Les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine (UA) se sont penchés une nouvelle fois, hier, sur la création d'un « gouvernement de l'Union », réclamé par le dirigeant libyen Mouammar El Kadafi, mais cette demande ne semble pas faire l'unanimité. Les travaux de cette session spéciale, sur cette question précise, se tiennent depuis hier à huis clos au siège de l'Union à Addis-Abeba, une réunion précédant la tenue, à partir d'aujourd'hui, du 12e sommet ordinaire de l'UA. Cette question devait être examinée lors du précédent sommet en Egypte (juin 2006), mais elle a été reportée en raison d'un ordre du jour chargé, rappelle-t-on. Lancé en 2007 à Accra, ce projet se veut un arrangement politique transitoire en vue de la création des Etats-Unis d'Afrique. Il est prévu qu'il soit doté d'une conférence plus concentrée et d'un conseil exécutif, d'une commission jouissant d'un pouvoir exécutif sur les questions déléguées totalement ou partiellement par les membres de l'Union, a-t-on expliqué. Il est aussi prévu que ce gouvernement soit soutenu par des systèmes parlementaires et judiciaires, ainsi que des institutions financières continentales et par un cadre approprié pour la participation des acteurs non étatiques. L'on considère que ce projet doit être explicité ; il ne s'agit pas de transposer des modèles mis en œuvre ailleurs et qui ont montré leurs limites. Il s'agit, en l'occurrence, d'une perte de souveraineté, et sur ce point, de nombreux Etats sont réticents, voire opposés. D'ailleurs, ceux qui avaient expérimenté ce système connaissent des fractures souvent sérieuses avec l'émergence des souverainistes, et de la notion de grands et petits Etats. L'idée d'une Afrique unie présidait à la création de l'OUA dans les années 1960 par les pères de l'indépendance, après des siècles de colonisation européenne. L'UA est déjà allée beaucoup plus loin que son aïeule. Le dirigeant libyen, un des artisans de la transformation de l'organisation continentale, rêve de voir se mettre en place les « Etats-Unis d'Afrique » avec l'objectif, selon certains observateurs, de pouvoir les diriger. Mais pour certains pays, le gouvernement de l'Union existe déjà avec la Commission qu'il suffit de renforcer progressivement, ainsi qu'avec les autres institutions comme le Parlement panafricain ou la Cour de justice panafricaine, à l'instar de la construction européenne. « La question n'est pas de savoir si l'unité sera ou non réalisée. Les 53 Etats membres ont dit qu'il est nécessaire d'avoir un gouvernement de l'Union avec des Etats souverains et indépendants. La question est de savoir quand et comment », a assuré le ministre tanzanien des Affaires étrangères, Bernard Membe, qui présidait la réunion ministérielle préparatoire au sommet. La réponse n'est peut-être pas claire, mais c'en est une, et dans le langage diplomatique, elle ne suscite pas l'enthousiasme.