On supposait qu'il n'y avait de l'absurde que dans le cinéma. C'est dans un film que l'acteur joue toujours ce qu'il n'est pas. Nous constatons qu'il est aussi possible de parler d'une politique de l'absurde dans certains pays africains. Dans ce texte, l'histoire de Tonton l'absurde est imaginaire. La lecture politique des Mille et Une Nuits nous donne une bonne leçon de la vie. Shéhérazade a réussi à prolonger sa vie sous la menace de Shahryar en lui racontant des histoires imaginaires. Shéhérazade est le symbole du peuple et Shahryar est le roi dictateur. Babylone n'est plus. Baghdad est détruite sur les ruines de Babylone. Pour éviter le désastre à notre cher pays, faisons comme Shéhérazade. Imaginons et racontons les contes pour prolonger notre vie et sauver notre honneur. Chegarka est une rivière en Russie. Ne sachant pas nager, certains dirigeants africains ont bu de cette rivière. L'Afrique vit les conséquences de leur désaltération dans un discours politique incohérent. «Paroles, et paroles, et paroles», dit la chanson. En amour, comme en politique, les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent. Le «combo» cravate-chemise ton sur ton du député de 1982 lui donne le titre de Tonton l'absurde en 2017. La veste double face se vendait au boulevard de l'ALN quand Tonton était député. Les trente-six ans dans la même veste lui donnent le titre d'expert dans le bluff politique. Ces jours-ci, l'apparence des hommes et des femmes politiques n'attire plus les électeurs. Ces derniers les prennent pour des sacs d'argent! La célèbre Noura a chanté Paris dans mon sac dans la langue de Voltaire. Les jeunes rappeurs algériens chantent Un sac pour être député, dans la langue de la rue. Quand il était petit, Tonton ne voulait pas manger le couscous au «Hermès». Sa grand-mère est originaire du village Chaâbat El Laham (Laferrière) dans la wilaya de Aïn Témouchent. «Tu sais ce qui arrive aux garçonnets qui ne veulent pas manger le couscous ?», lui disait sa grand-mère, «Eh bien, la veille des législatives, la sorcière Tassadit vient les voir dans leur chambre et elle leur fait tellement peur que le lendemain, non seulement ils mangent le couscous, mais ils avalent le couscoussier avec pour mieux voter pour une Algérie française». Sa grand-mère lui a appris qu'on dit «déjeuner» ou «dîner» et non pas «manger». Aujourd'hui Tonton n'est plus un garçonnet. Il fait de la politique et se porte bien dans sa veste double face. Il n'a plus peur de la sorcière. Comme tous les politiciens, il conjugue le verbe manger à tous les temps et négocie avec les sorcières le prix d'une tête de député. Un milliard de centimes par tête de pipe, chante le rappeur. Tonton est malin. Il prétend avoir fait la Révolution avec le grand révolutionnaire Chegarka dans une île péruvienne. Tonton n'est plus jeune, comme il le pense. Sa mémoire est défaillante. C'est pour cette raison qu'il dit Chegarka au lieu de Che Guevara. L'adage algérien «H'na fi oued Lili, ou houma fi oued Mimi», explique la confusion chez Tonton. Chegarka est une rivière en Russie et Che Guevara est un révolutionnaire argentin. Voici comment Tonton étale sa stratégie politique pour une Algérie de demain. Dans une belle villa perchée sur les hauteurs d'Alger, Hydra, Tonton vit la belle vie. Il est heureux avec sept enfants adoptés. Tonton n'a jamais pensé que le mensonge dégrade la dignité de l'homme. Tonton nous informe de l'origine de ses enfants. Ils descendent tous de la tribu des Beni Titi. Tonton a plusieurs amis. Hamid, son ami d'enfance, un ancien maquignon originaire d'un petit village nommé Himsounine, au royaume des Kutumas, les Aurès. Tassadit est originaire de la tribu des Beni Aïdel. Elle est sorcière spécialiste dans la lecture des paumes des politiciens. Akli est originaire