Les Algériens savent-ils ce qu'ils mettent dans leur assiette ? Pas si sûr. Le pays, en effet, accuse un énorme retard en matière de sécurité des denrées alimentaires et l'utilisation des détergents. Aussi surprenant que cela puisse paraître, l'Algérie reste à la traîne même sur un registre aussi important que la consommation alimentaire. Alors que les pays européens renforcent leur législation en imposant de nouvelles normes pour la fabrication et l'usage des produits chimiques, chez nous il n'existe même pas de texte de loi réglementant ce domaine. « L'Algérie accuse un retard énorme par rapport aux objectifs que se fixent les Européens. » Nous ne sommes même pas capables de contrôler le marché », déclare le docteur Nafaa Timsiline, directeur général de Nosoclean. S'exprimant à l'occasion de la 3e journée d'échanges et de formation en industries des boissons, organisée hier à Alger, le premier responsable de Nosoclean recommande une réaction rapide à tous les niveaux pour rattraper ce retard. « Nous avons un marché de biocides qui est vraiment à l'état sauvage. Nous devons agir tant qu'il est encore temps », lance-t-il devant des représentants de plusieurs entreprises productrices des boissons en Algérie. M. Timsiline exhorte, dans la foulée, les industriels algériens à s'organiser et à conjuguer leurs efforts pour sécuriser leurs produits en application des normes internationales. L'orateur cite, dans ce sens, le règlement Reach (enregistrement, évaluation, authentification et restriction des produits chimiques) adopté par les pays de l'Union européenne. Ce texte, explique-t-il, est un nouveau cadre réglementaire qui vise à mieux connaître et mieux maîtriser les substances chimiques mises sur le marché et leurs effets sur la santé et l'environnement. L'Algérie ne dispose, selon Nafla Chouarbi, directrice du département industries agroalimentaires et santé animale au niveau de Nosoclean, d'aucune loi réglementant la sécurité des denrées alimentaires. « La sécurité des denrées alimentaires est orpheline en Algérie. Normalement, elle devrait être prise en charge par le ministère de l'Agriculture. Malheureusement, nous n'avons aujourd'hui aucun texte législatif qui définisse les normes à respecter en matière de sécurité des denrées alimentaires et le respect de l'environnement », souligne-t-elle. Intervenant sur cette question, M. Timsiline affirme qu'un groupe de travail, composé d'experts du ministère de l'Agriculture, se penche actuellement sur le sujet afin de proposer un texte de loi. Mais pour le moment, les producteurs doivent se contenter des textes européens. Cependant, Nafla Chouarbi attire l'attention sur les dangers de l'absence d'une législation nationale. Selon elle, tous les produits interdits sur les marchés occidentaux seront réorientés vers les pays du Tiers-Monde, dont l'Algérie. Ainsi la santé des Algériens et leur environnement sont mis en péril. Assurément, un contrôle de qualité des produits alimentaires gagnerait à être garanti.