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Autorité, école, syndicats, une cohabitation éclatée
Publié dans El Watan le 22 - 09 - 2009

Le syndicalisme (ses orientations, ses pratiques, ses structures) se révèle aujourd'hui inapproprié pour prétendre jouer un rôle majeur dans la reconstruction de la modernité et la promotion de l'être social et cette inadaptation réside pour l'essentiel dans le désajustement de la forme syndicale vis-à-vis des dimensions nouvelles de la modernité. Le syndicalisme algérien a souvent déserté certaines questions d'apparence anodine et qui se sont révélées par la suite catastrophiques pour l'ensemble des salariés ou tout bonnement a produit des réponses insuffisantes ; face à de nouvelles formes de partenariat gouvernement-syndicat, ce dernier se replie tout simplement sur une stratégie de survie par l'atteinte d'objectifs insignifiants et de revendications d'intérêts mineurs au prix de multiples effets négatifs pour les adhérents, négligeant ainsi ce qu'il pouvait receler d'antidotes et de ressources pour l'action. Le syndicalisme algérien a longtemps fait sienne la thèse d'une nécessaire fusion entre un espace économique et une obédience politique sans failles.
Le parti au pouvoir a largement promu l'image d'un Etat chargé d'une mission de développement économique et d'un devoir de protection sociale, d'où l'Etat-providence technocratique dans sa gestion des affaires de politique générale, néo-corporatiste dans ses modes de gouvernement avec toujours ce souci permanent d'éradiquer tout particularisme local ou culturel au profit d'une raison unique, une pensée unique et d'une culture unique. L'expérience des dernières années atteste avec une vigueur sans cesse exercée la profonde incohérence que comporte le système économique actuel, exclusivement guidé par l'avidité et par l'esprit de domination politique et sociale d'une minorité (cartels monopolistes), pour laquelle la production et la consommation ne sont que des domaines de profit, de spéculation et de subordination. L'expérience démontre aussi que toute emprise politique d'un syndicat a pour effet inévitable de faire fuir la masse syndicale qui se réfugie dans l'inorganisation ou se porte vers des organisations libres et indépendantes. Les grèves répétitives (dans l'éducation), ces dernières années, ont à leur manière illustré une volonté de s'affranchir de cette unicité de la pensée et un réflexe de défense corporatiste longuement effacée derrière la vocation que lui confère le sacro-saint service public confortées en cela, d'un côté, par une défaillance structurelle de nos institutions et une quasi-absence d'une tradition de négociation collective, et de l'autre, la prégnance d'un syndicat-maison fortement idéologisé et opportuniste enraciné dans une obédience du politique et toujours à la traîne d'un technocratisme dirigiste.
Aujourd'hui, le syndicalisme dit «autonome» s'articule entre une représentation syndicale purement catégorielle (rentable par la nature monolithique et le nombre de ses adhérents) et une représentation syndicale purement confédérée (sans projet mobilisateur autre que l'appel à la solidarité au sein du seul salariat), où cohabitent plusieurs formes de compromis entre catégories sociales qui se télescopent, se concurrencent et se neutralisent, limitant ainsi la prévisibilité des conflits et générer une faible performance en termes de régulation collective. Cependant, les situations de différenciation entre catégories sociales lorsqu'elles sont représentées par leur propre syndicat légitiment les acteurs locaux dans leurs efforts de rationalisation et de régulation, et rendent plus certaine l'élaboration d'un compromis social global. Les relations de pouvoir et le travail de sape des autorités ont forcé plusieurs syndicats à se replier dans un mode réactif, un tel mode d'action confine cependant la pratique du syndicalisme à l'intérieur d'un corridor étroit, celui menant à la conservation du statu quo.
Les stratégies défensives sont nécessaires mais constituent souvent une réponse insuffisante à une environnement en changement. A l'heure actuelle, plutôt caractérisée par l'opacité dans le jeu économique, une ouverture timide dans la modernisation du fonctionnariat, une disparité catégorielle au sein du salariat et la prolifération d'acteurs sociaux nouveaux mieux formés et moins aliénés aux traverses du jeu politique, il convient dès lors de réinventer une nouvelle forme de régulation collective qui tienne compte à la fois de la forte intrication, aujourd'hui entre le social, l'économique et le technique, capable à la fois de développer des projets régulatoires et de bousculer l'acceptation implicite d'une division sociale du travail – au pouvoir la gestion des affaires publiques et au syndicat le social et la revendication salariale – cantonnant ce dernier dans le rôle de l'acteur de la régulation collective. Le contre-pouvoir réel ne peut s'affirmer comme tel que si le syndicat s'empare des questions de gestion, de performance et d'efficacité, qu'il introduise des choix et suscite des débats ; qu'il inscrive l'action syndicale au cœur des enjeux socio-
économiques ; en somme, «aider la nation à construire sa modernité».
