50e anniversaire de la création de l'UNPA : allocution du président de la République    Décès du journaliste Mohamed Bouzina: le ministre de la Communication présente ses condoléances    Une entreprise algérienne innove avec un bracelet électronique pour accompagner les pèlerins    CAN-2024 féminine: la sélection algérienne débute son stage à Sidi Moussa    M. Attaf reçoit le président de la Commission de la sécurité nationale et de la politique étrangère du Conseil de la Choura islamique iranien    Sonatrach: 19 filières concernées par le concours prochain de recrutement    «L'entrée en vigueur de la nouvelle Constitution a consolidé l'indépendance du pouvoir judiciaire»    Equitation: le concours national "trophée fédéral" de saut d'obstacles du 28 au 30 novembre à Tipaza    Oran: décès des moudjahids Meslem Saïd et Khaled Baâtouche    Etats-Unis: des centaines de personnes manifestent devant la Maison blanche pour dénoncer l'agression sioniste à Ghaza    La Turquie restera aux côtés de la Palestine jusqu'à sa libération    Le président de la République préside la cérémonie de célébration du 50eme anniversaire de l'UNPA    Cosob: début des souscriptions le 1er décembre prochain pour la première startup de la Bourse d'Alger    Agression sioniste contre Ghaza: "Il est grand temps d'instaurer un cessez-le-feu immédiat"    Accidents de la route: 34 morts et 1384 blessés en une semaine    Prix Cheikh Abdelkrim Dali: Ouverture de la 4e édition en hommage à l'artiste Noureddine Saoudi    Les besoins humanitaires s'aggravent    Dominique de Villepin a mis en PLS Elisabeth Borne    Energies renouvelables et qualité de la vie    La promotion des droits de la femme rurale au cœur d'une journée d'étude    «Les enfants fêtent les loisirs»    L'équipe nationale remporte la médaille d'or    L'Algérie décroche 23 médailles aux Championnats arabes    Se prendre en charge    Hackathon Innovpost d'Algérie Poste Date limite des inscriptions hier    Saisie de 370 comprimés de psychotropes, trois arrestations    Opération de distribution des repas chauds, de vêtements et de couvertures    Le wali appelle à rattraper les retards    Génocide à Gaza : Borrell appelle les Etats membres de l'UE à appliquer la décision de la CPI à l'encontre de responsables sionistes    Irrésistible tentation de la «carotte-hameçon» fixée au bout de la langue perche de la francophonie (VI)    Tébessa célèbre le court métrage lors de la 3e édition des Journées cinématographiques    Eterna Cadencia à Buenos Aires, refuge littéraire d'exception    La caravane nationale de la Mémoire fait escale à Khenchela    Numérisation du secteur éducatif : les "réalisations concrètes" de l'Algérie soulignées    La transition numérique dans le secteur de l'enseignement supérieur au centre d'un colloque le 27 novembre à l'Université d'Alger 3    Concert musical en hommage à Warda el Djazaïria à l'Opéra d'Alger    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«L'empire chérifien» ou l'empire des mirages
Publié dans El Watan le 16 - 04 - 2008

Ce chercheur, dont la rigueur s'exprime notamment dans ses travaux remarqués en épistémologie, vient hélas de se laisser embarquer dans une entreprise hasardeuse qui ressemble fort à une basse besogne commanditée par le Makhzen. Dans un ouvrage qui vient de paraître(1) et qu'il intitule Le Sahara – liens sociaux et enjeux géostratégiques – ce sujet marocain soutient la thèse ô combien rebattue et pensions-nous éculée et remisée, selon laquelle la France coloniale aurait dépossédé «l'empire chérifien» non pas d'une petite portion de son territoire mais de l'essentiel de celui-ci, puisque seraient concernés par cette spoliation l'ensemble des territoires du Sahara et cela au profit de «l'Algérie française». Dans cette approche, le territoire du Sahara-Occidental ne représenterait plus qu'un misérable grain de sable dans l'immense océan de sable et de dunes du Sahara historique ! Sont donc revendiqués, au nom d'un «empire chérifien» fantasmatique, non pas seulement les populations «sahraouies» ainsi que le territoire du Sahara-Occidental, mais les populations «sahariennes», et donc l'intégralité des territoires sahariens où elles vivent. Rien que cela. A l'appui de cette thèse, Mohamed Cherkaoui exhibe une enquête systématique des registres de mariage menée bien évidemment avec l'appui de nombre d'«Excellences» Marocaines dont il dévoile très honnêtement les noms et qu'il couvre d'éloges pour leur «disponibilité» : le nombre d'épousailles entre Marocains et «Sahariens» serait si considérable que le doute n'est plus permis ; la légitimité du lien politique entre le «Sahara» et le Maroc est irrécusable : elle renvoie à l'empire chérifien que la France coloniale a dépecé, et dont le Maroc d'aujourd'hui ne constitue finalement qu'un pauvre vestige, un semblant de moignon atrophié. Il s'agit donc pour le Maroc actuel de revendiquer sa souveraineté ; sur ce, je cite : «Les Sahariens et les autres Marocains». Les citoyens marocains apprécieront la formulation puisqu'ils ne deviennent qu'un minuscule appendice de la formidable ressource humaine qui peuple l'immensité du Sahara.
