Devant la Cour de justice internationale, l'Iran plaide en faveur de la levée des sanctions américaines entrées en vigueur dans leur première étape en août. Le président Rohani est convoqué aujourd'hui au Parlement pour s'expliquer sur la situation économique que traverse le pays. Téhéran a dénoncé, hier, devant la Cour internationale de Justice (CIJ), «l'étranglement» économique de Washington, en rétablissant des sanctions à l'égard de la République islamique, selon des médias. En ouverture des audiences dans une procédure engagée par l'Iran devant la CIJ pour demander la levée des sanctions, la délégation iranienne a plaidé pour un traitement avec une «urgence extrême» de l'affaire, vu les «conséquences dramatiques» sur son économie. «Les Etats-Unis propagent publiquement une politique visant à nuire le plus sévèrement possible à l'économie iranienne et aux ressortissants et entreprises iraniens», a déclaré l'agent de la délégation iranienne et conseiller juridique, Mohsen Mohebi. Lors de ces audiences qui doivent durer quatre jours, la République islamique demandera à la Cour de stopper temporairement les sanctions, avant que les juges de l'organe judiciaire principal de l'Organisation des Nations unies (ONU) se prononceront ultérieurement sur le fond de l'affaire. La réimposition des sanctions américaines «n'est rien d'autre qu'une agression économique flagrante contre mon pays», a ajouté M. Mohebi, estimant que «l'Iran opposera la plus forte résistance à l'étranglement économique américain, par tous les moyens pacifiques».Aussi, il a indiqué que son pays n'a «pas eu d'autre choix que de saisir la CIJ après avoir cherché en vain une solution diplomatique», en engageant une procédure en juillet, souhaitant «mettre fin sans délai» à ces mesures. L'Iran a soutenu que les initiatives des Etats-Unis constituent des «violations flagrantes» des dispositions du traité américano-iranien de 1955, qui prévoit des «relations amicales» entre les deux nations et encourage les échanges commerciaux. Sachant que les deux pays n'entretiennent plus de relations diplomatiques depuis 1980. La CIJ devrait statuer sur la fin provisoire des sanctions exigée par l'Iran dans les deux mois suivant le début des audiences. Mais une décision finale dans l'affaire pourrait prendre des années. Un président fragilisé En mai, le président américain, Donald Trump, a retiré son pays de l'accord sur le nucléaire, signé par l'Iran et le groupe 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, Grande-Bretagne, France, Allemagne) en juillet 2015, à Vienne. Accord à travers lequel l'Iran s'est engagé à ne jamais chercher à se doter de l'arme atomique. En contrepartie, Téhéran obtiendra une levée progressive des sanctions économiques qui lui sont imposées jusque-là. Le retrait s'est traduit par le rétablissement de sanctions américaines envers la République islamique. La première phase de ces sanctions est entrée en vigueur le 7 août. Elle comprend des blocages sur les transactions financières et les importations de matières premières, ainsi que des mesures pénalisantes sur les achats dans le secteur automobile et l'aviation commerciale. Le même jour, le président Trump a lancé un avertissement aux pays qui poursuivraient les transactions commerciales avec la République islamique. «Les sanctions contre l'Iran sont officiellement en place. Ce sont les sanctions les plus dures jamais imposées et en novembre elles augmentent encore à un autre niveau», a tweeté le président américain. Et d'ajouter : «Quiconque faisant des affaires avec l'Iran ne fera pas d'affaires avec les Etats-Unis. Je demande la paix mondiale, rien de moins.» En conséquence, plusieurs groupes ont annoncé la fin de leurs activités en Iran, à l'exemple du constructeur automobile allemand Daimler. D'autres n'ont pas attendu l'entrée en vigueur de ces sanctions, comme le constructeur PSA Peugeot-Citroën, qui détient un tiers du marché automobile iranien. Le groupe Total a renoncé à l'exploitation d'un nouveau champ gazier après l'annonce du retrait américain de l'accord sur le nucléaire iranien. Côté Airbus, le géant de l'aviation européen, seul 3 des 100 appareils commandés par les compagnies iraniennes ont pu être livrés, alors que le contrat atteint 10 milliards de dollars. L'allemand Siemens préfère arrêter l'activité, par peur de représailles sur le marché américain. La deuxième salve des sanctions prendra effet en novembre. Elle touchera le secteur pétrolier et gazier ainsi que la Banque centrale. Les sanctions américaines ont affaibli le président iranien, Hassan Rohani, qui a espéré récolter les dividendes de l'accord de juillet 2015 : la levée en partie des sanctions économiques sur la République islamique. Ainsi, il se retrouve confronté au mécontentement populaire et aux attaques de ses opposants alors qu'il est convoqué aujourd'hui au Parlement pour s'expliquer sur la situation économique que traverse le pays. Cette demande d'explication intervient après le limogeage, après un vote de défiance du Parlement, des ministres du Travail, le 8 août, et de l'Economie, dimanche dernier. Les partisans d'une ligne dure comptent rassembler les voix nécessaires pour permettre la destitution de deux nouveaux ministres (Industrie et Transport). Le Parlement a légalement le pouvoir de destituer le Président. Mais Rohani bénéficie encore du soutien du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, qui a critiqué sa politique tout en déclarant qu'il devait aller jusqu'à la fin de son mandat, en 2021.