisme «CST» intégrant le plus grand nombre d'informations sur le tourisme stricto sensu et sur ses relations avec le reste de l'économie. Cela est surtout nécessaire pour être en adéquation avec l'objectif de cet outil, mis au point par l'OMT : «mesurer le rôle du tourisme dans une économie nationale». Cela nous semble nécessaire sur le plan de la comptabilité nationale, car le CST sert de base pour l'analyse des interactions entre les données de ce compte et celles du cadre central en l'occurrence les comptes nationaux «CN».