de Beni Snous, un village pas loin de Tlemcen. Il connaît bien Tonton. Ils ont chassé les perdrix à Djebel Amour en 1959. Hamida est une déracinée du douar Beni Hendel. Elle ne se rappelle pas de l'origine de son père. On lui raconte qu'il est originaire de Kabria, dans la wilaya de Tissemsilt. Elle était hôtesse de l'air et adore «mardoud» Laghouat. Faroudja est originaire de la tribu des M'Zita. Elle habite Tamanrasset. Elle a investi dans l'agriculture et vient souvent chez Tonton pour lui demander des conseils et manger la zeraïga, de la galette émiettée dans du beurre. Si H'midouch, originaire d'Adrar, médecin autodidacte (pour ne pas dire charlatan), prétend être spécialiste des dattes blidiennes. Il connaît Tonton. Ils ont fait l'aumône dans une gare de Berlin-Est durant la Révolution. Si H'midouch a son quota de députés. Les candidats achètent leur siège chez H'midouch. Nous sommes en mars 2017 chez Tonton l'absurde. Les invités de Tonton sont venus à Hydra pour s'informer. Ils parlent politique, législatives, cherté de la vie et absence du Président. Hamid et Akli sont des candidats FLN. Hamida veut être présidente de l'UNFA. Faroudja veut devenir ministre de l'Agriculture. Elle sait comment planter l'ail et traire les vaches soudanaises. Akli est candidat RND. Il est venu chez Tonton pour lui donner un coup de main. Akli est très intelligent. Il sait que la veste double face de Tonton montre le sigle FLN et miroite l'abrégé du RND. Tassadit joue le rôle de Madame Soleil. Elle voit le futur de nos enfants dans les paumes de nos députés. Elle conseille aux jeunes de ne plus avoir peur de leur avenir. Tassadit les rassure ! Leur avenir n'existe pas ! Tassadit a peut-être raison. Pourquoi avoir peur d'une chose qui n'existe pas ? Tonton connaît le système de chez nous. Il demande à ses invités d'écouter ses conseils dans un discours improvisé à la FLN. Il simule un mini-Parlement chez lui. Ses sept enfants représentent le peuple. Les invités représentent la classe politique après le 4 mai prochain. Tonton commence son discours en s'attaquant à l'opposition qui participe aux législatives. Le discours provenant de l'opposition est plat et a quelque chose de collant dedans. Comme un chewing-gum américain, son fort goût sucré masque un arôme désagréable. La particularité de ce produit fait maison est unique. Très vite, il perd sa saveur et se colle sur la figure des citoyens qui veulent essayer de faire des bulles avant les législatives. Seuls les fabricants de ce chewing-gum savent comment transformer les bulles de laïus en projets miraculeux. Le projet Californie, à Mascara, et le projet Rahmet Rabi, à Constantine, sont de bons exemples. Faites comme nous disent ces simples d'esprit! Nous voulons le beurre et l'agent du beurre. Tonton prend une petite pause. Le peuple applaudit. Leur père joue bien le rôle du nouveau FLN. Tonton continue, nos grands-pères craignaient de ne plus voir le soleil sous la barbarie des gouverneurs colons. Sous la planification des fabricants du chewing- gum, nos enfants font face à un avenir ballonné. Il se retourne et s'adresse à Akli et dit : «Pour les vieux, comme moi et toi, qui étions de jeunes loups durant les années soixante, Michel Sardou était leur chanteur préféré. Ils aimaient écouter la chanson Le roi barbare. Je les assure que mes enfants volteront Michel Sardou.» Tonton demande à Tassadit de dire quelques mots. Tassadit prend la parole. Le mois de mai marque notre histoire. Ce mois de printemps est riche en événements politiques et sociaux. Il démarre la nuit du 30 avril après minuit. Cette nuit est dite «la nuit des sorcières». Puisque je suis sorcière, je vais vous raconter. Du 3 au 8 mai 1831, l'Emir Abdelkader attaque la ville d'Oran occupée par les Français. Le 5 mai 