Le forum des chefs d'entreprise (FCE), ce club de réflexion qui regroupe une centaine de chefs d'entreprise non pas des moindres, s'oppose à cette optique décidée lors de la tripartite tenue les 3 et 4 mars et à laquelle il n'avait pas pris part. Rappelant, dans un communiqué rendu public hier, qu'une pareille mesure a été déjà introduite dans l'avant-projet de loi de finances pour 1999 mais abrogée par les députés d'alors, le FCE a souligné «les craintes et l'effervescence» qu'a suscitées cette information. Le FCE, dont le chiffre d'affaires réalisé en 2004 est de 536 milliards de dinars, se dit «surpris par cette décision du gouvernement» de remettre au goût du jour «une question qui fut déjà tranchée par l'institution législative». Notant que les allocations familiales ont été toujours prises en charge par le Trésor public, le FCE prévient quant aux répercussions négatives de cette décision qui, à ses yeux, ne fera que stimuler et favoriser la prolifération du «travail au noir». Le FCE ne doute pas que cette pratique, jusque-là «largement utilisée dans les sphères de l'économie informelle», va prendre de «l'ampleur par la non-déclaration aux caisses de sécurité sociale, et ce, quels que soient les efforts que déploient les services du contrôle et de l'Inspection du travail (…)». Certes, ce n'est pas là toute la crainte des membres de ce forum, considérés comme les plus grands employeurs du secteur économique. Estimant que cela «altérera une mission primordiale de l'Etat», à savoir «l'organisation de la solidarité nationale», le FCE craint que «la prise en charge par la collectivité du paiement des allocations familiales induira une discrimination et une injustice, en ce sens que les enfants des agents de l'administration et du service public en général seront favorisés par rapport aux autres enfants dont les parents subissent le travail au noir et sont victimes de la précarité de l'emploi». Appréhendant les conséquences sur le plan social, le FCE se dit convaincu qu'inéluctablement les employeurs s'échineront à recruter des célibataires au détriment des pères de famille. Le FCE se demande pourquoi les pouvoirs publics veulent s'aligner sur les normes universelles, sachant que le régime des allocations familiales est «un instrument de régulation de la démographie en Algérie». Aux yeux de ce forum, chaque pays à le libre choix d'opter pour «le système qui convient aux politiques qu'il met en œuvre dans ce domaine». Autre argument du FCE, c'est le fait que «cette mesure pénalisera particulièrement l'entreprise respectueuse de la législation du travail». Comment ? Selon lui, l'imputation de ces charges à l'entreprise va alourdir les coûts de revient de ses produits, minimisant ainsi ses chances face à la «concurrence déloyale, générée par le marché informel». En sus, le FCE trouve qu'une telle décision ne fera qu'aggraver la situation de l'entreprise algérienne déjà fragilisée par de nombreuses embûches entravant son bon fonctionnement, surtout que l'ouverture du marché sera plus grande du fait des accords internationaux paraphés par l'Algérie. Le FCE estime, en outre, que les charges fiscales des entreprises sont déjà assez «lourdes» et seront même «insupportables» avec cette mesure. Il considère par ailleurs que cela vient à contresens des attentes des chefs d'entreprise qui ont toujours revendiqué l'allégement de leurs charges fiscales, de telle sorte que cela leur permette de développer leurs activités et créer plus de richesses. Le FCE trouve que «dans la phase actuelle, rien ne justifie cette mesure» et appelle ainsi le gouvernement à élargir la concertation. Car, à ses yeux, cette question, comme de nombreuses autres, ne peut être traitée dans un cercle restreint.