Alors que le programme du CCF annonce « La rose des vents », un spectacle du groupe de Merzoug de Biskra qui s'est associé avec un cornemuseur, Patrick Molard, pour le mois de février, le TRO a été au rendez-vous avec le jazz français. Sylvain Beuf sait très bien inciter le public à faire de l'ambiance, mais il ne le fait pas seulement verbalement, en imaginant des petites mises en scène ou en lançant des clins d'œil, mais aussi avec les impressionnantes coulées mélodiques de son saxo. Le trio qu'il dirige, avec Diego Imbert à la contrebasse et Franck Agulhon à la batterie, a fait une belle impression au TRO, le week-end dernier. « On nous a dit qu'Oran était une ville où il fait très chaud, mais, apparemment, nous avons ramené avec nous le froid du Nord », devait-il lancer en se frottant les mains, face au public qui venait juste d'avoir un aperçu de ce que ce groupe peut donner. Le trio « Expérience » venait juste d'interpréter ‘‘Everywhere Calypso'', en hommage aux « couleurs des îles », mais surtout à l'auteur du titre, Sonny Rollins et son album intitulé ‘‘Next album''. Mais, dans les bagages de cette formation, il y a heureusement des œuvres originales qui vont traduire une émotion également originale. “Another Building” (Une autre construction) est le titre de leur prochain album qui sortira en mars en France. Il a été interprété avec brio face à un public oranais qui n'a pas rempli l'ancien opéra mais qui a grandement adhéré à l'atmosphère dégagée par les dialogues harmonieux entre les trois instruments qui ont été à l'origine de l'essor de cette musique afro-américaine qui a fini par conquérir le monde. « Place à la tendresse et à l'amour », devait prévenir Sylvain Beuf, avant d'attaquer ‘‘Rêverie'', un autre titre entamé avec délicatesse. Franck Agulhon, tantôt caressant les peaux de ses caisses tantôt les malmenant, a fait belle impression sur un public habitué au rythme et qui n'en finissait pas d'en redemander. De son côté, Diego Imbert, hormis l'usage de l'archer classique, a bien tenté quelques effets sur sa contrebasse pour transporter le public vers des strates d'inspiration orientale ou, peut être, plutôt maghrébine, avec la subsistance, notamment, des traces d'un rythme caractéristique.