Le président du Conseil de la nation reçoit l'ambassadrice de la République de Slovénie en Algérie    Conseil de la nation : Le ministre de la Justice présente le texte de loi relative à la mobilisation générale    Krikou: les textes législatifs nationaux, des acquis qui accompagnent la politique nationale de développement    AP-OSCE: l'Algérie attachée à ses principes indéfectibles en faveur des causes de libération    Plus de 15.700 logements et aides à l'habitat attribués dans sept wilayas du Sud    Nécessité d'accompagner les jeunes et renforcer les programmes de prévention contre les drogues    Crimes coloniaux: l'Algérie soutient toutes les démarches réclamant justice    L'université est devenue un acteur économique et social et un partenaire de développement    Fête de l'indépendance: la journée du samedi chômée et payée    Allocution du président de la République à la Conférence internationale sur le financement du développement    Le 2e festival culturel national de la musique et de la chanson chaouies du 6 au 9 juillet    Agression sioniste contre Ghaza: le bilan s'alourdit à 56.647 martyrs    Le Premier ministre rencontre à Séville le président du gouvernement espagnol    Foot/Ligue 1 Mobilis 2025-2026: ouverture du mercato estival    Appel à adopter des politiques plus souples et réalistes pour l'orientation des aides au développement    Festival international de l'Inchad: authenticité et innovation en clôture de la 11e édition    La FAF annonce de nouvelles mesures    Ballalou préside le lancement des travaux de restauration du «Palais El Menzah» à la Casbah d'Alger    Vers la relance de toutes les unités au service de l'économie nationale    Les 15 solutions pour atténuer l'écart du cours du dinar algérien entre le marché officiel et celui du marché parallèle    Le contrat-type du joueur et de l'entraîneur professionnel est né    Le Bayern et Kane éteignent Flamengo et défieront le PSG    «Nous continuerons à punir Netanyahou jusqu'à ce qu'il soit inapte»    Ooredoo Sponsor de la 20e édition du forum Rakmana    Championnat National de VTT: Victoire de l'athlète Abderrahmane Mansouri    10 martyrs dans un bombardement sioniste visant un centre de distribution d'aide    M. Antonio Guterres transmet ses chaleureuses salutations au président de la République    Projection d'un documentaire sur le parcours de Djouher Amhis Ouksel    Le CNC sacré champion national de water-polo dans quatre catégories    Saâdaoui salue les performances de plusieurs établissements scolaires    Plusieurs clous et des objets métalliques retirés de l'estomac d'un patient    Le Bazane, tenue traditionnelle reflétant l'identité culturelle authentique de la région de Bordj Badji-Mokhtar    Renforcer la sensibilisation au sein des familles    A peine installée, la commission d'enquête à pied d'œuvre    «L'Algérie, forte de ses institutions et de son peuple, ne se laissera pas intimider !»    Le président de la République inaugure la 56e Foire internationale d'Alger    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Cheikh Tayeb El Okbi, l'islahiste – I
Publié dans El Watan le 28 - 09 - 2005

Le président Bouteflika a, le premier, eu l'audace de briser certains tabous en permettant la tenue d'un symposium sur saint Augustin et en réhabilitant de fait Messali Hadj, celui qui a dirigé et encadré le mouvement indépendantiste algérien, jusqu'en 1954. S'agissant de ce dernier, une biographie sérieuse, objective, s'appuyant sur les faits, pesant les éléments positifs et négatifs du personnage et de son action reste à écrire.
L'un des autres grands acteurs des mouvements qui ont préparé l'éveil et la reconnaissance de la pensée algérienne, frappé lui aussi d'ostracisme, est le grand islahiste(1) Tayeb El Okbi.
Le contexte historique
Au cours des années 1920, l'Algérie commençait à s'éveiller de manière progressive aux idées nouvelles d'Islah(2) et de Nahda(3).
Aussi, dès 1920, la ville de Constantine devint un centre d'enseignement et de renaissance culturelle par le biais du cheikh Ben Badis.
