Une halte oranaise loin des foules, sans discours ni meeting. Le président-candidat a choisi les planches peu hostiles du TRO loin des sentiers d'El Bahia. Pas le moindre discours de campagne ne sera prononcé à Oran par le candidat Bouteflika. Vers la fin de sa visite, en fin d'après-midi, à la sollicitation du public invité au Théâtre régional d'Oran où il devait se rendre : « un mot monsieur le président, un mot monsieur le président ! », il répondra simplement : « vous avez tout dit ». Annoncé à Oran vers midi, il ne devait arriver que près de 2 heures et demie plus tard. Entre-temps, parfois venus par bus entiers, les gens commençaient à s'amasser derrière les barrières dressées la veille, clôturant entièrement un itinéraire devant aller du siège de la mouhafada FLN en empruntant une petite partie du boulevard Emir Abdelkader vers la place du 1er Novembre, entièrement bouclée également. C'était pour les besoins du bain de foule et parmi toutes les banderoles portant les slogans de soutien, celles des clubs de football, notamment du MCO, ont été bien mises en évidence. D'ailleurs, à l'entrée du théâtre, il sera reçu par les deux présidents des deux plus grands clubs d'Oran. « Il n'a absolument rien dit. Il nous a écoutés et c'est plutôt nous qui avons parlé pour lui dire que la jeunesse est avec lui », indique M. Moro, président de l'ASMO. Même témoignage de Lakhdar Belloumi qui a fait partie du comité d'accueil et dont la présence, même si ce n'est pas la première fois et toujours au nom de l'association la Radieuse, a été mise en avant pour signifier le soutien du monde du sport. Mais le thème de campagne choisi pour Oran est l'artiste, un choix établi pour coïncider avec la veille de la célébration de la Journée mondiale du théâtre. Plusieurs grandes figures ont été invitées à l'occasion, à commencer par Cheikh Ghaffour et Blaoui El Houari. Il y avait également, hormis la célèbre comédienne Fadéla Hachmaoui, « El Hadja » Zahouania sous une robe en forme de sari qui lui couvre la tête. C'est le poète Mekki Nouna qui a ouvert le bal avec, comme à son habitude, depuis des dizaines d'années, la déclamation de quelques rimes pour vanter les vertus de celui à qui on a souhaité non pas seulement un troisième mais un quatrième mandat. La seule différence, c'est que ce n'est pas dit dans une langue de bois, même si le résultat est le même. « Fais ce que tu veux, nous t'aimerons quand même », devait-il déclarer avec enthousiasme. La prestation de ce célèbre parolier a dû plaire au président au point de se lever de son siège, aller vers le devant de la scène et tendre sa main munie d'une fleur. Ne l'ayant pas vu, c'est le chef d'orchestre Bekaï qui la récupérera. C'était juste avant d'annoncer l'entrée sur scène de la chanteuse Souad Bouali qu'il a qualifiée en ces termes : « lboulboul li teglaâ el houl / li yesmaâ lghania taâha iouali maztoul ». Ce dernier mot a fait voler en éclats le climat tendu qui prévalait jusque-là dans la salle. Souad Bouali interprétera une vieille chanson : Hobbi El Akbar de Maâchi. Le spectacle proposé à Bouteflika comprend également un des tubes de Houari Benchenet mais aussi une chanson de Mhamed El Anka (Mabkach stiîmar fi bladna), peut-être la seule qu'il a composée pour la télévision algérienne et où il utilisera ses talents de compositeur pour adapter son style à un texte patriotique, au lendemain de l'indépendance du pays. L'après-midi artistique s'achève avec la prestation d'un couple de danseurs dont le « cavalier » a été gratifié d'un prix international à Lyon. Pour ce dernier, « les Algériens du monde entier ont encore besoin de Bouteflika ». Embrassades, échanges de bouquets de fleurs et photos-souvenirs sur scène avec le candidat sera la dernière image de cette halte oranaise sans promesses.