Maâlem Ben Aissa , l'un des porte- étendards du Gnawa, (le long office de danse et de musique, de sacrifice et de guérison par l'extase), est décédé vendredi dernier à l'hôpital. Chanteur et leader charismatique du groupe de Gnawa Diwan Dzaïr, le défunt excellait dans le gumbri, un instrument incontournable avec ce style musical résolument mystique.Maâlem Ben Aissa a grandi au sein de ce groupe qui pratique le rituel du Gnawa, une musqiue née de la déportation d'esclaves du Grand Soudan vers le Tell qui a conduit à une fusion entre les croyances animistes noires et l'islam.Quelques " Bradjs " du diwan algérois exécutés dans la pure tradition gnaoui sont compilés dans un enregistrement daté de 2003 réalisé par le défunt avec entre autres Ben Aissa Bahaz, au gumbri et chant, Abdallah Ben mhidi et au chant (koyobango), karkabous, choeursetc…. On y retrouve d'ailleurs la " nouba ", jouée avec les " tbels " et les " karkabous " en guise d'introduction à la cérémonie, Baba Hamouda le bel amoureux, Jammangaro, Bouri, Dawi… autant de titres aux accents liturgiques qui tirent leur origine d'une époque où le Maghreb était encore esclavagiste. Maâlem Ben Aissa à travers cette interprétation traditionnelle, redonne toute sa dimension à l'histoire de la musique des populations noires d'Alger.C'est son défunt père Maâlem El Hadj d'Alger qui l'avait très tôt initié au sein de la communauté, au gumbri. Lui qui appartenait à une famille de musiciens comme c'était le cas de Bali, voue un respect ferme pour les ancêtres. Tout comme la mère de Bali, la grand-mère de Maâlem jouait du gumbri, sa tante paternelle du karkabou et du tambour. C'est le réputé Alla de Béchar qui lui fera découvrir l'autre galaxie qu'il a lui-même inventée, celle du foundou, puis c'est avec le groupe T34 que Ben Aïssa découvrit l'univers du rock'n'roll algérien accompagné par Khaled Louma qui fut probablement, l'un des premiers à avoir introduit le gumbri dans ce genre musical.Le groupe qui a bouclé ses dix années d'existence était plus connu, faut-il le rappeler, pour ses penchants pour le jazz et le blues que pour le gnawi. Maâlem Ben Aïssa aimait improviser sur son gumbri. Avec le décès d'un sincère troubadour, la musique gnaouie se trouve orpheline.