Parallèlement, à Biskra, le cheikh El Okbi, de retour du Hidjaz, commençait à donner des cours d'exégèse coranique et à expliquer la nécessité d'une réforme (Islah) en s'appuyant sur les idées du mouvement de Djamel Eddine Al Afghani, Mohamed Abdou et Rachid Rédha. Il est à rappeler que le cheikh El Okbi avait fait un long séjour en Arabie où sa famille s'était établie en 1894. Il y grandit et y reçut toute son éducation. Devenu un remarquable lettré, il fut précepteur du prince Abdallah, rédacteur en chef du journal El Qibla et directeur de l'imprimerie royale. Par le biais de ce journal, il aborda les sujets d'actualité : Islah, Nahda, problème de la Palestine, etc. A la suite de ses écrits et de ses conférences, les Turcs décidèrent de l'éloigner de la péninsule arabique et le placèrent en résidence surveillée. Il a dû son élargissement et sa libération à Chakib Arslan, qu'il connut personnellement et avec lequel il entretiendra des relations assidues même apres son retour en Algerie. A Biskra, il fut entouré par d'autres jeunes lettrés (Lamine Lahmoudi, Laïd El Khalifa, Derradji…) et dès 1925, il prêta son concours à différents journaux (Echo du Sahara, El Moutaqid). Il lancera son propre journal (El Islah) en 1927, qui sera l'objet de multiples tracasseries administratives.
La situation à Alger en 1920
En ce temps à Alger, des commerçants membres de la petite et moyenne bourgeoisie avaient créé, au sein de La Casbah, une école d'enseignement en langue arabe (la Chabiba : 1921). Viendra ensuite «Le Cercle du progrès» en 1927. Un espace réservé aux débats, et destiné aussi à recevoir les personnalités les plus en vue à cette époque.
Alger, la ville de Sidi Abderrahmane, avait quelques grands lettrés remarquables parmi lesquels les grands érudits Mohamed Al Khodja(4) et Abdelhalim Ben Smaïa. Ce dernier avait accueilli à Alger, en 1903, le cheikh Mohamed Abdou. En reconnaissance de son érudition, la France coloniale avait attribué à cheikh Ben Smaïa, que les Algérois appelaient alors «Si Abdelhalim», la légion d'honneur. Par dérision, il accrocha cet insigne à la queue de son cheval !
A la même époque, en décembre 1929, le peintre Dinet, converti à l'Islam, décéda. Son enterrement eut lieu en janvier 1930 à Bou Saâda. Des notables, des lettrés de tous les coins d'Algérie, des hauts fonctionnaires de l'administration coloniale ainsi que le gouverneur Pierre Bordes se rendirent à ses obsèques.
Différents discours ont été prononcés et l'oraison funèbre en langue arabe fut faite par le cheikh El Okbi. L'assistance fut fascinée par la splendeur de son discours qui décrivit la vie du défunt, le contexte algérien et l'ouverture en Islam en faisant référence aux idées nouvelles d'El Islah.
L'administration française (MM. Bordes, Mirante) se rendit compte que El Islah algérien avait son ténor et les membres présents du cercle du progrès proposèrent immédiatement au cheikh d'animer et de diriger le «Cercle du progrès». Ainsi, dès le début de 1930, le cheikh s'installa à Alger, suivi de son groupe de Biskra (Lamine Lamoudi, cheikh El Aïd, cheikh Derradji). Grâce à l'action d'El Okbi, son engagement, sa simplicité, son courage et son extraordinaire don oratoire(5), le «Cercle du progrès» devient le lieu de rencontre de toutes les couches de la société algérienne : lettrés, fellahs, dockers, commerçants…
Si le «Cercle du progrès» devint rapidement un haut lieu de solidarité entre musulmans algériens, de débats, de lancement de nouvelles associations sportives, culturelles, éducatives (scouts) grâce à l'action d'El Okbi et ce, durant 25 ans, il faut aussi souligner le rôle prépondérant de ces petits et moyens commerçants qui ont sacrifié leur temps, leurs finances et leur énergie pour le renouveau de la culture, de la langue et de l'Islam.
L'Association des oulémas
En mai 1931, l'assemblée générale de l'Association des oulémas y tint ses assises et l'association y établit son siège.
En 1933, une autre association caritative «La Kheiria» vit le jour. Implantée au cœur de La Casbah, son rôle consistait à fournir de l'aide aux plus démunis. 500 à 1000 repas par jour, distribution de vêtements, etc.
La doctrine islahiste se répandit très rapidement. Agents du culte officiel, chefs de confrérie exprimèrent leur inquiétude. Les colons et l'administration se devaient de réagir.
