Le cancer de la prostate est le thème principal des Journées maghrébines tenues la semaine dernière. Pourquoi le choix de cette localisation ? Le cancer de la prostate choisi par les sociétés savantes des trois pays du Maghreb a pour thème principal les raisons suivantes ; une augmentation rapide des cas diagnostiqués liée partiellement à une augmentation de l'espérance de vie et à de meilleurs moyens de dépistage individuel et de diagnostic. L'objectif des journées est d'abord échanger les expériences, motiver les plus jeunes à être producteurs et non à être de simples consommateurs de l'Occident sur le domaine de la recherche médicale, des publications ; actualiser leurs connaissances en tant que principaux intervenants dans le diagnostic et le pronostic de ce cancer ; rappeler les critères histologiques précis du diagnostic et du pronostic selon les dernières classifications de l'OMS et les systèmes de stadification reconnus à l'échelle internationale ; rappeler les indications de l'immunohistochimie dans le diagnostic de certitude du cancer et dans son diagnostic différentiel avec des lésions bénignes « pièges ». D'autres sujets ont été aussi traités tels que la pathologie tumorale de l'utérus : de l'endomètre sous forme d'histoséminaire ; du col utérin. Rappelons que le cancer du col tue des milliers de femmes en Algérie. Dans sa conférence, l'oratrice a rappelé la morbidité associée à l'infection par les papilloma virus humains (HPV) et le rôle crucial des sous types de HPV oncogènes dans la carcinogénèse du col utérin. La carcinogénèse se fait en plusieurs étapes et en plus des HPV à risque élevé des cofacteurs (comportement sexuel à risque, tabagisme) sont impliqués ; la progression est généralement longue sur de nombreuses années avec développement de lésions précancéreuses décelables sur FC puis de cancer ; ces lésions non reconnues ne seront pas traitées, elles pourront évoluer vers le cancer invasif ; ce qui explique les recommandations récentes de l'OMS pour une stratégie globale de lutte comportant trois volets complémentaires : la prévention par le vaccin anti HPV ciblant les filles avant leur contact avec le virus, le screening (dépistage cytologique par frottis cervical (FC ou Pap test) chez les femmes déjà exposées à l'infection, qui bien organisé, permet de détecter les lésions précancéreuses et les cancers précoces à un stade curable et de les traiter (avec réduction de 70% des cancers) et l'éducation pour réduire les facteurs de risque de ce cancer (rapports protégés, lutte contre le tabagisme..) Une conférence sur la « Méthodologie de la rédaction médicale » à l'usage des plus jeunes a complété ces présentations. Rendez-vous est pris pour les 7es journées. La Société maghrébine de pathologie au Maroc aura dans un an à présenter un thème principal autour du « Cancer du sein » et les tumeurs des glandes salivaires histoséminaires. Quel est le rôle du pathologiste dans le diagnostic des cancers ? Le rôle du pathologiste est crucial dans le diagnostic et le pronostic de ce cancer. Pour être performant, il doit cependant obtenir de l'urologue des prélèvements biopsiques adéquats lui fournissant un échantillonnage représentatif de la glande. Il doit tenir compte des paramètres cliniques et biologiques et interpréter correctement les aspects histologiques et les résultats de l'immunohistochimie ; en plus de fournir un type histologique précis (certains types de cancer étant plus agressifs), il doit estimer avec objectivité le pourcentage de tissu tumoral sur chaque prélèvement. Enfin il doit se familiariser avec les techniques de biologie moléculaires pour mettre en évidence des anomalies cytologiques spécifiques telles que des gènes de fusion qui pourraient rapidement signer une évolution particulière et une réponse à une thérapie « ciblée ». L'avenir est à un diagnostic moléculaire sur tissu tumoral et le pathologiste sera appelé à élargir ses compétences dans ce domaine. Notre service reçoit un pourcentage non négligeable de cancer de la prostate provenant du service d'urologie du CHU Mustapha Bacha qui couvre une large part de la population et du secteur libéral. Est-ce que votre service est aujourd'hui doté de tous les moyens techniques et humains pour répondre aux demandes importantes d'analyses de pièces ? Notre équipe est étoffée et performante. Nos moyens méritent cependant d'être améliorés avec en particulier une plus grande disponibilité des réactifs d'immunohistochimie, des possibilités de perfectionnement à l'étranger, de prise en charge financière des EPU (enseignement post universitaire) par des experts invités, d'une formation continue à nos TSS, de la participation aux congrès internationaux. (*) Chef de service d'anatomie et cytologie pathologie au CHU Mustapha Bacha et président de la société algérienne de pathologie (ASPATH)