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Réforme de la Santé
Publié dans El Watan le 09 - 10 - 2006

La tarification est le fondement même de la comptabilité hospitalière : elle a pour but la connaissance des coûts des activités exercées en vue de déterminer la valeur des prestations dont bénéficient les usagers des services hospitaliers aussi bien privés que publics.
Le financement de la santé et le mode de paiement
L' arrêté interministériel concernant la Nomenclature Générale des Actes Médicaux a été signé au cours de cet été par Messieurs Le Ministre de la Santé et Le Ministre des Affaires Sociales, aboutissement du travail de plusieurs mois de la commission nationale de la nomenclature placée sous la présidence de Monsieur Le Ministre de la Santé. Elle sera suivie bientôt par la commission de la tarification, placée sous la présidence de Monsieur le Ministre des Affaires Sociales et dont la fin des travaux devrait aboutir en Mars 2007.
Cette mesure très importante annoncée par les médias n'a soulevé ni commentaires ni débats alors qu' elle était tant attendue par les professionnels de la santé
Nous voudrions rappeler cet événement, livrer ici quelques réflexions et mettre en évidence ce que peuvent être les fondements d' une politique de régulation du système de santé Algérien, partant du concept de la Nomenclature et de la Tarification Hospitalière et du constat que notre pays dépense beaucoup plus que certains pays de la région pour un niveau de qualité de soins équivalent, voire inférieur.
La compétitivité des établissements de soins ainsi que leur marge de manoeuvre sont largement dépassées depuis de nombreuses années au point de mettre en péril le fonctionnement normal de nombreuses unités de soins. La sécurité des patients et les tensions sociales résultant de la gestion de la pénurie ont conduit le système hospitalier au bord de la rupture et de l' épuisement.
Les réformes engagées actuellement semblent entrer dans une phase décisive et auront pour finalité l' établissement d' une relation directe entre les établissements hospitaliers et leur financeur c'est-à-dire l' Assurance Maladie, la Solidarité Nationale, les Ménages, sur la base de la contractualisation et du conventionnement.
La nomenclature
La nomenclature générale des actes professionnels constitue un catalogue de tous les actes médicaux. C' est une liste d' actes codés destinée à décrire chaque acte technique.
Elle doit être cohérente, exhaustive et évolutive et permettre à la fois une description fine de l' activité médicale et des analyses synthétiques.
La méthodologie utilisée doit être rigoureuse pour la détermination des libellés des actes. Les travaux reconnus en la matière sont les travaux Européens du CEN (Comité Européen de Normalisation – Projet Galen) où les experts ont réalisé une analyse sémantique du libellé et utilisé un vocabulaire contrôlé pour la valorisation des actes. De façon générale quatre axes sont instanciés pour chaque acte décrit : l' action , la topographie, la technique et la voie d' abord.
Les gestes sont décrits de façon globale. Des modificateurs sont utilisés comme la notion d' urgence ou le terrain susceptible d' alourdir le geste (obésité, diabète…).
Les codes sont généralement alphanumériques à 7 caractères, 4 lettres et 3 chiffres: les deux premières lettres désignent la topographie, la troisième lettre l' action et la quatrième la voie d' abord ou la technique.
Ce codage a permis pour la première fois de quantifier l' activité médicale et de constituer un premier pas dans le cadre d' une démarche visant à analyser les pratiques et la qualité des soins.
La Nomenclature Algérienne serait à présent techniquement prête et regrouperait pas moins de 9000 actes comme annoncé dans la presse. C' est un enjeu majeur et un prérequis nécessaire pour l' évaluation de la qualité des soins et l' optimisation des dépenses de santé.
Sa mise en place représentera un bouleversement dans notre pratique médicale et ne se fera pas facilement. Ce n' est toutefois que la première étape dans le cadre d' une démarche visant à analyser les pratiques et la qualité des soins.
Le concept de la tarification hospitalière
D' une manière générale, la tarification va consister à fixer les prix des différentes consultations, des actes médicaux et d' environnement ainsi que le montant des prestations hôtelières c' est à dire le prix de journée.
Cependant, pour pouvoir tarifer les prestations hospitalières, il va de soi qu' il faut tout au moins connaître leurs prix de revient.
