Après avoir envoyé la veille un signal d'apaisement pour tenter de mettre fin aux violences dans le nord du pays, le président bolivien, Evo Morales, a attaqué ses opposants samedi et affirmé qu'il ne renoncerait pas à ses réformes. Morales a affirmé qu'il n'hésitera pas, si besoin est, à étendre l'état de siège aux trois autres provinces autonomistes rebelles, tout en disant espérer beaucoup des pourparlers lancés vendredi. L'opposition autonomiste s'est emparée la semaine dernière des champs de gaz naturel et des bâtiments publics, dressant des barrages routiers, exigeant l'annulation du référendum du 7 décembre. Ce référendum, dénoncé par l'opposition libérale, cristallise la crise qui couve depuis l'accession du socialiste Morales à la tête du pays le plus pauvre d'Amérique latine. Il prévoit de permettre à Morales de briguer un second mandat, de procéder à une réforme agraire en faveur des paysans sans terre et de renforcer la centralisation du pouvoir. Peu après dans la journée d'hier, le gouvernement a annoncé qu'il allait faire arrêter le gouverneur de la province de Pando, où la loi martiale a été décrétée vendredi après des affrontements qui ont fait 17 morts en marge de manifestations antigouvernementales. «Ils complotent pour préparer un coup d'Etat fasciste, raciste contre nous», a dit Morales à propos de ses opposants lors d'un discours prononcé à Cochabamba, ville du centre du pays où sont situées la plupart des exploitations de coca. «Leur projet est de renverser l'Indien. Ils peuvent renverser l'Indien, mais ils ne renverseront jamais le peuple bolivien», a lancé Morales, ancien producteur de coca et premier indien à être élu à la présidence de la Bolivie. Difficile réconciliation Ce discours contraste avec la volonté de négocier affichée la veille, à l'issue d'une rencontre avec le gouverneur de la province riche en gaz de Tarija, Mario Cossio, l'un des quatre dirigeants régionaux de droite qui s'opposent aux réformes promises par le chef de l'Etat, dont la redistribution des terres agricoles. Seul gouverneur d'opposition à avoir accepté l'invitation à dialoguer, Cossio a ensuite informé ses trois homologues de l'opposition, qui réclament comme lui davantage d'autonomie pour leurs provinces riches en ressources naturelles. «Espérons que dans les prochaines heures, nous passerons à un processus de dialogue soutenu qui aboutira à un pacte réglant les problèmes dans le cadre d'une réconciliation nationale», avait déclaré Cossio après son entretien avec Morales. Les affrontements, qui ont éclaté jeudi dernier entre partisans de l'opposition et du gouvernement dans cette région amazonienne, ont fait au moins 15 morts. Un marin et un civil ont par ailleurs été tués lors de combats qui ont permis à l'armée de reprendre le contrôle de l'aéroport de Cobija, capitale du Pando. Peu après le discours de Morales, le ministre de la Présidence, Juan Ramon Quintana, a annoncé que le gouverneur de la province de Pando, Leopoldo Fernandez, accusé d'être derrière ces violences, allait être arrêté. Quintana a ajouté que les troupes déployées à l'aéroport de Cobija allait également se diriger vers la ville pour en reprendre le contrôle. Le gouvernement a accusé Fernandez d'avoir orchestré un «massacre», allégations que le dirigeant a rejetées. «Ils m'ont accusé d'avoir employé des tueurs, alors que tout le monde sait que ces paysans socialistes, ces faux paysans, étaient armés», a réagi Fernandez.