1865, Napoléon III est en visite à Alger. Il est venu pour nous dire que les Français sont arrivés sur notre terre pour nous civiliser. Le 19 mai 1919, l'Emir Khaled écrit une lettre au président américain W. Wilson pour dénoncer «la barbarie des colons français qui sont venus nous civiliser». Le 8 mai 1945, les Français massacrent 45000 Algériens pour une seule raison : ils voulaient vivre libres. Le 19 mai 1956, les étudiants rejoignaient en masse les djebels. Le 13 mai 1958, les Algérois d'origine européenne en appellent au général de Gaulle pour maintenir la souveraineté de la France sur l'Algérie. L'insurrection va avoir raison de la IVe République…. Le 19 mai 1958, le général de Gaulle donne une conférence de presse pour dire qu'il refuse de recevoir le pouvoir des factieux d'Alger. Il affirme aux journalistes qui s'inquiètent de l'éventualité d'une dictature : «Croit-on qu'à 67 ans, je vais commencer une carrière de dictateur ?» Le 8 mai 2012, la maladie empêche Boutefl–ika de s'adresser au peuple algérien une seconde fois. Tout ce que je viens de dire c'est du passé. Le 4 mai prochain cache ses secrets. Je vois ces secrets dans vos paumes. Je suis venu chez Tonton pour lire vos paumes et ne pas vous laisser tomber dans les pommes. Tonton apprécie les paroles de Tassadit et demande à H'midouch de dire quelque chose. Si H'midouch commence son speech. La peur qui nous agite réside dans les contes de nos grands-mères. La sagesse immémoriale de nos grands- mères a prédit cette situation. Elles nous racontaient des contes. Il faut les écouter. Le FLN n'est plus le symbole de l'union, de la fraternité, ou même de l'honnêteté. Je ne pense pas qu'une enquête sur la corruption au sein de ce vieux parti servirait à quoi que ce soit. Le départ de l'ancien secrétaire général, Si Amimir, a permis d'éviter un bain de sang en Algérie. Son remplaçant va dans le même sens …. La réussite, l'échec et l'apprentissage font partie de notre vie habituelle. Ce sont les bases qui nous permettent de grandir en tant que personnes. Je souligne le verbe grandir. «Après quatre-vingt ans, la grandeur ne signifie pas grand-chose et l'apprentissage est une idiotie naturelle», disait le poète et philosophe arabe Abu al-Alaa Al-Maarri. Certains spéculateurs pensent qu'une enquête est conduite pour démontrer une implication éventuelle de si Amimir dans un trafic d'argent sale et de drogue. Cette histoire ne tient pas debout. Elle me rappelle l'histoire de Quintillus. A la mort de Claude le Gothique, son frère Quintillus fut proclamé empereur avec le soutien du Sénat. Certaines fractions de l'armée refusèrent de le reconnaître. J'ai honte de vous dire que nous vivons la même situation. Faroudja intervint. Claude le Gothique et son frère Quintillus ne sont pas dans notre culture. Nous devons parler de Shahryar et de son frère Shah Zaman. Shahryar signifie le grand roi. On le nommait le «roi des rois» dans le livre des Mille et Une Nuits. Ce roi se faisait raconter des histoires par Shéhérazade. Cette dernière était supposée être sa femme. Son frère cadet, Shah Zaman, ou Shaw-zummaun, régnait sur Samarcande. En conclusion, l'histoire de Tonton est imaginaire. La lecture politique des Mille et Une Nuits nous donne une bonne leçon dans la vie. Shéhérazade a réussi à prolonger sa vie sous la menace de Shahryar, en lui racontant des histoires imaginaires. Shéhérazade est le symbole du peuple et Shahryar est le roi dictateur. Babylone n'est plus. Baghdad est détruite sur les ruines de Babylone. Pour éviter le désastre à notre cher pays faisons comme Shéhérazade. Imaginons et racontons les contes pour prolonger notre vie et sauver notre honneur.
Par le Pr Omar Chaâlal Associate Professor Chemical Engineering Department , College of Engineering Abu Dhabi University