L' étape suivante est donc la validation et la consolidation des libellés et une échelle de valorisation doit être déterminée en fonction :
– du travail du médecin, incluant non seulement le temps mais aussi le stress et la complexité technique
– du coût pratique, ou de ce qui pourrait en être connu d' après les comptabilités analytiques des établissements ou des études spécifiques.
Tarification par pathologie
La tarification par pathologie est issue des travaux du Professeur Fetter (1980). La tarification par pathologie consiste à fixer un prix par groupe de malades. Tarifer à la pathologie consiste à verser un paiement équivalent à la moyenne des coûts observés. Un établissement de soins ne fixe pas un prix, il va recevoir le tarif calculé pour chaque cas. Ce procédé stimule la concurrence, les établissements de soins cherchant à produire à un coût inférieur ou égal à la tarification.
La mise en oeuvre de la tarification par pathologie a apporté des résultats positifs en France (T2AA) et aux Etats Unis (Programme Medicare) où on a observé une baisse effective des durées de séjour et une diminution du rythme d' accroissement des dépenses.
Cependant la tarification par pathologie peut aller à l' encontre de la qualité des soins et constituer un frein à l' innovation. Il convient donc de trouver les moyens de le limiter : audits de qualité, accréditation des structures, habilitation des hommes, formation médicale continue…
Comment modéliser le coût d' un acte ou d' une journée d' hospitalisation et reconstituer un tarif cible de prise en charge qui englobe la totalité des soins et des intervenants ?
Les outils minimum nécessaires à réunir sont :
– La liste des spécialités remboursables pour les médicaments.
– La liste des produits et prestations pour les dispositifs médicaux.
– Les instruments comptables :
Le plan comptable national. La comptabilité analytique : elle devrait être disponible au moins dans les CHU, Les enquêtes et sondages auprès des professionnel de la santé,
Les enquêtes statistiques auprès des ménages ,
Les comptes de l' assurance maladie,
Les déclarations fiscales des professionnels de la santé,
Les budgets prévisionnels des hôpitaux,
Les comptes nationaux de la santé :c'est un outil universel pour résumer, décrire et analyser le financement de systèmes nationaux de santé.
Les avis des spécialistes en économie de la santé :
Les spécialistes en économie de la santé sont peu nombreux dans notre pays et leurs travaux restent souvent académiques.
De quoi peut – on disposer ?
Il est évident qu' il est impossible d' espérer réunir toutes les données énumérées ci-dessus dans l' environnement de gestion actuel de notre système de santé.
Les études des économistes de la santé restent très parcellaires et ne sont pas toujours accessibles.
Les comptes nationaux de la santé ne sont pas encore adoptés et la comptabilité analytique fait défaut dans les hôpitaux.
Par ailleurs on ne dispose ni d' enquêtes sur la consommation des ménages en services de santé ni de sondages sur les besoins de santé.
Quant aux informations fiscales, elles ne sont pas fiables.
Comment faire alors ?
Il restera à ceux qui s' intéressent aux coûts de la santé et à la tarification à avoir une approche pragmatique de ce problème. Il leur faudra donc effectuer une analyse d' abord empirique, puis théorique et enfin pratique pour arriver à modéliser le coût médical d' un acte ou d' un prix de journée et à reconstituer un tarif.
A très court terme, il faudra très rapidement adopter les modèles universels d' étude de coûts et en particulier commencer à introduire les comptes nationaux de la santé, ce sera alors l'affaire de spécialistes en économie de la santé.
Les relations bien codifiées et simplifiées entre les régulateurs, les patients et les producteurs de soins, l ‘engagement dans une politique de remboursement des coûts, même expérimentale, modérée et très progressive en fonction des moyens des financeurs, va rapidement accroître la qualité et la quantité des soins tout en réduisant leur coût à moyen terme sans l' intervention budgétaire de l' état.
Une totale transparence des analyses faites par les pouvoirs publics et l' Assurance Maladie est donc souhaitable. Le message devra passer en douceur et non dans la contrainte et s' accompagner d' efforts de formation et d' information importants.
L'auteur est Spécialiste O.R.L. – Oran,
Président de l' Association
des Cliniques de l' Ouest.


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