La région de Chlef était l'un des fiefs de la résistance populaire face à l'hydre terroriste. Ils étaient plus de 3000 patriotes, dont le champ d'intervention s'étendait des frontières avec Tipaza et Aïn Defla jusqu'à celles avec Relizane et Tissemsilt. Connaissant parfaitement le terrain, ils étaient totalement impliqués dans le dispositif antiterroriste mené par les forces de sécurité. Pas une embuscade ni un ratissage ne s'effectuaient sans eux, ils étaient pour ainsi dire une force et un appui solide et efficace dans la lutte contre le terrorisme, parvenant à éliminer plusieurs éléments des groupes armés. Mais après la mise en œuvre de la charte pour la paix et la réconciliation, les patriotes ont été carrément renvoyés chez eux sans assistance ni soutien de l'Etat. « Nous n'avons plus besoin de vous », semblaient leur dire les tenants du pouvoir qui feignent d'oublier que la paix, dont se gargarisent ces derniers, a été en grande partie retrouvée grâce aux sacrifices et à l'engagement sans faille de ces hommes aux côtés des services de sécurité. L'ingratitude est donc le sentiment qui prédomine au sein des patriotes de la région, dont la plupart vivent dans des conditions dramatiques. « Le pouvoir n'a rien fait pour nous, on nous a jetés à la rue sans aucune prise en charge sociale. Même la modique rémunération de 11 000 DA, qui était accordée mensuellement à chaque patriote, a été supprimée. De même, nous avons été exclus des listes d'attribution de logements et d'autres dispositifs de soutien aux personnes sans emploi. Pour preuve, la liste des 300 logements sociaux qui vient d'être affichée au chef-lieu de wilaya ne comporte aucun patriote », indique avec dépit Djillali Sayah Mohamed, 49 ans, qui faisait partie du premier groupe patriote de Tegagra, à 5 km au nord de Chlef. « Nous avons pourtant contribué au retour à la paix dans la région en traquant les hordes sauvages qui imposaient leur loi et défiaient l'Etat et ses institutions. Est-ce de cette manière que l'on récompense toutes celles et tous ceux qui ont permis à l'Algérie de rester debout ? », s'interroge-t-il.D'autres membres des groupes de l'autodéfense nous ont tenus les mêmes propos et s'élèvent, eux aussi, contre l'oubli, la marginalisation et l'indifférence des pouvoirs publics.