porteur de rêves et de projets Un architecte racé Cher Confrère, de toi, je garderai l'image du sage à l'œil clair, vif et souriant, révélant le regard direct que tu imposais dans le mélange et la confusion d'une chevelure abondante et de ta barbe fournie que j'ai toujours connues blanches. Avec tes «origines» suisses (car j'aime à te considérer pleinement des nôtres), c'est toi qui nous as adoptés, il y a plus de 50 ans, pour passer parmi nous les deux tiers de ton existence. Tu nous as aimés alors que nous étions en quête de liberté et d'indépendance. Pour ça, nous t'aimons. En nous voyant naître libres, tu as engagé ton œuvre auprès de nous, te confondant avec le grand projet de construction du pays. Comme beaucoup, c'est plus tard, au début des années 80, à l'Ecole d'architecture, que je t'ai connu enseignant. Tu faisais alors le rêve d'un atelier unique d'architecture où s'enseigneraient simultanément, et de manière collégiale, toutes les disciplines de la profession. A partir de là, j'ai commencé à entrevoir l'architecture comme un art et non plus comme une discipline de la construction. Il m'aura fallu vingt-cinq ans pour qu'un autre géant referme la boucle en m'enseignant que «comme tout art, l'architecture doit créer simultanément l'émotion et la surprise» (Oscar Niemeyer, août 2008). Puis, il y eut les années malheureuses de l'Algérie. L'école d'architecture, dont tu avais dessiné l'extension du projet du même Oscar Niemeyer, t'avait remis aux mains de l'administration centrale, convaincue qu'elle «n'avait plus besoin de toi». Quelle ironie ! Le terrorisme n'a pas arrangé les choses. Comme beaucoup de nos concitoyens, ta survie s'est enveloppée dans le retrait. Alors vint l'oubli. Insensiblement, si l'on peut dire. Je ne mentirais pas en témoignant d'une autre forme de terrorisme. Tu sais bien… celui qui consiste à happer toute idée saine pour la broyer jusqu'à discréditer son auteur et ériger l'inaccessible en mensonge. De la culture du reniement, nos valeurs se sont inversées et nos erreurs se sont retrouvées sur un piédestal. Que restera-t-il de Sidi Abdallah, la ville poétique que tu as dessinée, pensée pour grandir en évoluant et qui ne retrouvera jamais plus le bon sens et l'humanisme que tu y avais semé. La vision a disparu et les dispositifs mis en place sont déjà en décalage. Ils correspondent à d'autres standards, uniformisés et scandaleusement lâches. La disproportion totale entre les puissances du profit et du contrôle, d'un côté, et celles de la pensée et du projet, de l'autre, est visible à l'œil nu. Elle est grossière, vulgaire et contre-productive. Quand une société accepte de trahir son adolescence, alors la vérité devient une maladie honteuse et tous ceux qui la portent en eux sont inlassablement poussés à négocier leur âme. Non ! Notre âme n'est pas une marchandise. Mon cher Jean-Jacques, tu avais sans aucun doute le souffle ample d'un architecte racé. Oui ! architecte, on l'est où on ne l'est pas. C'est comme ça ! Tout comme les peintres ou les compositeurs, nous avons le privilège de la distinction. De l'architecte, tu nous as laissé une œuvre de simplicité et de rationalité. Merci ! Elle sera féconde, nous te le promettons. L'histoire en jugera. Sous un arbre, dans la banlieue d'Alger que tu as chérie pour l'avoir si justement ressentie et décrite, tu as demandé à être mis directement en terre dans un linceul blanc de dignité et de simplicité. Dors en paix, homme de paix. Ton œuvre est complète, mais pour nous, elle n'est pas achevée. Halim Faïdi/ Architecte Anecdotes en profondeur L'humaniste du bâti Quand il faut évoquer la disparition d'un ami, la tâche n'est pas aisée, d'autant qu'il s'agit aussi d'un grand homme. Enumérer ses œuvres et les traces qu'il a laissées dans le cadre bâti de