Les transitions vers la démocratie, qu'elles soient évolutionnaires ou révolutionnaires, requièrent d'abord la rupture de l'ordre autoritaire et, en particulier, du complexe militaro-industrialo-bureaucratique qui bénéficie le plus de cet ordre. L'essentiel du pouvoir reste concentré dans les mains d'un noyau relativement restreint d'élites non représentatives qui exploitent les ressources du pays et sa rente pour s'assurer une prédominance permanente sur la société civile. Dans de tels exemples, l'existence de partis multiples, de candidats multiples et d'élections régulières servent davantage à soutenir plutôt qu'à ébranler l'ordre autoritaire. L'histoire récente dans le Monde arabe a montré l'impuissance relative des acteurs traditionnels de la société civile trop souvent infiltrés, cooptés ou sapés par l'Etat. Les associations dominantes tournant autour des organisations professionnelles, mouvements de femmes, syndicats des travailleurs, par exemple, ont été facilement manipulées à travers la combinaison coercition-mécénat, qui a limité leur efficacité en tant que véritables représentants des intérêts de la société. De nouvelles formes de contestation publique, cependant, apparaissent parmi les jeunes et d'autres utilisant Internet, Facebook, les téléphones mobiles, et d'autres formes de communication non traditionnelles, pour faire avancer plus vigoureusement les idées politiques qui échappent à la surveillance de l'Etat. Même lors d'événements sportifs comme les matchs de football, ces jeunes mettent en mots toute une gamme de vues dissidentes camouflées comme de l'enthousiasme de supporter pour exprimer leur profond mécontentement face à l'ordre autoritaire existant.