De plus en plus d'insuffisants rénaux souffrent d'anémie. Leur nombre ne cesse d'augmenter avec des complications désastreuses. Les spécialistes insistent sur la prévention des maladies liées au syndrome métabolique, notamment le diabète et l'hypertension. Ces deux maladies sont justement les facteurs déclenchants de l'insuffisance rénale chronique (IRC). Du point de vue des spécialistes, l'anémie a toujours été considérée comme un symptôme fonctionnel qui altère la qualité de vie du patient (fatigue, capacités physiques diminuées). « L'anémie fait progresser l'insuffisance rénale, aggrave les maladies cardiovasculaires, perturbe un certain nombre de facultés (dénutrition). Les bonnes pratiques, étant actuellement reconnues, recommandent que l'anémie soit corrigée le plus tôt possible, c'est-à-dire avant la dialyse, d'autant qu'on a les moyens scientifiques de le faire (disponibilité du fer, agents stimulants de érythropoïétine », a déclaré le Pr Canaud, chef de service néphrologie à l'hôpital de Montpellier lors de la journée scientifique sur la prise en charge de l'anémie en prédialyse, organisée la semaine dernière par le laboratoire Roche à Alger. Il estime que la prévention est un élément essentiel face à ces maladies qui sont, notamment, très handicapantes. « Le diabète et l'hypertension font le lit de l'IRC ; il faut alors les prévenir et les traiter », a-t-il signalé en précisant que les praticiens doivent être formés pour mieux diagnostiquer et mieux traiter. « Donc, la correction de l'anémie permet d'amener les insuffisants rénaux en meilleur état général à la prise en charge en dialyse. Les érythropoïétines, dont nous disposons actuellement, surtout celles à longue durée d'action, comme le Mircera, permettent d'espacer les injections (1 fois par 15 jours à 1 fois par mois (en entretien). Effectivement, elles facilitent la correction de l'anémie. Pour le patient, c'est plus confortable. Pour la logistique, c'est plus simple (besoin seulement d'une seringue sous-cutanée). Le patient peut le faire lui-même avec une éducation minime », a-t-il indiqué en précisant que « le taux d'hémoglobine ne doit pas dépasser les 11 grammes. Il a, par ailleurs, insisté sur la meilleure stabilité de l'hémoglobine. Si cette dernière est trop variable, cela augmente la mortalité ». Pour le Pr Benabadji, chef de service de néphrologie à l'hôpital de Beni Messous, « l'anémie reste un élément important et non négligeable dans le tableau de insuffisances rénales chroniques. Actuellement, les thérapeutiques modernes apportent une solution et améliorent la qualité de vie du malade. L'hémodialyse a apporté une révolution médicale et l'hémodialyse a été elle-même révolutionnée par tous les progrès qu'elle a connus. Celle d'aujourd'hui n'est plus celle d'hier ». Le Pr Rayane, président de la Société algérienne de néphrologie, a, quant à lui, insisté sur la généralisation de l'utilisation de l'EPO (érythropoïétine) dans les structures publiques et privées avant et en dialyse, pour plusieurs raisons. « Avant dialyse, on peut retarder l'évolution de l'insuffisance rénale chronique ; ainsi les malades auront une meilleure qualité de vie. Au cours de la dialyse, c'est la prévention des complications cardiovasculaires. En effet, un taux d'hémoglobine entre 10 à 12 g par DCL réduit le risque d'hypertrophie ventriculaire gauche, diminue les accidents coronariens et les AVC. Comme avant dialyse. L'érythropoïétine assure une meilleure qualité de dialyse, (une dialyse adéquate ; le fait de ne pas avoir d'anémie est un critère de bonne dialyse) ; un bon profil nutritionnel, c'est-à-dire qu'ils peuvent manger correctement ». Il relève que l'utilisation aussi de l'EPO chez les patients dialysés permettra de ne plus recourir aux transfusions sanguines qui sont source de contaminations virales et entraînent une hyperimmunisation qui réduira les chances de transplantations rénales. C'est pour toutes ces raisons que le comité médical de néphrologie va organiser une réunion de consensus pour élaborer des recommandations du traitement de l'anémie des insuffisances rénales chroniques, qui seront transmises au ministère de la Santé publique. Le Pr Rayane a tenu aussi à souligner que la dialyse n'est que transitoire, d'autant que les malades sont de plus en plus jeunes. Il faut, selon lui, encourager le programme de transplantation.