Aïn Touta, ou la Fontaine des mûriers, située à une trentaine de kilomètres du chef-lieu Batna, a innové intelligemment en matière de lutte contre le tabagisme. Un café pour non-fumeurs vient d'ouvrir dans la ville de Aïn Touta (Batna) baptisé El Merdja, devenu le lieu privilégié des sportifs et des fumeurs en cure de sevrage. Ouvrir un café non- fumeurs, dans une ville de la taille de Aïn Touta qui compte à peine 80 000 habitants, pouvait paraître une gageure, voire une idée saugrenue, mais Kamel Brakta, propriétaire des lieux, a tenu bon et son établissement marche plutôt bien. Pour ce quinquagénaire (57 ans), le défi était de rompre l'habitude bien ancrée dans les mœurs et qui veut qu'une tasse de café soit obligatoirement accompagnée d'une cigarette « imposée » de fait par les seuls fumeurs. L'idée d'un café pour non-fumeurs est née, raconte Kamel Brakta, durant un après-midi d'hiver dans... un café, à la suite d'un différend qui l'opposa à un client qui ne voulait pas qu'il ouvre la porte pour respirer après s'être presque étouffé par les nuages de tabac, lui qui n'a jamais mis une cigarette dans la bouche ! Le « déclic » a été provoqué par une phrase lancée par le fumeur frileux et insurgé : « Je suis dans un café, donc je suis libre de fumer ». Après quelques jours seulement, il a ouvert son café « exclusivement réservé aux non-fumeurs » qui, comme lui, sont devenus « les victimes des adeptes de la cigarette qui envahissent sans vergogne tous les espaces publics ». Baptisé El Merdja (la prairie), le café de Kamel est situé en plein cœur de Aïn Touta. Il est devenu le lieu de rencontre de prédilection pour les sportifs, les intellectuels et les fumeurs en cure de sevrage, signale Bachir Kidel, rencontré en train de siroter un café. « J'y viens pour m'habituer au divorce avec cette satanée cigarette qui m'a empoisonné la vie pendant 30 ans », ajoute ce retraité. Les anciens sportifs de la ville de Aïn Touta estiment que ce café est un modèle de « lutte positive contre le tabagisme ». Le Dr Bekhouche, chef du service des urgences à l'hôpital de cette localité, avait récemment loué cette initiative au cours d'un séminaire international sur le tabagisme et le cancer tenu en Tunisie. Aujourd'hui, ce même praticien signale que l'idée avait choqué à ces débuts au point que certains l'avaient même taxé de « café des femmes » mais ce fut en réalité « un présent inestimable » pour les non-fumeurs, particulièrement à l'occasion de la Journée mondiale sans tabac.