Le Premier ministre thaïlandais, Abhisit Vejajjiva, a menacé, hier dans une nouvelle allocution télévisée, d'utiliser la force si les manifestants antigouvernementaux ne cessent pas de provoquer des troubles dans les rues de Bangkok. « Je veux dire aux manifestants que vous n'avez pas le droit de violer la loi ou de restreindre les droits des autres. Autrement le gouvernement ira plus loin dans le cadre de l'état d'urgence », a-t-il déclaré. L'état d'urgence a été décrété, hier à Bangkok et sa région, et l'armée s'est déployée dans les rues de la capitale après une série de graves incidents causés ces derniers jours par des opposants au Premier ministre. De nouvelles violences ont fait au moins six blessés hier à Bangkok, après l'arrestation d'un leader des manifestants. Les protestations se répandaient dans l'après-midi dans Bangkok, où les opposants ont érigé des barricades à l'aide d'autobus et se sont emparés d'au moins un char de l'armée. La veille, des milliers de manifestants avaient notamment forcé l'annulation d'un sommet asiatique en prenant d'assaut l'hôtel où il se déroulait dans la station balnéaire de Pattaya, obligeant les dirigeants à fuir par hélicoptère depuis les toits. La tension est encore montée d'un cran avec l'arrestation du leader des manifestants de Pattaya, l'ancien chanteur de pop Arisman Pongreungrong. Sitôt la nouvelle connue, des milliers de ses sympathisants furieux ont déferlé dans les rues de Bangkok pour réclamer sa libération, menaçant de provoquer des violences si M. Arisman n'était pas relâché immédiatement. Peu après la proclamation de l'état d'urgence, des milliers de « Chemises rouges » surnom des partisans de l'ex-chef de gouvernement en exil Thaksin Shinawatra se sont rassemblés autour du ministère de l'Intérieur. Dans le même temps, des soldats armés ont commencé à se déployer dans l'après-midi dans Bangkok, officiellement pour protéger les bâtiments publics. C'est la troisième fois en moins de huit mois que les autorités thaïlandaises imposent l'état d'urgence dans la région de Bangkok, en raison de troubles à répétition liés à l'interminable crise politique qui agite le pays.Thaksin Shinawatra, 59 ans, ancien homme fort de la Thaïlande renversé par des généraux royalistes en 2006, s'est enfui à l'étranger pour échapper à une condamnation et à diverses enquêtes anticorruption dans son pays. Homme d'affaires controversé, il reste toutefois populaire, en particulier dans les régions rurales du nord. Abhisit Vejjajiva, 44 ans, est devenu Premier ministre le 15 décembre à la faveur d'un renversement d'alliance parlementaire, consécutif à d'imposantes manifestations royalistes qui avaient entraîné l'occupation, pendant huit jours, des deux aéroports de Bangkok. Les « Chemises rouges » accusent M. Abhisit d'être une « marionnette » de l'armée et de certains conseillers du roi. Leur mouvement campe depuis le 26 mars autour du siège du gouvernement à Bangkok.