la ville qu'il a adoptée, d'autres le feront mieux dans des livres qui, sans doute, tenteront de rendre au professeur, à l'architecte et à l'urbaniste ce qu'il a donné durant toute sa carrière. Comment rendre sa dimension à l'homme, à l'humaniste qu'il a été sans tomber non plus dans l'éloge ou le panégyrique qu'il a toujours détesté ? Je me contenterai de deux faits qui me permettront ainsi de témoigner de ma rencontre avec lui. Le premier, c'est le jour où j'étais venu le voir, non plus pour passer avec lui une soirée familiale au coin du feu, mais lui demander une contribution pour un numéro de la revue Naqd consacré à ce qui nous apparaissait alors comme un «désordre» urbain. Il avait très gentiment accepté de le faire, mais dès l'abord, il avait contesté la notion même de «désordre». Il m'avait dit, et écrit par la suite, que le désordre était un ordre occulte dans la mesure où seule sa lecture dans l'espace se traduit par un sentiment de désordre ou d'anarchie. La structure, disait-il, est invisible, probablement n'est-elle même pas délibérée ? Elle est la traduction inéluctable d'un système économique et politique qui n'a pas assumé les valeurs idéologiques auxquelles il prétendait. J'étais stupéfait par cette capacité qu'il avait à s'élever du particulier de l'ordre architectural à celui, plus général, de l'ordre social et de les mettre en relation historique et dialectique. Il était en réalité porteur d'une utopie, au sens grec du terme ou topos, d'un lieu qui n'existe nulle part, mais auquel tant de monde aspire. Ce à quoi il rêvait, et qu'il a eu tant de mal à faire aboutir, était la diversification tant du cadre bâti que du contenu social. Il voulait remplir le «non-espace», «les vides» des grands ensembles urbains par des lieux de rencontre, d'agrément, de déplacement où le site, le paysage, les espaces d'intimité et ceux réservés au public entraient en harmonie. Il voulait rétablir le lien entre l'urbain et la pratique sociale entre la communauté et sa culture. C'est ainsi qu'il en est venu à me demander de trouver un bon arabisant pour traduire des passages des Mille et Une Nuits en arabe pour agrémenter mosaïques décorant les entrées d'immeubles d'une ville nouvelle, dont il avait en charge le projet. L'autre fait qui me revient en mémoire, comme une douleur, c'est l'ingratitude et parfois même l'ignominie de ces responsables de grandes écoles, d'agences ou de ministères qui ont fait de sa vie un véritable calvaire, jusqu'à parfois tenter de le déposséder de sa propre demeure. Parce que, bien qu'il ait fait le choix de rester et de vivre en Algérie, il était «étranger» aux yeux de ces prédateurs, dont le moins que l'on puisse dire est qu'ils n'aient rien laissé sinon des bâtisses que les Algériens rejoignent à six heures comme s'ils étaient punis. Brimades et réprimandes ont été son pain quotidien. Retards de paiement et révocations ont ponctué sa carrière algérienne. Il a pourtant tenu à continuer de vivre dans ce pays et à s'y faire enterrer. Peut-être dira-t-on un jour, en passant par quelque quartier ou bâtisse où les gens vivent : «Ceci est l'œuvre de Jean-Jacques Deluz», comme on dit : «Cela est l'œuvre de Le Corbusier.» Daho Djerbal /Historien et directeur de la revue Naqd. Un éclaireur dérangeant L'obsession de transmettre Deluz ne s'est jamais arrêté d'écrire pour transmettre ses idées, ses convictions et sa sensibilité. C'était devenu pour lui une obsession : communiquer, témoigner, raconter ses moments de bonheur, ses difficultés et ses échecs,… ses nombreuses déceptions. Il nous a démontré par le verbe au fil de ses ouvrages qu'il était grand temps pour nous de voir les choses en face, de sortir de cette espèce d'amnésie généralisée qui nous rend lamentablement inertes, insensibles et fatalistes. Dans