Ce colloque est sans doute un événement d'un caractère exceptionnel en France par la teneur de son intitulé et par la sensibilité du sujet, notamment chez ceux qui jugent sans discernement le système colonial sous le prisme d'une généreuse « entreprise de civilisation ». Sujet à controverse aussi puisqu'il envenime durablement les relations entre les deux pays. Cette douloureuse page de l'histoire demeure, malheureusement, un tabou au sein de larges couches de la classe politique française. Les conséquences de ce qui est considéré comme un mépris outrageant pour les victimes se font ressentir notamment dans le gel, depuis le 8 mai 2005 des négociations sur le traité d'amitié entre les deux pays. Dans un discours devant l'Assemblée nationale française en juin 2000, le président Bouteflika avait pourtant tenté une ouverture qui aurait pu aboutir à la mise à plat de cette tragédie dont on ne peut faire le deuil dans un climat de négationnisme. En réponse à l'initiative algérienne, ce fut le silence officiel ponctué par des prises de position, peu responsables de quelques voix pour justifier les crimes de la colonisation. Le colloque du 6 mai à la mairie de Paris pourrait être un pas en avant dans l'évolution des esprits sur ce crime de guerre d'une impitoyable ampleur génocidaire commis avec une rare violence sur des populations algériennes du Nord Constantinois durant les mois de mai et juin 1945. Cette tragédie de 64 ans ne s'oubliera pas sous l'effet simple du déni. Elle renvoie au sens des responsabilités et surtout à des prises de position plus courageuses que la simplicité de propos fossoyeurs d'une mémoire commune. Par sa dimension et la sauvagerie ahurissante de la hiérarchie militaire et civile à tous les niveaux, 1945 a été le choc qui va sonner le glas de l'empire colonial français. Avec un sens de la prémonition assez rare pour l'époque, le général Duval, membre de l'état-major, qui a conduit la machine de guerre, a prévenu dès la fin de 1945 que « avant dix ans, tout recommencerait en pire et de façon irrémédiable ». Ce colloque réunit des historiens spécialistes du sujet, notamment Jean-Louis Planche auteur de Sétif 1945 ; Histoire d'un massacre annoncé, Benjamin Stora spécialiste de Messali El Hadj, Alain Ruscio ou Olivier Le Cour Grandmaison auteur de La République impériale politique et racisme d'Etat, Paris Fayard 2009 des philosophes. Le documentaire L'Autre 8 Mai 1945 de Mehdi Lallaoui qui a eu un grand retentissement lors de sa diffusion en mai 1995 sera projeté et débattu en présence du cinéaste.