L'un des principaux objectifs de la politique de renouveau agricole et rural est de réduire la facture alimentaire et de faire en sorte que les différents acteurs s'orientent vers la production locale, a indiqué hier à El Watan, le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Rachid Benaïssa. « Il y a des actions à court terme et il y en aura d'autres à moyen terme », a-t-il signalé. Un premier dispositif a été mis en place pour réduire les importations de poudre de lait. Il prévoit d'octroyer une prime de 2 à 4 DA par litre aux transformateurs de lait qui contribuent à l'intégration de lait cru issu des fermes d'élevage nationales dans leur processus de production. Les éleveurs et les collecteurs recevront respectivement 12 et 5 DA pour chaque litre utilisé par les laiteries. Ce dispositif sera élargi à la tomate industrielle, aux céréales et aux légumineuses, mais aussi à d'autres produits de base, a souligné le ministre. Les éleveurs pourront également prétendre au « crédit fournisseur » qu'ils pourront obtenir auprès des abattoirs, en contrepartie de l'approvisionnement de ces unités, a fait savoir M. Benaïssa, qui signale que la Société de gestion des participations productions animales (SGP Proda) créera bientôt trois complexes d'abattage pour les viandes rouges à l'est, à l'ouest et au centre du pays. Selon le ministre, il y a désormais une politique volontariste de développement de l'agriculture. Il en veut pour preuve le dernier discours du président de la République à Biskra. « Il faut retenir que le Président a reconnu que notre facture alimentaire est passée de 3 à 8 milliards de dollars. Il a reconnu aussi que l'agriculture est un secteur structurant de l'économie nationale. On est sortis des hésitations. Il y a maintenant une prise de conscience et un courage politique », note le ministre. D'après lui, au-delà de l'effacement des dettes des agriculteurs, il y a une décision bien plus importante qui est une autre marque de reconnaissance à l'égard de la profession. Il s'agit de la mobilisation, pour les cinq prochaines années, d'un budget conséquent à raison de 200 milliards de dinars par an. Une bonne partie de cet argent, à savoir 70 milliards de dinars, sera consacrée à la régulation, alors que 60 milliards seront injectés dans le renforcement du capital productif, 60 autres dans le développement rural et environ 10 milliards dans le fonctionnement et le soutien technique, a précisé M. Benaïssa. Evoquant l'effacement de la dette des agriculteurs et des éleveurs, dont le montant est de 41 milliards de dinars au titre de crédits bancaires contractés auprès de la Caisse nationale de mutualité agricole (CNMA) et de la Banque de l'agriculture et du développement rural (BADR), il a indiqué d'emblée que cette mesure touchera quelque 120 000 agriculteurs, donc autant d'exploitations « qui étaient bloquées à cause de petits crédits ». Ces dettes « étaient à l'origine de beaucoup de désagrégeants et de blocages », a relevé le ministre. « Il ne faut pas oublier que beaucoup d'agriculteurs ont subi des pertes à cause de la sécheresse et des inondations », ajoute-t-il. Pour ne pas retomber dans le même problème d'endettement, M. Benaïssa préconise une réorganisation du financement des activités agricoles. « On a appelé à la création d'un crédit mutuel rural. La CNMA doit se réorganiser dans sa branche bancaire dans ce sens. On a demandé à la BADR, qui a lancé le crédit leasing, de respecter les spécificités du monde agricole », a signifié notre interlocuteur. Culture du résultat et de la redevabilité Le ministère ambitionne aussi d'instaurer la culture du résultat et de la redevabilité. Pour ce faire, des contrats de performance ont été signés entre le ministère et l'administration locale et entre cette dernière et les agriculteurs pour améliorer la production agricole. « Il y aura une évaluation trimestrielle et l'argent alloué aux wilayas ne sera débloqué que si elles ont réalisé les performances attendues d'elles. On a identifié les responsabilités de chacun pour avoir une transparence absolue », a affirmé M. Benaïssa à ce propos. Le gaspillage et les détournements de fonds ne resteront pas impunis, prévient-il, rappelant les instructions du premier magistrat du pays qui a appelé la justice, dans son dernier discours, à sévir contre toutes les dérives. Pour ce qui est de la régulation de la production agricole qui fait cruellement défaut, engendrant des perturbations dans certaines filières, M. Benaïssa reconnaît que le système mis en place « n'est pas au niveau qu'il faut », estimant toutefois qu'il est nécessaire de lui « donner plus de temps ». « C'est vrai que dans certaines filières, les dispositifs sont en contradiction. C'est une action de fond qui est en train de se mettre en place. Ce système n'a même pas une année d'existence. Nous ne sommes qu'à la moitié du chemin », a-t-il soutenu. La prochaine phase du Système de régulation des produits agricoles de première nécessité (Syrpalac) concernera les viandes dès le mois d'avril. Il sera étendu à l'oignon avant qu'il ne prenne en charge à nouveau la pomme de terre. « Dans une année, le système de régulation et d'entreposage s'ancrera et deviendra banal », a fait valoir le premier responsable du ministère de l'Agriculture. « On vise le développement durable. Maintenant, nous avons une certaine visibilité. On est actuellement en phase de structuration. Nous cherchons à trouver des solutions à des problèmes qui étaient a priori insolubles. Il faut renouer avec l'espoir », a conclu le ministre.