Pnnrojections à la file d'un programme au ciné Burkina : L'avocat des causes perdues (Burkina), L'Absence (Mali), Mémoires d'une femme (Tunisie), pas de fictions mémorables. De Tunisie, le beau film de Fadhel Jaziri n'est finalement pas sélectionné : une erreur. C'est une œuvre passionnante qui raconte les luttes politiques et syndicales dans la Tunisie des années trente. Si le Fespaco part comme une kermesse, les gens de Ouaga ne se laissent pas détourner de leurs problèmes. La vie n'est pas facile. Avenue Nelson Mandela, un car bondé lâche ses passagers qui s'éparpillent à toute vitesse à la recherche de travail. Ils courent chaque matin ainsi pour grappiller à gauche et à droite quelques francs CFA. Ils réparent des roues de vélos, transportent des plateaux de carottes et de papayes sur la tête, poussent des charrettes de pneus et de bidons en plastique, vendent des cartes de recharge et de faux Adidas… triste vie à Ouaga. Ceux qui ont la chance d'avoir un emploi font grève contre la vie chère. La situation sociale est très tendue. Le Journal du Jeudi (satirique) note que dans cette vague de revendications, tion. Faut-il croire que montrer des films africains, qui racontent les mêmes problèmes, va apaiser les tensions ? Cela dit, l'immémorial système néo-colonial tente de survivre à Ouaga. Au centre de presse, ce dimanche matin, les journalistes ne se bousculent pas. Et soudain un visage connu apparaît sur l'immense écran branché sur France 24. C'est Nabila Amir interviewée à propos des élections. L'Afrique, c'est petit. Mais où va l'Afrique ? Sérieux s'abstenir... L'organisation n'est pas le point fort de cet événement cinématographique africain. Débauche de discours triomphalistes avant même que la première image ne soit diffusée et que le programme ne soit imprimé et distribué à la presse. D'ailleurs quel programme ? C'est le flou total ici. Est-ce vraiment trop demandé aux organisateurs du Fespaco, calés dans leurs bureaux climatisés poursuivant une longue sieste, de faire l'effort d'établir un programme correct à l'avance pour la presse. Il n'était toujours pas imprimé le jour de l'ouverture. A la place, des feuillets agrafés et inutiles sont remis au siège du Fespaco qui annoncent tout le programme des festivités : parades, libations ,inaugurations de statues, expositions… la section cinéma est vide, déserte. Ce qui saute aux yeux aussi, ce sont les slogans, tout un fatras d'annonces en grosses lettres du genre : le Fespaco est l'espace privilégié du cinéma… mondial ! Et encore plus comique : le Fespaco envisage d'implanter des statues grandeur nature en bronze de tous les lauréats de l'Etalon Yennega. On est rassuré : Brahim Tsaki aura sa statue sur une place de Ouaga. L'information sur les films programmés est pourtant le critère fondamental de tout festival qui se respecte. A Ouaga, il y a des défilés bouffons sous un soleil impitoyable, mais toujours pas de cinéma. Cette situation ubuesque met à vif la compétence des organisateurs. Ce matin, jour d'ouverture, j'ai passé 2 heures d'attente au siège du Fespaco pour essayer en vain de récupérer mon badge. Il faut choisir, est-ce le cinéma ou le carnaval ? En attendant, on fait du tourisme dans cette ville poussiéreuse où les enseignes des stations-service portent le nom de Oil Lybia. Les Arabes de Ouaga se donnent rendez-vous au café « Chicha ». Ce sont surtout des Libanais. Ils fument et gesticulent comme dans un mélo égyptien dans Ouga by night. Un vieux exemplaire d'Al Hayat ( journal de la famille Hariri) traîne sur une table. Hommes d'affaires sans doute, leur odyssée depuis Beyrouth commence avec Air Algérie, au transit d'Alger, en attendant le vol de nuit pour Ouaga, on les croise qui débarquent du vol de Beyrouth. A Ouaga, quelques boutiques, sans tape-à-l'œil, leur appartiennent. Leur voyage s'arrête ici. Ils ne s'aventurent pas au fin fond de la brousse.