A 19h, place au spectacle et à la musique avec une première partie du programme qui débute avec une touchia revue à la guitare sèche et électrique très appréciée par l'assistance. La troupe enchaîne alors sur une fusion originale gnawi-rock, pour terminer sur zaouïa et laisser ainsi place à Diwan Dzaïr. Le groupe qui entame ses dix années d'existence était plus connu, faut-il le rappeler, pour ses penchants pour le jazz et le blues que pour le gnawi. L'entrée en scène des musiciens a agréablement surpris l'assistance puisque l'ensemble de la troupe fit son apparition à partir des coulisses avant de se mêler à la foule et traverser la salle avec tambours, karkabous et jambé à la main. Ben Aïssa le chanteur et charismatique leader de la troupe, se met au goumbri dont les sonorités graves et résonnantes apaisent la salle grâce à cette entrée rythmée et bruyante. Le groupe opte pour le côté traditionnel et mystique du gnawi. Ainsi, en plus des instruments conventionnels du style, le groupe n'ajoute qu'une basse et une batterie afin d'obtenir des sons et des rythmes de jazzy ou de reggae tout en gardant le timbre sonore et original du gnawi. Les premiers morceaux interprétés sont des improvisations instrumentales avant que Ben Aïssa n'entame Lalla Mira puis Baba Hammouda chansons du Diwan reprises à la mémoire de ces deux saints du sud du pays. Ensuite s'ensuivront deux autres interprétations enfiévrées qui plongent l'auditoire dans la mysticité et font vibrer les corps aux sons des percussions karkabou avec un jeu de scène inspiré des hadrate et derdbate. La troupe se retire pour une courte pause. Dans le hall, l'ambiance est détendue, la soirée se déroule sans encombre et cela grâce à l'irréprochable organisation dont s'est occupé un petit groupe de jeunes. De retour sur scène, le groupe entame la seconde partie de la soirée avec du reggae, africa, un style qu'il maîtrise tout aussi bien que le jazz et le blues. Diwan Dzaïr revient ensuite au gnawi au moment où Ben Aïssa cède son goumbri au plus jeune membre du groupe, Mohamed Khaled, 16 ans, qui remplace le maître puis l'assiste au tambour le temps d'une chanson, avant de reprendre sa place et faire danser un public qui ne s'en lasse pas jusqu'à l'ovation de 22h qui annonce la fin du spectacle. Le but de cette formation musical qui passe allégrement d'un genre à un autre, est «de retravailler ces styles (jazz, blues, reggae et gnawi) afin d'arriver à les harmoniser, sans pour autant laisser tomber le gnawi traditionnel.» Afin de sauvegarder ce genre de diwan tagnawit, le groupe est assisté par son agent Karima Bougherara, qui a toujours travailler dans ce sens, et qui a déjà pris sous son aile bon nombre de groupes musicaux tel que El ferda, Esser, Zeffanet et Kheira Bellekhal. Pour le manager, le projet le plus urgent du groupe demeure l'enregistrement de tout ce patrimoine musical afin de transcrire l'héritage riche en chansons tant au niveau instrumental qu'à celui des textes tirées des sept bradjs. Ces derniers racontent en chanson d'une façon admirable l'histoire des premiers gnawis, leur voyage, l'esclavage, la souffrance mais aussi leur sagesse. Un trésor tant culturel qu'historique qu'il s'agit de perpétuer à travers les générations.