son dernier ouvrage Fantasmes et réalités, il nous livre son analyse et nous transmet crûment et consciemment un témoignage peu reluisant de la situation de nos villes et de notre production architecturale. Il nous demande de nous ressaisir et de reprendre le chemin de la réflexion et de l'expérimentation, de redevenir cet acteur social aux pieds ailés qui peut mettre en cohérence des réalités hétérogènes. J.J. Deluz nous a laissé un héritage, produit de sa très longue expérience, pour nourrir notre réflexion et pour que l'on envisage sereinement l'avenir, il nous disait : « …Moi, je crois que notre destin d'architecte est toujours de se battre, non pas pour faire des œuvres architecturales époustouflantes, la qualité architecturale ce n'est pas cela, […] le rôle de l'architecte c'est d'intégrer l'architecture dans un milieu avec les qualités architecturales et esthétiques qui dépendent de sa sensibilité. »* (…) Cela dit, les architectes ne peuvent tout maîtriser et leurs opinions sont parfois discutables. Là encore, l'absence d'espaces de débats sur l'architecture et le devenir de nos villes fait cruellement défaut. Ce n'est malheureusement pas une spécificité algérienne, mais sur cette question particulière aucun effort n'est constaté. Des villes entières se dessinent et se redessinent à huis clos ! Seul le résultat compte, le processus de maturation n'a plus l'importance qu'il avait dans le passé. Deluz, lui, a fait ce qu'il a pu faire même si ses idées ne faisaient pas toujours l'unanimité : « …Moi, je dérange toujours tout le monde parce que mes idées sont contraires aux intérêts des monopoles, contraires aux orientations politiques qui vont en général beaucoup plus vers le prestige que vers le bien-être de l'habitant. (…) Donc, nous sommes obligés de garder un esprit critique et si nous voulons être fidèles à une certaine ligne de conduite et nous nous faisons forcément des ennemis. » * J.J. Deluz est resté combatif jusqu'à la fin de ses jours. Le travail ne l'effrayait pas, toutefois, il faut dire qu'il était aussi dans le besoin de travailler, de dessiner encore et toujours des plans d'architecture pour boucler ses fins de mois… triste situation à laquelle beaucoup de ses proches ont assisté impuissants. Ce grand monsieur est parti dignement. Il est parti la conscience tranquille. Il nous appartient aujourd'hui de tirer profit de ses enseignements et de poursuivre son combat. Akli Amrouche / Directeur de la revue Vies de Villes * Extraits de l'interview de J.-J. Deluz dans la revue «Vies de Villes», n°07, Mai 2007. Reconnaissance attendue Citoyen d'honneur d'Alger Tu n'as pas attendu l'indépendance pour venir partager les fruits. Depuis 1956, tu partages les souffrances et les joies d'un peuple. Au moment où les autres fuyaient la guerre, toi tu t'enracinais dans la paix. Tu n'as cessé de concevoir, de réaliser, de révéler et de traduire la texture de ta ville. Tu es parti, par une nuit étoilée, laissant un riche héritage à enrichir pour le rendre l'espace lisible aux Algérois. A Sidi Abdallah, tu t'es battu pour que les habitants pénètrent chez eux en franchissant la mythologie de Djeha et des Mille et Une Nuits. Tu as réintroduit les liens de sociabilité. Merci pour ces délicatesses. Je garde en mémoire un passage de notre correspondance où tu me disais : «La ‘‘tradition-modernité'' est un cliché éculé qui ne couvre pas les réalités. L'intellectuel qui se délecte à passer un temps dans une ‘‘maison traditionnelle''ou à y vivre (…) ne vit pas dans une tradition; le paysan propulsé dans une H.L.M. n'est pas ‘‘moderne'' pour autant. Dans notre nouveau monde de la complexité, le mélange des facteurs sociaux, économiques, psychologiques, urbains et architecturaux ne permet plus ces visions simplistes.» Ta conception