Les mélomanes de la métropole canadienne étaient invités, samedi dernier, à un récital de musique maghrébine avec les chanteurs algériens Djamel Lahlou et Azzedine El Maghrabi. En marge de ce concert, qui s'est transformé en une visite guidée du Maghreb à travers les styles musicaux marocains et algériens (chaâbi, hawzi, algérois, malouf, andalou et kabyle), El Watan a rencontré le chanteur et musicien qui était derrière l'organisation de cette soirée, Djamel Lahlou. Celui-ci ne fait pas que chanter, il sait aussi parler ! Vous venez d'organiser et de participer à une soirée de musique maghrébine avec le chanteur Azzedine El Maghrabi, pouvez-vous nous en parler ? D'habitude, soit on organise ou on anime. C'est vrai que c'est difficile d'être au four et au moulin ; toutefois, cela permet de répondre aux exigences de qualité qu'on veut avoir en tant que musicien, comme dans le choix d'une salle appropriée, un support sonore et visuel professionnel, une acoustique idéale, une présence médiatique large. Choses pourtant primordiales, mais auxquelles un organisateur conventionnel n'accorde pas d'intérêt. Lors de cette soirée, les musiciens n'étaient pas des invités, ils étaient les hôtes et ça se voyait dans leur performance. Pour Azzedine El Maghrabi, qui est à Montréal depuis seulement deux mois (en tant que nouvel immigrant au Canada, ndlr), je l'ai impliqué dans bien des événements. Pour moi, c'est le devoir d'un compatriote qui veut la réussite de ses confrères. On m'a beaucoup aidé en Algérie, à mon tour d'aider mon prochain à Montréal. Comment peut-on qualifier le public montréalais qui vient à ce genre de soirées (uniquement maghrébin...) ? Cela dépend toujours de ce qu'on cible comme public. Le choix des médias, la stratégie publicitaire, le bouche à oreille et les réseaux dans lesquels on active sont très déterminants. Dans notre soirée, il n'y avait pas que des Maghrébins, c'est pour cela que j'ai opté pour une sorte d'animation hybride, communicatrice pour expliquer les chansons et la culture maghrébine pour les non-initiés, mais aussi festive pour faire danser celles et ceux qui connaissent nos rythmes endiablés. Comment se porte la chanson algérienne à Montréal ? Montréal accorde une place à tous les styles musicaux, c'est une ville à caractère ouvert. Les nombreux festivals nous permettent à tous une présence sur la scène, mais cela n'est pas suffisant, car la qualité n'est pas toujours au rendez-vous. La venue de temps à autre de nouveaux musiciens professionnels du Maghreb apporte de l'eau à notre moulin qui a besoin de retrouver sa vitesse de croisière. On commence quand même à produire, je peux citer une dizaine d'albums de chanteurs algériens de styles confondus. Sans dénigrer les concerts dans les restaurants, pensez-vous que ce soit suffisant pour développer la musique algérienne à Montréal ? Le restaurant répond à une demande nostalgique qui pourtant permet à certains musiciens d'exercer, de rouler, de répéter et même d'exister, mais il n'est pas suffisant à lui seul pour aider au développement. Car, dans un restaurant, il n'y a pas la capacité de recrutement massive de musiciens. En se contentant d'engager rien qu'un organiste et un percussionniste, on ne va pas loin. Par ailleurs, la qualité n'est ni un souci ni une fin. Pour améliorer la situation, il faut des associations, des centres culturels, des organismes publics. Cela prend aussi des artistes bosseurs et passionnés : c'es au fond la réponse à votre question. Pouvez-vous nous parler de votre album qui est déjà sur le marché et du prochain s'il y a lieu ? Avez-vous un diffuseur en Algérie ? J'ai enregistré en 2007 l'album Zinet El Boulden, contenant huit pièces originales, destiné au public algérien. J'ai entrepris un travail colossal de promotion à Alger et à Montréal et la critique dans la presse était très favorable. Les radios reprennent quelques morceaux jusqu'à aujourd'hui à la demande des auditeurs qui commencent à connaître mon produit. J'ai enregistré deux vidéoclips de qualité très acceptable qui sont passés à peine quelquefois dans les différentes télévisions d'Etat. Mon produit n'est donc pas distribué, car je n'ai pas compris comment ça marche en Algérie. J'attribue cette situation à l'échec de mon contact avec les distributeurs. Soit parce que je suis loin des lieux pour un meilleur contact, soit par le fait que je n'ai pas compris la culture et le jargon de ces businessmen qui sont à la tête de la distribution du produit artistique en Algérie. Pour le moment, mon album n'est disponible que sur une tablette ah doc aux endroits où je me produis comme chanteur occasionnel. (Pour plus d'information sur le chanteur : www.djamellahlou.com)