Yennayer vient à peine de passer que l'Aïd a été fixé à jeudi prochain par les instances supérieures chargées de gérer le temps des Algériens. Mais si les calendriers s'enroulent sur eux-mêmes comme tourne la planète, ils finissent toujours par se télescoper. Un statisticien de Jijel a fait à ce titre cette prédiction capitale : il viendra une année où le jour de l'Aïd tombera le même jour que Yennayer. D'ailleurs avec l'aide d'un logiciel approprié qu'on ne trouve pas à Jijel, on pourrait même en calculer la date avec précision. Partant de là, les plus pessimistes y voient l'occasion d'une nouvelle flambée de violence, les Algériens n'aimant ni les coïncidences ni les carrefours. Au contraire, les plus optimistes y voient là une bonne conjonction de facteurs pour ressouder les liens distendus par l'histoire et l'intolérance. Ces derniers ont d'ailleurs même envisagé le programme de cette journée type : le matin, on égorge le mouton en tamazight, à midi on invite les archs au dialogue, l'après-midi on écoute le dernier album d'Aït Menguellet en ramassant la laine pour les coussins et le soir, dans une ambiance de côtelettes grillées toutes fraîches, à l'issue de la grande prière du maghreb, la crise de Kabylie est désamorcée et la paix retrouvée sur l'ensemble du territoire national. Il y a juste un risque dans cette prédiction : si l'on imagine qu'Ahmed Ouyahia et Ali Gherbi seront toujours là à cette date qui reste encore à déterminer, on peut craindre le pire. La plate-forme d'El Kseur étant scellée et non négociable et Ahmed Ouyahia aussi scellé que peu négociable, on peut envisager que, même à cette date lointaine, personne ne sera en mesure de desceller l'autre. Le statisticien de Jijel est formel à ce sujet : toutes les prédictions mathématiques butent sur un point, le calendrier de la transition et du changement de personnel politique.