de la ville algérienne de demain dépasse la perception bureaucratique d'aujourd'hui. L'avenir de Sidi Abdallah a tourné court après le départ brutal de ton alter ego, Liès Hamidi. Il a fini par abandonner la vision purement administrative et partager ton abnégation avec la fougue qui le caractérise. Tu vas certainement le retrouver. Il sera triste de savoir que la ville nouvelle a été immolée sur l'autel de la rentabilité. Votre complicité vous aidera à vous consoler du gâchis qui s'étale sous nos yeux. Pour toi «Sidi Abdellah, c'est une histoire classée et vendue aux Sud-Coréens, comme les deux autres villes nouvelles Bouinan et Boughzoul. J'ai été éjecté sans commentaires après dix ans de travail là-dessus». Je n'ai pas su trouver les mots pour te réconforter. Tu es l'un des rares architectes qui a enrichi l'Algérie sans s'enrichir. Tu vivais modestement, j'en témoigne, en nourrissant des ambitions allant dans l'intérêt de la vie, de la ville, mais à l'encontre de celui des donneurs d'ordres. Tu t'es élevé au-dessus de ces contraintes matérielles, tu as supporté les vicissitudes du quotidien en te réfugiant dans la poésie. Tu as su trouver dans le lyrisme les mots pour te réconcilier et t'enraciner dans un milieu que ses propres enfants cherchent à fuir. Tu es très fort Jean-Jacques. C'est le dernier ouvrage que tu m'as offert en souriant. Je n'ai pas compris sur le moment que c'était ton testament. J'ose espérer que cette fois ton pays d'adoption saura se montrer digne de tes sacrifices et reconnaissant à ton œuvre. Tu souffrais en silence, traçant des lignes poétiques, jusqu'à ton dernier souffle. Si je devais te définir, je dirai que tu étais un exemple de vie, d'honnêteté, de modestie, un sacré professionnel, un humaniste impénitent : une leçon de vie. Pour cela, je demande à tous, aux Algérois, à tous tes confrères de tout entreprendre pour réaliser ton dernier vœu : obtenir la nationalité algérienne. De faire de toi un citoyen d'honneur de ta ville : Alger. Et pour que ton souvenir reste vivant parmi nous et tes voisins, qui appréciaient ta gentillesse et ta discrétion, rebaptiser ta rue des Bananiers en rue Jean-Jacques Deluz. A un de ces quatre l'ami, salue Liès Hamidi pour moi. Djaffar Lesbet /Sociologue Au cœur des débats Entre assurance et exigence Durant les toutes dernières semaines de l'année 1996, à l'issue d'un exil en France qui lui parut une éternité tant il se languissait de son Alger, Jean-Jacques Deluz revint en anachorète, par une porte dérobée, pour (re)découvrir les passerelles vers l'égarement. Il éprouva les mêmes reculs à l'égard de pratiques de l'architecture frappées du sceau des pesanteurs de toute nature qu'il pensait avoir définitivement contribué à mettre en berne un quart de siècle durant. A l'EPAU, il restait encore de lui, un peu, l'image du sage du village qui interrogeait les tombes et convoquait les assemblées de chimères pour raconter des vérités difficiles à contenir. Des lectures comparées de livres et d'une société en état d'ébullition pour des étudiants attentifs et des acharnés de son espèce, il avait tiré la force des regards qui s'appesantissent sur les quotidiens de la pause, la mouvance des saisons, il leur avait tous appris comment défricher les lieux et les liens, déchiffrer les enlisements et les émergences, les «déracinements» qui dispersent, les regroupements qui entassent. Savoirs collatéraux hissés au rang de domaine de définition, profitant de ce que la pluridisciplinarité n'ait même pas encore commencé à faire ses ravages ! Auparavant… il avait assisté, en spectateur émerveillé puis en travailleur infatigable, à la «lente recherche patiente» du Maître (Le Corbusier), sous l'œil bienveillant de ses «parrains » (Marc Emery et Gérard Henning), rassemblement des