Artiste militante par excellence, la défunte Bahia Farah, à la voix enchanteresse, a eu droit cette semaine à un vibrant hommage au niveau de la ville de Bouira (sa ville natale). En effet, un colloque sur la vie et l'œuvre de cette chanteuse kabyle, a été organisé par le comité des activités culturelles et artistiques de la maison de la culture de cette wilaya, sous le patronage de la ministre de la Culture et de celui du wali de Bouira. Cette rencontre qui a duré 3 jours, s'est étalée du 10 au 12 mars courant, et a vu plusieurs personnes, entre artistes, amis et membres de la famille de la chanteuse, apporter, les uns, leurs témoignages, les autres, leurs regards et conclusions de leurs recherches sur la carrière de l'artiste. En appoint, une exposition non-stop a eu lieu dans les couloirs de la maison de la culture durant toute la durée du colloque. Le premier jour a vu M. Bendamèche et le chanteur Kamel Hamadi donner un aperçu sur la vie et l'œuvre de Bahia Farah. La deuxième journée du colloque sera consacrée au « Chant féminin de la guerre de Libération », auquel Bahia Farah apportera sa contribution durant de longues années. Née à Bouira en 1917, Bounouar Fatma Zohra, de son vrai nom, s'initia à la danse dès son très jeune âge. Son père décédé, elle partira en Tunisie avec son oncle qui l'inscrira dans une école de formation artistique. En 1931, elle est à Paris où elle intègre la troupe artistique maghrébine. Elle eut beaucoup de succès dans la chanson, mais elle continuera en parallèle à cultiver le premier art qu'elle a connu et qui l'a fait connaître : la danse. A l'orée de la guerre de Libération nationale, et après la séparation des membres de la troupe artistique maghrébine au lendemain de novembre 1954, Bahia continuera de chanter pour exprimer son engagement révolutionnaire. Dans ce sillage, elle prendra la responsabilité de la troupe artistique du FLN. Elle rencontrera Mohamed Temmam, le peintre miniaturiste qui deviendra son mari et Slimane Azem avec lequel elle chantera en duo. Elle ne put rentrer en Algérie qu'en 1967. Les artistes musiciens Cherif Kheddam et Cheikh Nourredine feront partie de son orchestre. « Bahia Farah eut un malentendu avec la radio dû à la liberté qu'elle prenait avec les sujets et les thèmes de ses chansons », selon Mustapha Sahnoun, musicien de la troupe du FLN et auteur de la musique du chant patriotique A yemma ssber ur ttru, de Farid Ali, dont le fils était présent au colloque. Alors que la télévision ne diffusera pas ses chansons enregistrées à la RTA de l'époque ; elle la quittera pour se consacrer exclusivement aux fêtes familiales et ses admirateurs en créant la troupe El Farah. Un riche parcours ayant été revisité au cours de ce colloque de 3 jours où conférences ont alterné avec témoignages, un spectacle avec de grandes vedettes de la chanson kabyle. Des artistes tels que Taleb Rabah, Akli Yahiatène, Djamel Allam, Anissa, Chabha, El Djida Tamechtuht, Salima, Dalila Brahim… ont été fortement appréciés et applaudis par les citoyens de Bouira venus nombreux. En cet après-midi du 12 mars, Bahia Farah est revenue parmi les siens. Elle était « belle et généreuse et patriote », ont affirmé la majorité des témoins qui ont parlé d'elle. Akli Yahiatène disait bien qu'« elle était l'amie de tout le monde », Mustapha Sahnoun quant à lui, dira que « Bahia n'a pas choisi l'art, c'est l'art qui l'a choisie ».