L'affaire de l'agression de la photographe Malika Taghlit et du chauffeur d'El Watan est devant la justice. C'est dans la matinée d'hier qu'ont comparu, devant le procureur près le tribunal d'El Harrach (Alger), les agresseurs, suite à une plainte déposée la veille au commissariat de Bab Ezzouar. Le directeur de la publication, Omar Belhouchet, était présent au tribunal aux côtés des collègues malmenés. Quatre personnes arrêtées par les services de police dans leur cité ont donné leur version des faits. Des faits troublants qui confirment les affirmations des collègues agressés, dont le seul tort était d'exercer leur métier. Ils se sont déplacés lundi dernier à la cité du 5 Juillet pour prendre des photos d'une construction illicite érigée par un ancien responsable de l'APC de Bab Ezzouar, dénoncé par des élus de l'actuel exécutif communal et confondu aussi par les services de la wilaya déléguée de Dar El Beïda qui l'ont qualifié de « récidiviste » (El Watan, mardi 16 juin 2009). Une fois sur place, les collègues ont été pris à partie par des gens du quartier. « J'ai pris discrètement des photos de la bâtisse objet du litige, mais nous n'avons pas pu repartir parce que des jeunes se sont précipités sur la voiture et nous ont encerclés pour nous empêcher de quitter les lieux. A ce moment-là, l'un d'eux est passé à l'acte en donnant un coup sur le pare-brise de la voiture, le fracassant, tandis que ses amis nous ont fait sortir de force du véhicule, en proférant des insultes à notre encontre », raconte Malika Taghlit, toujours sous le choc. « Des jeunes m'ont immobilisée pendant que le mis en cause, un monsieur d'un certain âge, auteur de la construction illicite, m'a délesté de mon appareil. Un autre s'est permis de fouiller mon sac », poursuit-elle. C'est à grand peine que notre collègue et son accompagnateur se sont extirpés des mains de la foule en délire pour se diriger vers la brigade de gendarmerie et déposer plainte. « Le harcèlement a continué même dans les locaux de la gendarmerie, où on s'est retrouvé une heure après. Le meneur des agresseurs ne semblait pas dissuadé par la présence des gendarmes. En faisant valoir sa qualité d'ancien moudjahid, il a gardé mon appareil et n'a pas voulu s'en dessaisir qu'après avoir effacé les photos », raconte notre photographe, avant de préciser que les gendarmes ont noté les noms des agresseurs mais se sont déclarés incompétents. « Ils nous ont conseillé de nous adresser plutôt à la police. » Le 11 octobre prochain, les responsables de l'agression seront présentés devant le juge. Des marques de sympathie ont afflué hier au journal. Un lecteur, lucide, a fait remarquer que l'exercice du métier reste difficile pour des journalistes dont le seul tort est celui d'informer. « Si ce n'est pas le harcèlement des responsables bien établis dans leur poste, c'est celui du citoyen lambda. Les journalistes se font condamner à tour de bras. Leurs agresseurs doivent connaître le même sort », a-t-il dit.