énergies aux fins de mettre le bateau «Plan d'Alger» au mouillage dans le port des sciences majeures. Entre les forces séductrices, pour rassurer des incertitudes d'une fin de l'histoire (de l'architecture moderne) annoncée à grands coups de remises en question des actes fondateurs, à la mort du Maître, et les détournements de majeurs vers les bonheurs promis, il n'y avait pas vraiment de choix à faire. Ailleurs, à l'orée de la décennie des grandes espérances, le regain d'une passion pour les bâtisseurs de cathédrales (de logements) impulsée par les chapelles ayant résisté aux doutes, l'arrivée en masse d'idées engouffrées dans les express transalpins (Aldo Rossi, Carlo Aymonino, Carlo Scarpa…), la comparution des formes urbaines devant les arbitrages devenus incontournables (Philippe Panerai), les remises en valeur des «aventures spatiales de la raison» (Henri Raymond), ultime «sécession», en apothéose, ont fondé les bastions devenus presque impénétrables à force de fuite vers la clarté et l'amoindrissement des facteurs de risques. Tandis que chez nous, on inaugurait l'ère du retour à l'enfouissement, des ouvertures-éclairs et des grands bricolages, des «fleuves détournés». Les «sioux» approfondissaient les tombes pour l'enterrement des oubliés de la conscience, les multitudes et les désertions en prime, les mises en dépôt comme menace, les imposteurs aux aguets. Alors, entre assurance et exigence, il s'était dit qu'il ne faudrait peut-être pas choisir le moindre mal. D'autres enseignements de son œuvre sont toujours à craindre… Adieu, l'artiste. Fayçal Ouaret /Architecte Le cinéma et la vie C'est comme un film Très vite, après l'avoir rencontré une première fois, lors de nos discussions, il était plus question de cinéma et de littérature que d'architecture. Godard, bien entendu, son compatriote dont il n'arrivait plus à aimer les films comme dans sa jeunesse (et auquel il préférait à présent Truffaut), Freddy Buache, son compatriote, ancien directeur de la cinémathèque de Lausanne. Mais aussi tout le cinéma américain des années 30/50. Un après-midi. Chaleur étouffante, qu'il ne supportait plus et qui mettait ses poumons à rude épreuve. Deux jours auparavant, il venait d'y avoir une énième diffusion à la télévision de La mort aux trousses de Hitchcock. En cinéphile averti, il était tout heureux de l'avoir revu. Et nous voilà, à quatre, entassés dans le petit salon – Jean-Jacques, Magda, Selma et moi-même -, accueil simple, du thé léger et délicatement parfumé, un plateau de dattes. Douce pénombre. Nous voilà devisant, bavardant, babillant presque sur le plaisir infini, éternel que procure ce film. Légèreté. «Le plus beau film du monde ? », ose timidement Magda, debout comme souvent, proche de la fenêtre. «Non, je n'irai pas jusque-là !», rétorque Jean-Jacques, un fin sourire aux lèvres. Mais tout de même : Cary Grant, James Mason, le Mont Rushmore, la musique de Bernard Hermann… quel film ! Au premier chapitre de son livre Alger, chronique urbaine, Deluz écrit cette phrase introductive, merveilleuse de simplicité : «C'est comme un film : les passagers se regroupent le long des bastingages pour découvrir la ville promise au loin. » Et sur le rabat de la couverture, il y a une courte et espiègle présentation de lui-même, où l'on devine toute l'agilité de son esprit : «J'ai été un joli petit garçon insupportable. Au collège, je marchais sur les mains et faisais des sauts périlleux. » Samedi 2 mai, lors de son enterrement, sous un beau soleil, curieusement, je n'ai eu de cesse de penser à cette phrase. La mort, comme ça, insupportable. La mort, son dernier saut périlleux. Traverser le pont, cher à Murnau, aller à la rencontre des fantômes. De nos fantômes. Il n'en finira plus de nous hanter. Sofiane Hadjadj / Ecrivain, éditeur