Censées débuter jeudi dernier à Genève, les discussions de paix sur la guerre au Yémen sous l'égide des Nations unies ont échoué avant d'avoir débuté, rapporte l'APS citant l'envoyé spécial onusien Martin Griffiths. «Nous ne sommes pas parvenus à faire venir ici (…) la délégation de Sanaa (des rebelles houthis). Nous n'avons tout simplement pas réussi», a constaté hier le diplomate de l'Organisation des Nations unies (ONU). Et «il est trop tôt pour dire quand se tiendront les prochaines consultations». Les discussions de Genève devaient être les premières depuis l'échec, en 2016, d'un long processus de paix pour tenter de mettre fin au conflit au Yémen. Mais les rebelles houthis, qui contrôlent de vastes pans du territoires yéménites dont Sanaa, sont restés dans la capitale yéménite en déplorant ne pas avoir bénéficié de garanties nécessaires pour pouvoir se rendre à Genève. Ils ont demandé notamment de pouvoir revenir à Sanaa après les discussions. La capitale yéménite est aux mains des insurgés depuis 2014. La coalition militaire conduite par l'Arabie Saoudite, qui les combat et qui soutient les forces pro-gouvernementales, impose un blocus aérien au Yémen. Visions inconciliables Les rebelles houthis ont exigé aussi pour se rendre à Genève de partir dans un avion omanais et de transférer des blessés vers Mascate (Oman), a déclaré jeudi un membre de leur délégation, Hamid Assem. Les belligérants ont campé sur leurs positions. La coalition et ses protégés yéménites exigent le respect de la résolution 2216 du Conseil de sécurité de l'ONU — reconnaissant «la légitimité» du président Abd Rabbo Mansour Hadi — le retrait des Houthis des territoires qu'ils ont conquis et la restitution des armes lourdes. De leur côté, les Houthis demandent, eux, «l'arrêt de l'agression» saoudo-émiratie avant toute concession. Le ministre des Affaires étrangères yéménite, Khaled Al Yamani, a critiqué l'attitude «totalement irresponsable» des Houthis, leur reprochant de «manquer de sérieux sur le chemin vers la paix». Comme il a tenu des propos acerbes à l'égard de l'envoyé spécial de l'ONU, «qui excuse l'absence» des rebelles. Il a soutenu que «le manque de pression (sur les Houthis) les a encouragés (…) à considérer avec dédain les efforts déployés». Et d'ajouter : «Nous sommes mécontents des propos (…) de M. Griffiths, mais nous soutenons totalement ses efforts et nous continuerons de le faire.» Martin Griffiths est le troisième médiateur à gérer le conflit yéménite. Dans la nuit du 25 au 26 mars 2015, l'Arabie Saoudite, à la tête d'une coalition arabe, a lancé une opération militaire aérienne au Yémen contre les rebelles houthistes, minorité zaydite d'obédience chiite. Objectif : chasser les Houthis de la capitale, Sanaa, qu'ils occupent militairement depuis septembre 2014, et rétablir le pouvoir du président Abd Rabbo Mansour Hadi, réfugié à Riyad. Sur le plan régional, l'offensive vise à contrer l'influence de l'Iran. Depuis 2004, les Houthis mènent la guerre au pouvoir central de Sanaa. Jusqu'à 2010, six guerres ont eu lieu entre les deux belligérants. Le président de l'époque, Abdallah Saleh, les justifie par le fait que les Houthis veulent rétablir l'imamat aux dépens de la République. Le Qatar propose ses bons offices pour trouver une issue au conflit. Cependant, la médiation de 2007, suivie d'un traité en février 2008 n'a pas empêché la reprise des combats en avril de la même année. De son côté, Riyad intervient militairement en novembre 2009 à Saada, bastion des Houthis situé à ses frontières. En août 2010, un autre traité est signé à Doha entre le gouvernement et les insurgés. Après le départ de Abdallah Saleh du pouvoir, ils poursuivent leur guerre contre les nouvelles autorités de Sanaa. En la circonstance, les partisans de l'ancien président deviennent alliés des Houthis. Le 23 août 2017, la direction des Houthis qualifie de «traître» l'ex-président Saleh pour les avoir présentés comme des «miliciens». Le 29 novembre, la crise entre ce dernier et les Houthis dégénère à Sanaa, où de violents combats éclatent entre les deux alliés. Le 2 décembre, l'ex-président Saleh propose à l'Arabie Saoudite de «tourner la page», à condition qu'elle lève le blocus renforcé un mois plus tôt après un tir de missile par les Houthis au-dessus de Riyad. Le 4 décembre, Abdallah Saleh est tué par des rebelles houthis, qui renforcent leur présence à Sanaa.