Au-delà de son niveau actuel et des approximations qui caractérisent la manière dont elle est officiellement mesurée, la tendance de l'inflation inquiète surtout par sa propension à suivre une courbe ascendante d'année en année. L'Office national des statistiques (ONS) a observé, lui aussi, il y a quelques semaines, un retour à l'inflation avec un rythme de 3,3% alimenté par une flambée des prix des produits alimentaires, retraçant ainsi l'évolution des prix au cours des neuf premiers mois de 2007 par rapport à la même période de 2006. «A partir d'un taux de 3,5%, l'inflation devient un phénomène dont il faut s'inquiéter», estime El Hachemi Siagh, consultant et spécialiste des questions financières. Selon lui, si les poussées inflationnistes continuent à prendre de l'ampleur, elles engendreront une baisse drastique du pouvoir d'achat, un surenchérissement certain des coûts des projets d'investissement et même une tendance à la hausse des taux d'intérêts bancaires. De tels effets négatifs sur l'économie nationale risquent, de l'avis de M. Siagh, d'être sérieusement perceptibles à partir d'un taux d'inflation de 5%. «D'où la nécessité de tuer l'inflation dans l'œuf», a-t-il lancé, en soulignant qu'une fois installée, sa maîtrise deviendra une entreprise de longue haleine. Interrogé sur les facteurs ayant favorisé la tendance actuelle au retour des poussées inflationnistes, M. Siagh explique que ce phénomène est induit par la conjugaison de trois facteurs principaux, à savoir l'accroissement de la masse monétaire, la hausse des salaires sans contrepartie en productivité et l'inflation «importée» née du renchérissement des produits importés sous l'effet de l'appréciation de l'euro. «L'inflation importée, précise-t-il, est due au fait que 60% de nos importations viennent d'Europe et que, en plus de l'appréciation de la monnaie européenne, la hausse des prix du pétrole est également répercutée sur les prix des produits importés.» Quant à la hausse de la masse monétaire, elle s'explique, selon ses dires, essentiellement par le fait que le gouvernement a désormais «plus de pouvoir d'achat et injecte par conséquent plus d'argent dans l'économie». Ceci étant, notre interlocuteur rappellera que même si la Banque d'Algérie ne peut pas jouer sur les taux d'intérêt – ces taux n'étant pas en fonction de l'offre et de la demande –, il n'en demeure pas moins que c'est à elle qu'il incombe de mettre les mécanismes nécessaires pour contrer le retour de l'inflation. Du reste, à la question de savoir si l'indice des prix de l'ONS rend véritablement compte de l'inflation, M. Siagh soulignera que cet indice reprend un certain panier qui n'intègre pas les prix de l'immobilier et que dans le cas contraire, les chiffres de l'inflation auraient été bien plus importants. Dans ce même ordre d'idées, l'économiste Abdelhak Lamiri relève, pour sa part, que la question de l'inflation soulève à elle seule nombre de problèmes, à commencer par «la mesure même du taux d'inflation». «A chaque fois, on nous parle d'une inflation ne dépassant pas 3,5 à 4% et cela devient risible quand on constate la réalité de l'évolution des prix sur le marché.» Quoi qu'il en soit, a-t-il soutenu, «les pressions inflationnistes sont surtout alimentées par l'augmentation des dépenses budgétaires et des salaires, au moment où la productivité ne progresse pas». A terme, dira-t-il, «cela aura un impact négatif sur la croissance, car la seule manière de corriger l'inflation est de réduire les dépenses et dans pareil cas, il y aura recul de l'investissement et de l'emploi». En définitive, préconise M. Lamiri , pour contrer les effets inflationnistes, «l'Etat doit revoir sa politique de dépense en orientant les ressources vers l'investissement productif et les entreprises performantes afin d'améliorer la productivité de l'économie nationale».