Le gouvernement Ouyahia est chargé d'appliquer une politique économique pour le moins hétéroclite. Qu'on en juge ! Au-delà de la littérature contenue dans son projet de plan d'actions qu'il présentera aujourd'hui devant les députés de la Chambre basse, l'Exécutif s'est offert pour objectifs finaux de sa politique une croissance de pas moins de 4% et une importante création d'emplois. Ce sont là les principaux objectifs auxquels doit tendre la politique du gouvernement qui dit réserver la mère des batailles à la lutte contre le chômage. Bouteflika a fait, rappelons-nous, la promesse de créer 3 millions d'emplois en cinq ans. Soit. Les gouvernements ou les dirigeants politiques ont la responsabilité de leur choix politique, du moins devant l'opinion publique. Et non plus devant les députés, en Algérie, car il est vrai que le Parlement a perdu ce pouvoir depuis le réaménagement de la Constitution en novembre 2008 aux convenances de l'Exécutif. Quoi qu'il en soit, l'emploi reste l'une des conquêtes dont veut se prévaloir l'équipe dirigeante en injectant des milliards de dollars, argent public, dans les circuits de l'économie. L'objectif, s'il est louable en soi, n'en suscite pas moins pourtant une série de questionnements. Car, en définitive, il ne s'agit pas tant de conjecturer sur les résultas mais tout simplement de savoir comment Ouyahia et son équipe comptent y arriver ? La question vaut par toutes les mesures qu'il a lui-même édictées ces dernières semaines : la lutte contre l'inflation et la réduction de la facture d'importation. Surtout lorsqu'on y ajoute la décision acquise de faire augmenter les salaires, une autre promesse électorale de Bouteflika (hausse du SNMG). Le nœud de la politique économique du gouvernement. On reste ainsi méditatif devant cette politique économique qui prétend pouvoir allier les contraires (lutte contre l'inflation et lutte contre le chômage), comme qui voudrait faire cohabiter l'eau et l'électricité. Il est, ce faisant, étonnant de voir le premier ministre courir deux lièvres à la fois, inflation et chômage. Sans vouloir être enfermé dans le carcan doctrinaire des politiques de relance ni même de celles monétaristes, il reste tout de même curieux de savoir quelle politique compte poursuivre l'Exécutif pour réussir le pari de la création d'emplois et de contenir l'inflation dans des limites acceptables tout en augmentant les salaires et en freinant les importations. Voilà une équation à plusieurs inconnues au théorème de laquelle Ouyahia devrait donner son nom désormais, si jamais il arrive dans l'exercice de ses fonctions à la tête de l'Exécutif à solutionner ce problème. Tant le défi, entier, se mesure à ce que l'augmentation des salaires favoriserait plutôt le retour de l'inflation et non sa réduction, d'autant plus que l'offre interne n'est pas extensible à souhait alors que, dans le même temps, le gouvernement a engagé la bataille contre les importations. Ainsi les objectifs intermédiaires du gouvernement semblent-ils entrer en flagrante contradiction avec les résultats finaux qu'il s'est assignés dans le cadre de son programme. Une communication franche sur les politiques économiques tracées par l'Exécutif gagnerait à être portée à la connaissance du public et faire l'objet de débats féconds par l'intermédiaire d'expertises autonomes du gouvernement. Et ce d'autant que la position économique du pays n'a guère mieux évolué depuis le tristement célèbre 1986 qui a vu les prix du pétrole dégringoler, entraînant dans cette descente aux enfers le pays tout entier. Aujourd'hui, le même défi se pose au pays de sortir d'une économie rentière qui le maintient dans un état d'infériorité à chaque fois que les cours du pétrole observent une baisse durable. En plus de vingt ans d'intervalles, l'Algérie n'a pas réussi à sortir de l'ornière de la dépendance des hydrocarbures. A présent, la récession mondiale n'en finit pas d'asséner ses « coups de bélier » sur nos oléoducs et gazoducs. Que nos réserves de changes fondent comme neige au soleil et ce sont tous les équilibres qui risquent de se rompre, nous mener à la crise et renouer avec l'endettement. A ce moment-là, on serait contraint à l'ouverture plus prononcée de l'économie pour une vérité des prix. Autant donc commencer aujourd'hui avec la vérité du discours. Ouyahia est-il prêt ? Avis aux députés.