Les importations algériennes de céréales et dérivés, de médicaments et de lait et produits laitiers ont presque doublé, totalisant une facture de l'ordre de 7,82 milliards de dollars en 2008. Elle était seulement de 4,49 milliards de dollars durant l'exercice 2007. Ce sont des chiffres officiels diffusés hier par le Centre national de l'informatique et des statistiques (Cnis) relevant des Douanes nationales. Ils (les chiffres) sont effarants et témoignent d'une grave dépendance, dont souffre le pays sur le plan alimentaire. La facture est plus salée que jamais et les chiffres vont crescendo. Même si le Cnis impute cette augmentation à la forte hausse des cours des matières premières sur les marchés internationaux, il n'en demeure pas moins que l'économie nationale demeure otage des lobbies de l'importation. Ahmed Ouyahia avait, rappelons-le, accusé les lobbies et la mafia de l'importation d'être à l'origine de la flambée des prix des aliments de consommation de base qui, selon l'actuel Premier ministre, « n'ont rien à voir avec la Bourse internationale ». En septembre 2007, Ahmed Ouyahia, alors loin des couloirs officiels du gouvernement, avait déclaré : « Quand j'évoque les lobbies, je ne suis pas en train d'inventer une situation. Il est loin de mon intention de cacher des vérités au peuple algérien. C'est une réalité en face de laquelle nous sommes appelés à agir avec fermeté et rigueur. » Et de préciser : « Les lobbies visent actuellement une zone à haut risque. C'est la poche des citoyens. » 16 mois après, la facture de l'importation atteint à nouveau des niveaux incroyablement dangereux. La facture des céréales, semoules et farines a atteint la valeur de 3,98 milliards de dollars en 2008, contre 1,98 milliard USD en 2007, enregistrant ainsi une hausse de plus de 100% (100,61%). Les importations de médicaments, elles, ont totalisé 1,85 milliard de dollars durant l'année écoulée, contre 1,44 milliard de dollars en 2007, en hausse de 27,86%, précise le Cnis. Pour les laits et les produits laitiers, la facture s'est élevée à 1,29 milliard de dollars, contre 1,06 milliard de dollars en 2007, soit une hausse de 21,72%. L'Algérie, qui consomme 3,5 milliards de litres de lait par an, n'en produit que 2,2 milliards, dont 250 millions seulement sont collectés et traités par ses industries, si l'on se réfère aux statistiques officielles. L'on s'interroge si M. Ouyahia est capable aujourd'hui de couper les vannes à ces mêmes « lobbies de l'importations » qu'il considère d'un haut risque pour l'économie algérienne. Ceci dit, le volume global des importations de l'Algérie a augmenté de 41,71% en 2008. Il est porté à 39,16 milliards de dollars contre 27,63 milliards en 2007. En 2006, les importations étaient de l'ordre de 21 milliards de dollars et 20 milliards en 2004, selon des chiffres diffusés aussi par le Cnis. Ainsi, les statistiques ne cessent de marquer des records et risquent, à l'avenir, de mettre l'Algérie au régime sec. Il est vrai que les discours officiels plaident pour « une Algérie à l'abri de la crise », mais les effets risquent de se faire ressentir si cet orage financier perdure et les prix du pétrole se maintiennent à des niveaux aussi bas. Pour revenir aux importations, leur répartition par groupes de produits fait ressortir une hausse pour l'ensemble des groupes de produits. Effectivement, les importations destinées aux équipements, qui représentent près de 34% du total des importations, sont passées de 8,68 milliards en 2007 à 13,19 milliards de dollars durant 2008, en hausse de 52%. Les hausses ont aussi touché les biens destinés à l'outil de production (35,16%), soit 11,83 mds USD, les biens de consommation alimentaires en hausse de 55,75 % (7,71 mds USD) et enfin les biens de consommation non alimentaires avec +22,30% soit 6,41 milliards de dollars. Le pire est à venir si l'on tient compte des dernières prévisions à court et à moyen termes de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Cette organisation estime que, par rapport à la moyenne observée entre 1998 et 2007, les projections des prix des produits alimentaires pour la période 2008-2017 indiquent une hausse de 20% environ pour les viandes bovine et ovine, de quelque 30% pour le sucre brut et le sucre blanc, de 40% à 60% pour le blé, le maïs et le lait en poudre. Pour la même période, l'augmentation se situera au-dessus des 60% pour le beurre et les graines oléagineuses et de plus de 80% pour les huiles végétales. Ainsi, chiffres à l'appui, l'Algérie risque de voir ses réserves budgétaires chuter des suites de l'effondrement des cours du pétrole et les dépenses grimper davantage du fait d'une dépendance à l'importation plus poussée que jamais.