On est accueilli par de belles maisons restaurées datant de la période coloniale, de petites rues tranquilles, des parcs verdoyants, un établissement hospitalier spécialisé dans la rééducation, un centre régional sportif en ruine où durant de nombreuses années des équipes d'élite nationales et étrangères avaient effectué leur préparation L”architecture recherchée de l'hôtel El Mountazah, hérité de la période coloniale, ajoute un plus à la beauté paradisiaque des lieux. Au pied de cet établissement, l'égyptienne, formée par un long rocher blanc quelque peu noyé par la mer, offre la vision de la reine égyptienne Nefertiti languissante et envoûtante. En 2005, bien que toujours fidèle à ses traditions hospitalières, la population ne vit pas dans la joie été comme hiver. Leur commune n'a pas fini de digérer un naufrage économique et social, aggravé par un budget annuel des plus maigres et par l'absence totale d'investissement. Les élus qui s'y étaient succédé semblent avoir mis de côté toute idée de planification d'un quelconque projet de développement local. Attrayante, Seraïdi donne l'impression de rejeter les investisseurs et la source de revenus fiscaux que leurs projets concrétisés pourraient représenter pour le budget de la municipalité. Dans cette agglomération fief des révolutionnaires, chaque famille compte au moins un martyr tombé au champ d'honneur durant la guerre de libération. Elle fut, les précédentes années, l'artisan du tourisme dans la région. Riche aussi de son potentiel minier, maritime, agricole et forestier, elle était devenue un cimetière où l'on enterre tous les espoirs d'un redressement socio-économique. Le chômage frappe la majorité des habitants. De jour comme de nuit, les rues et les cafés sont bondés par des jeunes et moins jeunes usés par l'oisiveté et l'inactivité. Les quelques rares magasins et gargotes offrent un semblant d'activité. A Seraïdi, les disparités sociales sont criantes. Les riches demeures, en majorité propriétés de nouveaux riches ou pieds à terre pour l'été d'hommes du pouvoir, côtoient de modestes maisonnettes faites de pierre de taille et à la toiture en tuile rouge. Ses habitants, «les djebaïlias», vivent depuis la nuit des temps de maraîchages, d'arbres fruitiers et d'élevage bovin. Région très boisée, cette commune a acquis une réputation grâce à la saveur exquise de ses figues de Brbarie, pomme, poire, cerise, fraise, framboise et figue. Les forêts de chêne-liège ont leur séduction au gré des collines et de la couleur de la grande bleue voisine. Par le bois de chauffe qu'elles offrent, ces forêts, également riches de plantes médicinales, rapprochent ainsi dans le cœur des djebaïlias l'histoire plus que millénaire de leur village. A une trentaine de kilomètres en contrebas, les pieds léchés par la mer, viennent Romanet et Aïn Barbar, deux agglomérations enclavées au pied du majestueux Edough. Elles ont leur légende avec des vestiges qu'on dit être ceux du Palais d'été du bey, rappelant une époque de gloire. Pour Seraïdi, l'arrivée du wali, accompagné des membres de son exécutif, du président de l'APW et pour la première fois depuis les dernières élections législatives de députés et sénateurs, est doublement historique. Pour eux, il s'agit d'une sérieuse volonté des autorités de relancer le développement local figé depuis des années. Seraïdi figure en tête des communes où des projets sont appelés à être réalisés. Notamment les deux zones d'extension touristique appelées à jouer le rôle de porte ouverte au tourisme, la remise en activité de la mine unique en Afrique et pratiquement inépuisable de feldspath. Ce matériau très demandé pour la confection de la porcelaine était exporté vers le Japon au lendemain de l'indépendance. Cuivre et or sont d'autres gisements dans le ventre de l'Edough encore inexploités ou sous-exploités. Pêche, aquaculture et tourisme Contraints et forcés par les groupes de terroristes à quitter leur foyer depuis 2002, les habitants de Aïn Barbar s'apprêtent à y revenir avant la fin de ce mois de janvier 2006. Avec la reconstruction des habitations, la réalisation d'autres, la réfection des routes, le raccordement au réseau électricité, de téléphone et éventuellement de gaz de ville, ces habitants rêvent déjà de faire de leur petit port un tremplin pour le développement des activités de la pêche et de l'aquaculture. Ils parlent même d'une petite industrie de la pêche, de l'aquaculture et du tourisme. C'est pourquoi, tout autant que ceux du chef-lieu de commune, ils estiment que la toute récente réunion du conseil exécutif tenue à Seraïdi même est un grand événement. C'est en effet pour la première fois depuis l'indépendance que les uns et les autres ont été mis au contact direct du plus haut représentant de l'Etat dans la wilaya. Lors de cette réunion, le wali, louvoyant entre des questions assez plates des élus et des représentants de la société civile, a renouvelé des affirmations d'une démarche qui se veut prometteuse d'une vie meilleure. Il a fait passer quelques messages stratégiques qui lui ont permis d'exprimer des engagements et de démontrer qu'il n'a pas été saisi dans le tournis des bouquets de difficultés quotidiennes que ses hôtes ont exprimées. En prime et comme récompense, il s'est engagé à augmenter le budget annuel de la commune et à prendre sérieusement en charge l'ensemble des aspects de ce quotidien dans le domaine social (réalisation des logements sociaux, des routes et adduction en eau potable), économique (lancement des travaux des deux zones d'extension touristique, d'un petit port de pêche à Aïn Barbar), culturel (extension de la maison de la culture) et sportif (réfection du centre régional d'éducation physique et création d'un