Un remake. Après la cuisante défaite des réformistes en 2005, considérés comme incompétents face à la multiplication des problèmes sociaux, le président Ahmadinejad est à nouveau interpellé sur son bilan économique. L'élection présidentielle qui se tiendra demain aura ainsi valeur de test. Tout au long de la campagne électorale, les trois candidats challengers ont décoché des flèches assassines envers le président sortant, Mahmoud Ahmadinejad. Fort de sa rhétorique révolutionnaire qui semble plaire aux Iraniens, Ahmadinejad a bâti sa popularité autour de la lutte contre la pauvreté. « Il est le favori des déshérités et des laissés-pour-compte. Il recueille le soutien inébranlable des populations rurales qui ont bénéficié de sa politique de distribution des revenus et d'investissements. » « Sa façon de gérer est teintée de populisme : modestement vêtu, il n'a cessé de promettre des gratifications à la population. Pour briguer un nouveau mandat, il n'a rien changé à sa stratégie », selon des experts. La campagne électorale iranienne a ainsi été émaillée d'injures, d'accusations, de mensonges et de corruption. Durant les débats télévisés entre les candidats (sept émissions au total), les secrets d'Etat qui ont été divulgués ont été un tournant dans l'escalade des querelles internes et un coup terrible à la structure même de l'Etat. Mais c'est sur la question économique que les affrontements ont été les plus tendus. Dans un débat télévisé qui l'opposait au président Mahmoud Ahmadinejad, le candidat conservateur, Mohsen Rezaï, a concentré ses attaques sur le « mauvais » bilan économique du gouvernement sortant. Chiffres de la Banque centrale à l'appui, le docteur en économie a notamment dénoncé une croissance en berne et une inflation qui serait passée de 11,9% en 2006 à 25,4% en 2008. Mohsen Rezaï n'a pas mâché ses mots quand Mahmoud Ahmadinejad a maintenu, comme lors des précédents débats, que l'inflation était passée sous les 15%. « On ne devrait pas dissimuler la réalité avec des chiffres ; bien sûr, je ne dis pas qu'il (Ahmadinejad, en l'occurrence) est un menteur, mais cette manipulation des chiffres n'est pas correcte », a-t-il dit, s'adressant au modérateur du débat. L'autre défi des candidats à la présidentielle est de répondre aux attentes de la jeunesse iranienne qui représente plus de 60% de la population. Les moins de 30 ans se sont montrés sensibles au discours qu'on dit « empreint de sagesse » de Mir Hossein Mousavi, l'ancien Premier ministre d'Ali Khamanei. Même s'il a été absent de la scène politique depuis plus de vingt ans, Mousavi est devenu le rival le plus sérieux d'Ahmadinejad. Les jeunes ne manquent pas d'imagination pour encenser Mousavi, sexagénaire aux cheveux grisonnants, allant jusqu'à le comparer à Brad Pitt, l'acteur hollywoodien. L'ancien Premier ministre espère « rassembler » les Iraniens ainsi que « réparer une économie gaspillée par la gestion populiste, ouvrir les libertés individuelles, créer plus de justice sociale et redonner crédit et dignité de l'Iran à l'étranger ». Mais l'Iran ne donne pas généralement raison aux pronostics. En 2005, Ahmadinejad, le maire de Téhéran, qui était quasi inconnu, a été élu en 2005 à la surprise générale. Une répétition de ce scénario est envisageable et les « outsiders » Karoubi et Rezaï, pourraient l'emporter. Ce qui est sûr, c'est qu'une réélection d'Ahmadinejad décrit comme l'« homme du peuple » par ses posters de campagne traduirait un signal fort de la population iranienne.