Bien souvent, des situations ressurgissent avec toutes leurs difficultés alors qu'on les croyait simplifiées et maîtrisées. C'est le cas de la question du Sahara-Occidental qui n'a jamais quitté l'agenda des Nations unies dans le cadre de la quatrième commission appelée aussi commission décolonisation et le Conseil de sécurité depuis l'adoption de la résolution 690, plus connue comme le plan de paix de l'ONU. Et la dernière résolution de l'instance onusienne est d'une incroyable clarté pour rappeler avec pertinence que cette question relève de la décolonisation et son règlement passe nécessairement par le strict respect du droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. C'est au demeurant ce que viennent de réaffirmer à l'intention du président George W. Bush des congressmen américains qui ont saisi l'occasion de la visite, la semaine dernière, aux Etats-Unis du souverain marocain. La pertinence de ce message rappelle à quel point l'occupation marocaine n'a jamais pu bénéficier d'appuis décisifs ou en tout cas suffisamment puissants pour que soit acceptée la politique du fait accompli. En témoigne cette analyse d'un journal marocain à l'occasion de cette visite. Ainsi écrit-il, « bien évidemment, la question du Sahara demeure la priorité numéro un de la diplomatie marocaine. Les Etats-Unis étant la superpuissance mondiale incontestable, il est tout à fait logique que Rabat aille chercher leur soutien pour l'application d'une solution juste et durable qui préserve la souveraineté marocaine sur ses provinces du Sud. Pour cela, le Maroc veut absolument faire admettre aux Etats-Unis que l'affaire du Sahara n'est en rien une question de décolonisation, mais bel et bien un conflit psychologico-politique entre le Maroc et l'Algérie. Si lors de la visite royale aux Etats-Unis, le président Bush atteste de cette réalité, le Maroc aura parcouru une distance énorme vers la solution de ce conflit on ne peut plus artificiel. » Ce qui veut dire que Washington ne suit pas le Maroc sur cette question et le détail du vote aux Nations unies en est révélateur. L'on dit souvent que les Etats-Unis, soucieux de légalisme, contestent au Maroc le droit de renier ses propres engagements, et tout compte fait, George Bush n'a pas été au-delà du rappel de certaines positions de principe, comme le soutien au plan de paix de l'ONU. Et l'on voit mal comment une telle question peut évoluer autrement quand l'ONU a voulu envisager des solutions qui s'éloignent du principe de l'autodétermination comme la fameuse troisième voie ou encore la solution politique, avec à chaque fois en toile de fond l'échec des tentatives marocaines de ramener ce conflit à une crise avec l'Algérie. L'ONU, quant à elle, a clairement identifié le Maroc et le Front Polisario comme étant les parties en conflit. A partir de là, tout le reste n'est qu'appréciations partiales, donc infondées. C'est de ce principe que se prévaut l'Algérie, surtout à l'égard d'attitudes visant à l'éloigner de sa position. Des pays comme l'Espagne, qui n'a pas perdu son statut de puissance administrante du Sahara-Occidental, l'ONU n'ayant jamais reconnu les fameux accords de Madrid de 1975, et la France qui s'est toujours alignée sur la position du Maroc, n'excluent pas un processus auquel Alger refuse de souscrire. C'est ce qui a été dit au partenaire français, ainsi qu'au ministre espagnol des Affaires étrangères Miguel Angel Moratinos quand il avait suggéré ce recours à l'occasion de la visite qu'il avait effectuée à Alger en mai dernier. Le dossier, dit-on sans cesse à Alger, est entre les mains de l'ONU, et le Maroc ne peut plus continuer à tromper l'opinion internationale. Le soustraire à l'organisation internationale conduirait à un refus de justice, à travers la négation du droit du peuple sahraoui à l'autodétermination, et à entériner un fait accompli colonial. C'est justement ce que la communauté internationale défend et l'élément fondamental de la démarche des ONG (organisations non gouvernementales) et des personnalités américaines qui viennent d'interpeller l'Administration du président Bush de la même manière qu'elles l'avaient fait avec son prédécesseur, au point de faire adopter par le Congrès des Etats-Unis une résolution soutenant le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination et le plan de paix de l'ONU. L'on voit mal alors comment ce qui n'a pu se concrétiser en près de trente années peut l'être aujourd'hui. Il ne suffit pas de le vouloir. Le Maroc s'en rend compte avec une certaine amertume.