Les organisations de commerçants considèrent cette tendance haussière comme «normale» et l'expliquent par la «période transitoire entre les saisons». La mercuriale a connu, ces dernières semaines, une hausse fulgurante, mettant ainsi à rude épreuve le budget des ménages, déjà épuisé par la rentrée scolaire. Dans les marchés du pays, la hausse des prix n'a épargné ni fruits ni légumes. Courgette, tomate, poivron, pomme de terre, aubergine, concombre, navet ou encore pomme, pastèque, pêche et poire ont tous vu leur prix flamber. Les organisations de commerçants considèrent cette tendance haussière comme «normale» et l'expliquent par la «période transitoire entre les saisons». «Les prix de tous les fruits et légumes ont augmenté de 20 à 30% depuis deux semaines. Cela est habituel et attendu pour cette période de fin de saison, où les fruits et légumes saisonniers viennent à manquer sur le marché, d'où justement cette augmentation des prix. Parmi ces derniers, la pomme de terre qui a atteint les 80 voire 90 DA/kg et la tomate qui a franchi les 130 DA/kg dans certaines régions du pays. Cette tendance haussière ne va pas durer et les prix reviendront à la normale vers la fin de ce mois,au plus tard début novembre», explique El Hadj Tahar Boulenouar, président de l'Association nationale des commerçants et artisans algériens (ANCA), invité, hier, au forum du quotidien El Mihwar. Contrairement à la filière fruits et légumes, la volaille a connu une légère baisse par rapport aux semaines précédentes et tourne aujourd'hui autours de 310 DA le kilo. En été, ce prix dépassait les 450, voire les 550 DA. «Malgré cette baisse, la filière avicole reste en deçà des besoins du marché pour plusieurs raisons. La plus importante est le recours encore aux méthodes traditionnelles d'élevage et le manque d'organisation et de prévision pour cette filière. Ce manque d'estimation touche toutes les filières agricoles, générant ainsi des perturbations dans l'approvisionnement du marché, des spéculations et l'instabilité des prix», signale El Hadj Tahar Boulenouar. Et d'ajouter que la faible attention accordée à l'agriculture sous serre et à l'industrie agroalimentaire est également un des facteurs très importants dans la perturbation de l'équilibre entre l'offre et la demande. Pour lui, les organisations patronales doivent sortir de leur léthargie et agir afin d'encourager les agriculteurs, qui jettent souvent l'excès de production au lieu de le vendre aux unités de transformation. Quel rôle pour le conseil de la concurrence ? Pour Mustapha Zebdi, président de l'Association de protection et d'orientation du consommateur et son environnement (Apoce), invité également à ce forum, la hausse des prix n'a pas touché les produits de consommation seulement, mais aussi les services : «La situation empire d'année en année et les plus lésés sont les citoyens à revenu stable, à savoir les fonctionnaires dont le salaire de base n'a pas été revu depuis plusieurs années. Pour nous, l'Etat doit faire preuve de plus de rigueur pour les filières où les prix des produits sont réglementés, tels que le lait en sachet et le pain. Viennent ensuite d'autres mesures à prendre en urgence.» Le président de l'Apoce plaide pour la définition d'une marge bénéficiaire sur les prix des produits commercialisés, essentiellement ceux de large consommation ; la mise en application effective de la vente avec facture dans toutes les transactions commerciales ; l'accentuation du contrôle et surtout la création de marchés de proximité. «A défaut de ces espaces, nous soutenons les vendeurs informels comme solution provisoire qui facilite au consommateur l'accès à différents produits, notamment agricoles. Pour nous, il est inutile de chasser les commerçants informels en l'absence de lieux de substitution», poursuit-il. M. Zebdi rebondit sur le rôle de l'Etat dans la gestion du marché après l'interdiction de plus de 870 produits à l'importation : «A défaut de compétitivité et dans une situation de monopole, le produit local, que l'Etat a voulu encourager par cette mesure et dont la qualité reste encore à améliorer, a connu une hausse de près de 50%.» Et de signaler que l'Apoce a saisi le gouvernement à l'effet de mener une enquête sur le Conseil de la concurrence qui, selon ses propos, est «loin d'accomplir ses missions». M. Boulenouar va encore plus loin et demande à l'Etat de revoir la politique des subventions, car «le but escompté – qui est de faire parvenir au prix réglementé le produit fini, tels le lait et le pain, au consommateur – n'est pas atteint. Ces produits ne sont pas accessible au prix réglementé. Le système de subvention actuel a montré ses défaillances. Il est grand temps aujourd'hui de le réorienter vers le consommateur». Concernant les produits interdits d'importation, le président de l'ANCA estime que cette décision n'a pas permis de diminuer la facture des produits alimentaires. Estimée à 5,894 milliards de dollars entre janvier et fin août 2018, cette facture, selon El Hadj Tahar Boulenouar, est appelée à connaître une hausse d'ici la fin de l'année. Pour le conférencier, il est aujourd'hui indispensable de revoir cette liste et la réorienter vers les produits qui pèsent lourd, tels les céréales et la poudre de lait. Une mesure qui doit être mise en place de manière graduelle, dans le cadre d'une stratégie à moyen et long termes permettant d'encourager ces deux filières au niveau local.