Après avoir interdit aux journalistes d'accéder à Ghaza, Israël a arrêté et expulsé Richard Falk, expert sur les droits des Palestiniens auprès du Haut-Commissariat des droits de l'homme (HCDH). Une décision qui a fait réagir Mme Navi Pillay, ancienne magistrate sud-africaine et haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, qui a, dans un communiqué diffusé sur le site web du HCDH, « reproché » à l'Etat hébreu d'avoir « violé les privilèges et immunités des Nations unies ». « Les Etats membres ont la responsabilité de coopérer avec les experts indépendants auprès des Nations unies nommés par le Conseil des droits de l'homme », a-t-elle déclaré. Selon Mme Pillay, Richard Falk voyageait en tant que « rapporteur spécial » sur les droits de l'homme dans les Territoires palestiniens occupés et s'est vu refuser le transit par Israël pour visiter Ghaza, à l'invitation de l'Autorité palestinienne. « A son arrivée à l'aéroport de Tel-Aviv, il a été arrêté à l'immigration, séparé des deux autres membres du personnel des Nations unies et gardé en détention pendant 20 heures avant d'être reconduit à bord d'un avion à destination de Los Angeles », a déclaré Mme Pillay, qui a jugé l'expulsion « sans précédent et profondément regrettable » tout en rappelant que « les rapporteurs spéciaux n'ont pas, en principe, besoin d'une invitation des autorités israéliennes avant de mener leurs missions dans les Territoires palestiniens occupés. Par le passé, le gouvernement israélien n'a pas posé d'entraves aux prédécesseurs de M. Falk, alors qu'il n'y a pas d'autre moyen d'arriver directement dans les Territoires palestiniens ». Le HCDH a ajouté dans son communiqué que le gouvernement israélien ne l'a informé de son intention de ne pas laisser transiter Richard Falk qu'« à la veille de son arrivée, vers 23h ». L'organisation onusienne des droits de l'homme a, par ailleurs, rappelé les positions de son envoyé spécial qui, à l'approche de son voyage, « avait souhaité, à propos de la situation à Ghaza, un effort urgent des Nations unies pour appliquer la “norme de la responsabilité” de protéger une population civile soumise à une punition collective équivalant à un crime contre l'humanité ». Il avait aussi estimé, a-t-elle souligné, que « la Cour pénale internationale (CPI) devrait enquêter sur cette situation afin de déterminer si les dirigeants civils et militaires israéliens responsables du siège de Ghaza ne devraient pas être inculpés et poursuivis pour violation du droit pénal international ». Cette déclaration intervient après la résolution du Conseil des droits de l'homme (CDH) condamnant « les graves violations des droits de l'homme commises par Israël, la puissance occupante ». Cette résolution, adoptée par 33 voix sur 47 (13 abstentions et une voix contre), avait fait état aussi de la décision du Conseil de dépêcher une mission d'enquête internationale indépendante (pour établir les faits) et de la ferme condamnation de l'opération militaire israélienne qui a « entraîné de graves violations des droits de l'homme du peuple palestinien ainsi que la destruction systématique de l'infrastructure palestinienne ». Le CDH a en outre demandé à Mme Pillay de « faire un rapport sur les violations des droits de l'homme du peuple palestinien par Israël en renforçant la présence du Haut-Commissariat dans le territoire palestinien occupé, en particulier dans la bande de Ghaza, en déployant le personnel et l'expertise nécessaires pour surveiller et faire rapport sur les violations des droits de l'homme israéliennes commises contre les Palestiniens et leurs biens ». L'interpellation et l'expulsion de Richard Falk, bien qu'il bénéficie de l'immunité onusienne, illustrent la volonté affichée de l'Etat hébreu à éloigner tout témoin qui pourrait gêner sa politique génocidaire contre le peuple palestinien, notamment à Ghaza. Durant les trois semaines de guerre, Israël a tué quatre journalistes palestiniens et blessé une dizaine d'autres dans ses raids militaires et empêché tous les correspondants des médias et leurs envoyés spéciaux qui ont transité par son territoire de rejoindre Ghaza, la ville martyrisée. Les plus chanceux, au nombre de huit, ont pu avoir une autorisation de la Cour suprême, mais les militaires leur ont quand même interdit l'accès, les obligeant à ne reprendre que les informations fournies par le porte-parole du gouvernement.