Les chefs d'Etat nord et sud-américains viennent de se livrer à un incroyable exercice, celui de la réconciliation, le premier appelant ses partenaires de l'hémisphère sud à tourner la page du passé. Après les chaleureuses poignées de mains échangées, par Barack Obama avec notamment le vénézuélien Chavez, une suite a été annoncée. Il s'agit là du strict minimum, puisque cela consiste au retour à leur poste respectif des différents ambassadeurs. La mise à plat attendra donc. Effectivement, le gouvernement américain « va maintenant œuvrer » au retour de son ambassadeur à Caracas et à celui de son homologue vénézuélien à Washington, a annoncé, samedi soir, le département d'Etat dans un communiqué. Le porte-parole du département, Robert Wood, précise dans le texte que le président vénézuélien, Hugo Chavez, avait approché, samedi matin, la secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, lors du Sommet des Amériques à Port-of-Spain. M. Chavez et Mme Clinton ont discuté du retour de leurs ambassadeurs dans leurs postes respectifs, à Caracas et Washington, ajoute-t-il. « C'est un développement positif qui aidera à faire avancer les intérêts américains et le département d'Etat va maintenant œuvrer dans ce but », conclut M. Wood. Washington et Caracas n'ont plus de représentants respectifs depuis septembre 2008, quand M. Chavez avait décidé d'expulser l'ambassadeur américain. Le président vénézuélien avait alors dénoncé une tentative présumée de coup d'Etat à son encontre, précisant que le pays était victime d'un « nouvel assaut impérialiste », en référence aux Etats-Unis. En représailles, Washington avait expulsé l'ambassadeur du Venezuela aux Etats-Unis. Désormais, dira-t-on, cela fait partie du passé, ce même passé que le président américain avait décortiqué pour se livrer à une critique en règle de la politique sud-américaine de son pays, tout en annonçant son intention de tourner la page. Plusieurs chefs d'Etat n'ont pas caché leur satisfaction après cette prestation, se disant même impressionnés à l'issue d'une rencontre entre M. Obama et douze dirigeants membres de l'Union des nations sud-américaines (Unasur). « Nous avons tous pu lui parler et il a répondu à chacun », a fait valoir le président uruguayen, Tabaré Vazquez, issu de la gauche, ajoutant : « Cela n'arrivait pas auparavant. » Le président équatorien, Rafael Correa, l'un des plus critiques envers Washington avec le Vénézuélien Hugo Chavez ou le Bolivien Evo Morales, en est ressorti également séduit : « C'est le début d'une nouvelle ère », a-t-il dit, même si la présidente argentine Cristina Kirchner, a dit qu'« un dialogue différent avait été ouvert » avec Barack Obama et espéré que « ses intentions pourront se traduire en politiques concrètes ». La réunion a été « très positive » et l'échange « franc », a résumé son homologue chilienne Michelle Bachelet. Mais à quelques heures de la fin du sommet, il n'y avait toujours pas d'accord parmi les 34 chefs d'Etat et de gouvernement sur une déclaration finale et la principale raison était la politique américaine envers Cuba. Exclue de l'Organisation des Etats américains (OEA) depuis 1962, l'île n'était pas invitée au sommet. A l'initiative de M. Chavez, les membres de l'Alternative bolivarienne pour les Amériques (Alba - Venezuela, Cuba, Bolivie, Nicaragua, Honduras, Dominique et Saint-Vincent) ont jugé « inacceptable » la déclaration finale faisant l'impasse sur l'embargo américain contre l'île. La déclaration des sommets des Amériques est toujours adoptée par consensus. Si cette fois ce n'était pas le cas, cela pourrait nuire au bilan autrement positif du sommet. D'autant plus que les gestes de bonne volonté en direction de Cuba se sont multipliés en marge du sommet. Le président américain a déclaré, vendredi, qu'il croyait à la possibilité de donner « une nouvelle direction » aux relations avec l'île. Raul Castro avait assuré la veille être ouvert « à un dialogue sur tout » avec Washington, « y compris les droits de l'homme, la liberté de la presse, les prisonniers politiques ». C'est là un véritable ordre du jour, en supposant que Washington et La Havane acceptent d'aller au-delà du simple discours. Il y a une volonté déclarée et l'on sent, au sein de la nouvelle administration américaine, une volonté de tourner la page du passé. Pour quels rapports s'interrogera-t-on alors.