Des pressions furent faites sur le président de la «cultuelle musulmane» Si Mahmoud Bensiam pour interdire l'accès des mosquées aux oulémas. Ce dernier refusa de céder et démissionna dignement. Ensuite, c'est la parution de la tristement célèbre «circulaire
Michel» qui vise explicitement les cheikhs Ben Badis et El Okbi et interdit l'accès des mosquées aux oulémas. Un catholique, M. Michel, est placé à la tête de la cultuelle. C'est la consternation. D'importantes manifestations ont eu lieu à Alger en faveur du cheikh El Okbi en février 1933. Ce dernier, depuis son arrivée à Alger, se vit successivement convoqué, harcelé, proposé à un haut poste, proposé de fortes sommes d'argent par l'administration. Il refuse de manière nette et claire, et continue de manière persévérante son action éducative, culturelle et de réveil des consciences.
L'Islah et les autres tendances de l'Islam algérien
Au cours de la décennie 1930-1940, la lutte fut très violente entre islahistes et «maraboutiques».
Dans leur légitime lutte contre le maraboutisme et l'obscurantisme, les oulémas algériens en général et Tayeb
El Okbi en particulier ont eu parfois tendance à «avoir jeté le bébé avec l'eau du bain». En effet, la large offensive islahiste contre le fléau maraboutique a eu parfois tendance à confondre entre une tradition spirituelle authentique, représentée par des maîtres soufis aussi éminents que cheikh Boumediène El Ghoti, Cheikh Thaâlibi, Sidi El Houari et plus récemment le cheikh Ben Aliwa, dont le rayonnement spirituel a dépassé les frontières nord-africaines(6) avec des superstitions et des contrefaçons inévitables dans toute société humaine.
Malgré ces «dégâts collatéraux», le bilan le plus positif de l'action de l'Association des oulémas est concrétisé par la liquidation du maraboutisme et l'éveil des consciences.
L'ouverture vers les «gens du livre»
En 1935, cheikh El Okbi crée avec le professeur Bernier, l'abbé Monchann, le docteur Loufrani et Elie Gozlan «l'Union des croyants monothéistes» qui élit aussi son siège au «Cercle du progrès». Cette union organisa au Nadi des débats sur des sujets d'intérêt commun aux trois religions et appuya les revendications sociales, culturelles et religieuses des membres algériens. Elle bénéficia de l'appui du grand savant orientaliste, le professeur Louis Massignon, qui témoignera au cheikh une amitié indéfectible. Au cours de la Seconde guerre mondiale, Cheikh
El Okbi, se basant sur une logique de droit, exprime nettement au nom de la population musulmane sa désapprobation à la mise en place d'une législation raciste et refuse ainsi au gouverneur général de Pétain, l'amiral Abrial, sa caution à l'application des lois antijuives.
L'action islahiste et le pouvoir colonial
Au cours de l'année 1935, l'administration coloniale fait des pressions sur le père du cheikh Ben Badis pour l'inciter à convaincre son fils de démissionner de l'Association des oulémas. Assurément, cette association gênait de plus en plus le pouvoir colonial et ce, malgré le respect des lois par l'ensemble de ses membres et notamment des déclarations de loyalisme.
En effet, le travail de fond réalisé en très peu de temps, éveil de l'ensemble du peuple algérien, rapprochement de toutes les catégories sociales, ouverture d'écoles, de cercles, enseignement religieux et de la langue arabe, lutte contre le maraboutisme, édition de journaux en langues arabe et française, ce travail suscite de plus en plus d'inquiétude au sein du pouvoir colonial. A cause de son influence sur les masses de son extraordinaire succès dans l'Algérois, qui s'est concrétisé par la baisse de l'alcoolisme et de la consommation de drogue à Alger, assainissement des mœurs, solidarité musulmane, le cheikh El Okbi constitua la cible privilégiée du pouvoir colonial au cours de cette décennie (1930-1940).
A suivre.
1- Réformiste.
2- Réforme.
3- Renaissance.
4- Mohamed Al Khodja (1865-1917) : Grand érudit – Imam mosquée Asafi – Alger. Grand connaisseur et admirateur de l'imam Mohamed Abdou.
5- De nombreux journalistes ou écrivains ont décrit l'extraordinaire don oratoire d'El Okbi, Jacques Berque
l'a qualifié «d'orateur fantastique».
6- Voir Martin Link, Un saint du XXe siècle.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.