club sportif). S'adressant à ses proches collaborateurs, le wali dira : «Chacun de vous me rendra compte quotidiennement de l'état d'avancement des projets en question. Chacun assumera ses responsabilités en cas de retard.» Tous ces engagements et décisions entreront dans leur phase active dès le début de janvier pour s'achever, en ce qui concerne ceux prioritaires, le 31 du même mois. Dans ces priorités figurent le retour des habitants de Aïn Barbar et Romanet, qui, depuis des années, vivaient dans des conditions d'habitation et de vie exécrables. Il était temps, car, enfermés dans leurs hésitations et dans leur rôle de baragouineurs face au quotidien de leurs administrés, les élus paraissaient vivre loin de la réalité quotidienne de leurs administrés. Au plan économique, outre le tourisme, la relance de l'exploitation des gisements de feldspath, unique en Afrique ressemble à une véritable bouffée d'oxygène. Avant son abandon à la suite de sa destruction par les terroristes, l'unité d'exploitation représentait la seule ressource de vie de quelque 300 travailleurs tous natifs de la commune. La mise en valeur des terres agricoles à Bouzizi, autre importante agglomération, et la relance des activités pastorales dans le cadre du plan de développement rural, l'aménagement, le renforcement des capacités de transport public et scolaire et mise en place de nouveaux programme d'électrification rurale pourraient servir au changement de décor de la commune de Seraïdi. Toutes ces opérations pourraient avoir un impact mitigé si le problème de la réfection du téléphérique reliant la commune chef-lieu de wilaya à Seraïdi n'était pas pris en charge. «C'est l'un des dossiers prioritaires que nous avons pris en charge. Le contentieux existant entre la commune de Annaba propriétaire et le concessionnaire privé est en voie d'être résolu. Pour la réfection de ce moyen de transport incontournable afin de mettre un terme à l'isolement de la commune de Seraïdi et permettre aux habitants, dont les écoliers de se déplacer dans des conditions idoines, le ministère du Transport a mis à la disposition de la wilaya une importante enveloppe financière pour sa remise en service dans les plus courts délais», a précisé le directeur de l'exécutif. «Après plusieurs années d'enclavement et d'isolement, notre commune a recouvré la sécurité grâce aux efforts de l'armée et des services de sécurité. Il est grand temps que les autorités locales bougent pour mettre un terme au laisser-aller de nos élus indifférents aux difficultés des habitants», a déclaré sur un ton de colère difficilement contenu un professeur d'éducation physique. Dans son appel aux autorités locales, M. Benabdelkrim, un sexagénaire natif et habitant de Aïn Barbar, a lancé : «Notre situation et nos conditions de vie étaient nettement mieux durant la période coloniale. Notre commune n'a toujours pas goûté aux fruits de l'indépendance. Nous sommes les éternels oubliés des politiques. Nos enfants en paient les frais. La situation a atteint un point de non retour. Jusqu'à aujourd'hui, nos enfants étudient dans des chambres froides en guise de classes. Avec son potentiel forestier des plus importants du pays, ses gisements d'or, de cuivre, de feldspath, d'étain, d'argile, notre commune est l'une des plus riches du pays. Malheureusement à ce jour, elles sont inexploitées mais jusqu'à quand ?» De tout temps oubliés dans les grands projets socio-économiques, les habitants de la commune de Seraïdi vont-ils voir enfin le bout du tunnel en 2006 ? Théoriquement, elle devrait bénéficier d'un important programme de relance. Théoriquement seulement, car entre la parole et les actes, les autorités locales s'étaient beaucoup plus spécialisées dans les déclarations d'intention et dans le retard dans la concrétisation des projets. Ceux portant sur la réalisation à partir du début de l'année 2004 de 220 logements entre sociaux et ruraux non concrétisés à ce jour en sont un exemple. Pourtant, de 2001 à 2005, cette commune a bénéficié d'un budget d'équipement de 310 millions de dinars dont il reste 97 millions. Seul le secteur de l'hydraulique semble tirer son épingle du jeu avec une réalisation en alimentation en eau potable de la population estimée à 75%. Le dossier du foncier industriel et agricole ainsi que la non-régularisation des attributaires de terrains à bâtir occupent une large place dans les handicaps dénoncés. Ils sont à l'origine du gel de plusieurs projets d'investissement. L'autre aspect qualifié de prioritaire concerne la lutte contre le chômage. A ce titre, outre l'industrie minière, le secteur de la pêche représente un débouché certain pour les milliers de jeunes désespérés de cette commune. Grâce au projet FIDA avec une mise à disposition de 34 embarcations de pêche, 100 ont vu leur calvaire prendre fin, alors que 50 autres sont en stage. La concrétisation du projet de réalisation d'un quai de 760 m pour le renforcement des capacités d'accostage à Aïn Barbar est un autre rayon de soleil avec ce qu'il génère comme possibilités de création d'emplois. Et si le dispositif préemploi est à l'origine de la création de 40 postes entre 2004 et 2005, celui Anjem reste en deçà des attentes. Sur les 320 dossiers qui lui ont été soumis, elle n'en a étudié que 24. Des responsables de différents secteurs comme l'hydraulique et l'environnement se disent prêts à créer 186 emplois permanents. «Nous sommes disposés à financer des projets. Malheureusement, aucune proposition ne nous est parvenue des responsables de la commune que nous avons pourtant saisis», a affirmé la directrice de la DAS de 914 familles démunies. Cette direction est à l'origine de l'insertion de 260 chômeurs dans le cadre du filet social.