La fracassante sortie médiatique de Mohamed Zerouati, président de la JS Saoura, qui a tiré à boulets rouges sur le président de la Fédération algérienne de football (FAF), Kheireddine Zetchi, l'accusant nommément d'être derrière les malheurs de son équipe en instrumentalisant les arbitres – c'est lui qui le dit – n'ajoute rien à la gloire d'un football de plus en plus décrié. L'épisode Zerouati intervient quelques jours après le documentaire de la BBC qui a épinglé le football algérien dans le chapitre très sensible de l'intégrité et de l'éthique. Au-delà des graves accusations proférées par un président de club contre le président de la Fédération, il s'agit de savoir si des suites appropriées seront données à cette affaire. L'intervention de la commission de discipline est incontournable comme, a priori, la lourde sanction (suspension) qui sera infligée au président de la JS Saoura pour «propos injurieux, diffamatoires». L'enjeu de cette affaire est ailleurs. Il se situe au niveau de la commission de l'éthique et du fair-play de la Fédération qui devra être saisie pour ouvrir une procédure (enquête) avec audition de toutes les parties. Malheureusement, la commission d'éthique et du fair-play de la Fédération n'est pas outillée du tout pour intervenir dans le cadre des règlements et statuts. Cette commission est jusqu'à présent une coquille vide avec, certes, un président de formation juridique, et puis plus rien. Avec sa composante actuelle et sa formation, elle ne pourra prononcer de sentences comme le droit le lui confère lorsque ses statut et règlement sont en harmonie avec son objet. Dans un communiqué de la FAF, il est précisé : «La commission d'éthique et du fair-play (de la FAF) est une déclinaison de celle de la FIFA.» C'est aller un peu trop vite en besogne. Dans les statuts de la FIFA, il est fait mention «commission d'éthique indépendante». Pour la FAF c'est «commission d'éthique et du fair-play». Une commission d'éthique et du fair-play qui n'est pas outillée Le terme «indépendance» prend toute sa valeur dans l'intitulé d'une commission appelée à trancher les affaires d'éthique… en toute indépendance. Le terme a sauté pour laisser place au fair-play. La FAF ose écrire que sa commission est une déclinaison de celle de la FIFA. Un peu plus loin dans son communiqué, la FAF indique : «La FAF fait ce bref rappel en raison de certaines interprétations erronées, voire des spéculations sur le vrai rôle de cette commission sur la scène footballistique.» Hallucinant ! Qui a désigné Mohamed Maouche président de la commission d'éthique et du fair-play au début du mandat de l'actuel bureau fédéral ? La FAF ne savait même pas que cette commission était un organe juridictionnel et qu'à ce titre le poste de président revenait à un juriste de formation, que malheureusement Mohamed Maouche n'a jamais été. Au lieu de donner des leçons malvenues, la Fédération serait mieux inspirée de reprendre les fondamentaux, parce que jusqu'à aujourd'hui elle est loin de maîtriser le sujet, dans le cadre précis de la formation de cet organe. Si la commission en place, présidée par l'homme de loi Zouaoui, était une déclinaison de celle de la FIFA, elle serait composée de deux chambres. La première, chambre d'instruction composée de 5 membres, et la seconde, chambre de jugement formée de 6 membres. Nulle trace ni évocation de ces deux chambres dans la composition de la commission d'éthique et du fair-play. Est-ce à dire que le président Zouaoui et les deux membres de cette commission (Maouche et Gueddah) traiteront en solo les affaires et prononceront les éventuelles sanctions sans que l'affaire soit instruite et jugée par les deux chambres ? D'où l'importance du terme indépendance auquel la FAF a préféré fair-play. Notons enfin le silence que la Fédération a observé après la publication du document de la BBC, qui a ouvertement indiqué que la corruption et les arrangements de matchs en Algérie sont une pratique courante. Pour moins que rien, la FAF est montée sur ses grands chevaux. Sur cette affaire, le président de la Fédération, Kheireddine Zetchi, a tenu des propos maladroits. Il a reconnu que les mauvaises pratiques dénoncées par la BBC (la corruption) sont un fait admis, mais qu'il est difficile d'en avoir les preuves. S'il n'y a pas de preuves, alors comment lui peut-il avancer que la chose dénoncée existe dans le football algérien ? Donc, il dit une chose et son contraire. Après le documentaire de la BBC et les accusations de Mohamed Zerouati qui visaient directement le président de la FAF dans le domaine le plus hideux du football, la Fédération a tout intérêt à mettre en place une vraie commission d'éthique qui va avoir du pain sur la planche. Les violations du code d'éthique et de l'intégrité d'une rencontre ou d'une compétition sont farouchement combattues par la FIFA. La FAF, plus que la FIFA, n'a pas le droit de faire une économie dans ce domaine très sensible qu'est la lutte contre la corruption sous toutes ses formes.