Premier problème : l'enquête d'état civil diligentée par Mohamed Cherkaoui n'a touché que l'«appendice», à savoir le territoire du Maroc ainsi qu'une petite portion du Sahara-Occidental. Comment pourrait-elle être scientifiquement validée si elle ignore l'essentiel des territoires et des populations du Sahara revendiqués au nom de cet empire chérifien fantasmé et, partant, les mariages qu'on y a célébrés ? Parce qu'on se marie aussi au Sahara. En deuxième lieu, cette investigation a été conduite sous la houlette complaisante des autorités marocaines. L'auteur le reconnaît. En troisième lieu, même dans le cadre «congru» du Maroc et de la partie occupée du territoire du Sahara-Occidental, les résultats brandis sont peu crédibles : les mariages entre «Marocains» et «Sahariens» sont de notoriété publique des mariages non pas seulement arrangés, mais forcés et planifiés afin de créer l'illusion d'une légitimité politique. Il s'agit par ce moyen grossier de fausser le recensement des populations du Sahara-Occidental en prévision du référendum d'autodétermination réclamé par le Front Polisario relayé par maintes résolutions de l'Organisation des Nations unies.
L'auteur fait remonter, par ailleurs, les origines de l'empire chérifien au XVIe siècle, rien que cela. Pourquoi ne remonte-t-il pas au Ve siècle ? Le souverain chérifien, réputé descendant du Prophète Mohamed (QSSSL), pourrait alors revendiquer, au nom du califat, aussi bien l'Andalousie, la Sardaigne, la Sicile, Malte, la Palestine, les Balkans (avec le petit Kosovo) et une partie de l'Autriche s'étendant jusqu'aux portes de Vienne. Et puis Ceuta et Mellila, bien sûr, pour ne s'en tenir qu'au pourtour méditerranéen.
La nation musulmane, sans aucun doute, se dressera comme un seul homme pour se ranger sous la fière bannière de ce djihad d'un nouveau genre. Au nom du roi. Mais M. Cherkaoui est chagrin : le monde entier serait, d'après lui, en train de «tirer à boulets rouges sur les prémices du printemps démocratique au Maroc». Qui a tiré, et d'abord sur quels prémices ? Les sinistres culs de basse-fosse que sont les centres de concentration du Sahara Marocain peuvent-ils être considérés comme les «prémices» de ce printemps ? Toujours chagrin et chiffonné, cet homme de science qu'emporte un élan dévorateur affirme et de manière péremptoire que (hormis le Maroc), «de l'Atlantique à la mer Rouge et bien au-delà, ce sont tous des régimes si autoritaires qu'il n'y a rien de nouveau à en dire» et «qu'ils ne méritent pas qu'on leur consacre une minute de son temps». Minute ! Cette téméraire et outrageante pétition n'est pas tout à fait juste, puisque l'auteur a consacré à l'Algérie, cible déclarée de ses chimères, non pas une minute, mais de son propre aveu, plusieurs mois d'enquête.
Une enquête soutenue, lâche-t-il ingénument par une «armée de l'ombre ! » Au bout de cette entreprise harassante, un ouvrage superbement broché, sur papier de haute facture. Merci, merci pour toutes ces attentions… Mais au fait, qui a financé toute cette débauche généreuse pour produire une si belle ouvrage ? Toujours dans l'atmosphère de cette nostalgie névrotique d'un empire chérifien fumeux qui tourmente l'auteur, celui-ci croit percevoir depuis 10 ans une «révolution silencieuse au Maroc». Et ce Maroc emblématique se propose d'ouvrir «de nouvelles perspectives politiques» tout à la fois «aux autres régions du royaume chérifien mais aussi aux nations voisines» (l'Algérie au premier chef). Rien que cela.
Dans ce cadre, cet «empire chérifien» subliminal reçoit un sérieux coup de lifting. Il aura désormais la forme moderne d'une «démocratie confédérale» à laquelle il est enjoint aux «nations voisines» de se joindre pour leur propre salut, sous la protection bienveillante du roi, car se serait le seul moyen de relever les défis de la mondialisation. Un projet prométhéen qui devrait soulever de grosses vagues de dunes et de poussière au Sahara. Si cette thèse, qui confine au délire, d'un empire chérifien mythique devait être validée, alors l'on pourrait tout de même lui objecter l'incroyable passivité, qui confine à la complaisance, dont le royaume a fait montre au lendemain du débarquement de Sidi Fredj devant les avancées du corps expéditionnaire français dans le Sud algérien.
L'Emir Abdelkader et ses valeureux compagnons, et plus tard les chefs des insurrections successives incessantes qui on soulevé les populations algériennes du Sahara depuis 1870, et ce jusqu'au tournant du siècle, furent les seuls à se dresser contre l'envahisseur. L'Emir Abdelkader aurait au moins pu espérer un soutien, une aide, une attitude bienveillante, un signe de sympathie auprès du royaume marocain puisque l'Emir défendait les territoires de «l'Empire» contre les infidèles.
Ce ne fut nullement le cas : poursuivies par les troupes coloniales françaises et cherchant refuge sur le territoire marocain afin d'y trouver un répit et refaire leur forces, les cavaliers de l'Emir furent impitoyablement pourchassés et refoulés par les tabors et les goumiers du roi : ils se trouvèrent pris entre marteau et enclume. Va donc, alors, pour sortir des limbes ce fastueux «Empire chérifien» et lui donner corps et consistance. Seulement, comme toute entreprise de cette ampleur — comme pour les plus modestes d'ailleurs —, il faut engager le premier pas : nous suggérons humblement d'entamer cette marche longue, exaltante et improbable à Ceuta et Mellila où le souverain d'Espagne, le roi Juan Carlos, vient d'effecteur une parade triomphale — certains mauvais esprits disent provocatrice — sans toutefois que cela fasse tiquer le Makhzen.
(1) Mohamed Cherkaoui «Le Sahara»- Liens sociaux et enjeux géostratégiques.
Editions Baldwell – Presse – Oxford


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.