Paris : De notre bureau Sauzon, Bangor, Le Palais, Locmaria… autant de petits villages flottants, perdus au milieu de l'Atlantique, quelque part entre la France, l'Irlande et l'Angleterre. 19h. Nous montons dans un bateau de la compagnie maritime bretonne. Direction : Belle-île-en-mer. Une parcelle de terre de vingt kilomètres carrés, cernée par les eaux et une luxuriante végétation. L'île s'étend jusqu'à 9 km dans sa plus grande largeur et s'élève jusqu'à 71 mètres au-dessus de la mer. Le voyage dure 45 minutes. Le temps de contempler de la mer la petite ville de Quiberon, illuminée par les derniers rayons de lumière. En Bretagne, on dit qu'il faut toujours attendre la fin du jour pour apprécier la splendeur du soleil. Quiberon disparaît peu à peu de notre champ de vision. Elle laisse place à Belle-île-en-mer, avec ses lumières scintillantes, ses beaux paysages insulaires et ses champs ouverts, façonnés à partir de l'an mil. Occupée par les Anglais de 1761 à 1763, l'île a subi de multiples invasions avant qu'elle ne soit à jamais fortifiée par le bâtisseur Vauban. «Belle-île-en-mer vit essentiellement du tourisme, expliquent Olivier et Josiane qui ont choisi cet endroit pour fêter leur trente années de mariage. Elle est appréciée par des artistes célèbres comme le peintre Claude Monet, Sarah Bernhardt, Arletty et autres… ». La nuit est maintenant tombée. Seul «le grand phare Goulphar» de l'île demeure visible de loin. Il sert de guide aux bateaux et aux voiliers de plaisance navigant d'une île à une autre ou en partance vers d'autres contrées celtiques. Entré en service en 1836, son accession est possible si l'on a le courage de gravir plus de 200 marches. Mais la montée vaut le coup. Du sommet, on découvre par temps clair de beaux points de vue panoramiques sur toute l'île et un paysage splendide. Devant le phare, on peut aussi s'extasier devant les «aiguilles de Port Coton», une espèce de roches dentelées fascinantes et rares que le peintre Claude Monet a révélées en quelques toiles célèbres. Entourant le phare, leur appellation vient de l'écume, qui fouettée par mauvais temps, forge de gros flacons mousseux semblables à du coton. En face, en remontant légèrement vers le haut, on trouve l'église Notre Dame de Locmaria, un des plus anciens édifices religieux de la région. La légende locale raconte qu'autrefois, des pirates hollandais avaient abattu un arbre devant le bâtiment pour remplacer le mât cassé de leur bateau. Miracle : l'église déforma vite le tronc qui fût rendu inutilisable. Depuis, chaque année, des dizaines de pèlerins viennent demander grâce et pardon auprès de cet édifice religieux ouvert au vent et otage des tempêtes hivernales. Un site mégalithique exceptionnel Les plages de Belle-île-en-mer ont une bonne réputation dans toute la Bretagne. Plage du donnant, d'Herlin, côte sauvage ou plage des grands sables, elles possèdent toutes un facteur commun : la froideur de leur eau limpide. Dur pour les touristes, notamment les amoureux du soleil, de risquer un plongeon dans ce liquide cristallin dépassant rarement les 14 ou 15 degrés. Un obstacle insignifiant pour les vieilles femmes bretonnes qui ne semblent pas s'embarrasser pas la température de l'eau ni du climat. Après de courts moments d'hésitation, elles se jettent pour, disent-elles, «vivifier le corps et le raffermir». Les touristes, drapés dans leurs serviettes de plages, restent ébahis par le courage de ces drôles de dames qui, de surcroît, engagent entre elles des conversations aquatiques. A Belle-Ile-en-Mer, il y a tant et tant de choses à faire et à voir à pied ou à vélo. Des grottes où nichent des oiseaux marins, des réserves naturelles abritant plusieurs colonies de mouettes et goélands, mais aussi des citadelles et des maisons de la nature, l'essentiel est d'avoir le courage d'affronter les vents violents et les pluies torrentielles qui arrosent à longueur de journée l'endroit. Il y a aussi des maisons d'hôtes et des auberges familiales qui proposent des séjours thématiques et permettent de découvrir les traditions culinaires de la région. D'ailleurs, de nombreux richissimes anglais et écossais ont acheté des vieilles bâtisses bretonnes aux charpentes aiguisées permettant l'écoulement de l'eau de pluie et leurs gigantesques cheminées pour les soirées d'hiver. Découvrir la Bretagne, c'est aussi plonger dans la préhistoire à travers la visite des menhirs de Carnac ; un petit village situé entre la ville de Quiberon et la Trinité-sur-Mer, ville ou naquît le président du Front national Jean-Marie Le Pen. Les menhirs, (en langue bretonne) sont des monuments constitués de gros blocs de pierre, alignés les uns à côté des autres sur une distance assez vaste et organisée en fonction de la taille et du volume du bloc. On compte environ 4000 menhirs impressionnants érigés pendant la période néolithique avec des architectures différentes. A la vue de ces pierres géantes dressées comme des dieux vivants face à la mer, on ne peut s'empêcher de poser la question de savoir comment elles sont arrivées là. La légende raconte que ce sont les soldats romains qui seraient pétrifiés et transformés en menhirs. Les historiens avancent, eux, des interprétations fondées sur l'archéologie. Même si l'origine de ces «tumulus» demeure encore inconnue, près de 800 000 personnes leur rendent visite chaque année. Une forme de pèlerinage que les autorités exploitent à fond pour engranger des bénéfices financiers. Bretagne, autrefois terre des Celtes et des Vikings, enracinée dans une espèce de religiosité séculaire, est l'une des rares régions de France où l'on peut faire du tourisme profane et religieux. A découvrir absolument