L'école saura-t-elle relever le défi d'être le vivier d'un renouveau syndical ?
Le syndicalisme, structuré autour de revendications, dites unifiantes et de la perspective prochaine d'un avenir commun, constitue pour beaucoup de salariés de l'éducation la médiation entre un présent contraignant et aliénant et un futur meilleur. Ce rapprochement entre l'intimité d'une classe d'école et l'utopie d'une société meilleure et juste structure l'ensemble du projet syndical. Ainsi donc, les valeurs portées par le projet syndical se définissaient à contre-courant d'une politique phagocytaire instaurée par le pouvoir comme règle générale, une incompréhension née beaucoup plus d'une volonté exprimée d'une part, d'une socialisation de l'action syndicale, et d'autre part du contrôle de l'action socialisante. L'idée «d'école» n'a pas vraiment occupé de place centrale dans la réflexion des mouvements syndicaux. L'école fut un lieu privilégié d'intervention, d'organisation et de mobilisation ; lieu d'expression où s'affrontent en permanence enseignants et administration.
La lecture syndicale de «l'école» fut ainsi globalement et historiquement une lecture d'espace, réduite à sa seule dimension de lieu, de services publics et de subordination. Le travail masqua alors l'école (sa gestion, sa stratégie et sa philosophie) et l'enseignant globalement ne fut saisi que comme salarié. Le maître se dissout dans le fonctionnaire et sa mission s'engloutit dans la fonctionnarisation. A cela s'ajoutent des phénomènes de démoralisation qui conduisent au repli sur des revendications d'ordres matérielles et sectorielles. Les deux autres niveaux de l'école, comme institution et comme organisation, ne furent guère saisis comme des niveaux pertinents d'intervention. Tout d'abord, remarquons que le champ des réformes de structure et d'éducation fut globalement abandonné au seul ministère chargé de cette mission ; le syndicalisme se réfugia dans une seule fonction critique et de
dénonciation : toutes les réformes introduites dans l'éducation sont passées comme une lettre à la poste. Le contre-pouvoir réel est en effet peu introduit dans la réflexion
syndicale ; lui est préféré la protestation comme forme singulière de résistance. L'opposition au système ne peut être agissante que dans la mesure où son action s'inscrit dans une réflexion syndicale sur le pouvoir, l'autorité et les mécanismes relationnels justifiant toute action collective organisée. Il importe cependant, avant toute autre considération, que le syndicalisme puisse toujours intégrer dans ses projets et dans son agenda syndical, l'élément central qu'est l'enseignant et sa double appartenance, salarié de par sa fonction et sujet de la cité, de par sa citoyenneté.
Les récentes réformes introduites, d'enseignement et de statut, ont entraîné la construction d'un nouveau rapport des enseignants à leur école ; le lieu social se redéfinit sur fond de crise des projets antérieurs, de l'affirmation de l'enseignant-sujet revendiquant désormais à la fois une reconnaissance sociale et une liberté de consommer. Aujourd'hui, l'enseignant se redéfinit plutôt par rapport à lui-même et cette redéfinition est particulièrement marquée par l'isolement ou son déracinement de la communauté éducative, un contexte social caractérisé par une certaine décomposition des rapports sociaux et le désenchantement aux récentes réformes statuaires ; d'autant plus que s'affirme plus présentement le paradoxe de l'exclusion sociale : on lui refuse l'accès à la société de consommation alors que ses produits, à coups de publicité, structurent son imaginaire social. L'enseignant ne doit plus être une unité de travail anonyme, mais il doit être considéré à la fois comme entité culturelle imprégné de connaissances, d'expériences et d'aptitudes en continuelle évolution et comme citoyen ayant droit à son bien-être et à sa liberté de consommer. C'est seulement en mettant en valeur ce double regard sur l'enseignant que cette ressource humaine deviendra un actif de l'école et non administré chargé uniquement de suivre sans grand intérêt des processus de changement pensés et travaillés loin, trop loin de l'école algérienne.
Le fort du syndicalisme aujourd'hui est de pouvoir rapprocher projet collectif et projet personnel de chacun ; de réconcilier une multitude d'intérêts afin d'éviter les divisions et de construire une plus grande solidarité.
A vouloir pérenniser des modes d'organisation formalisés et de culture syndicale raisonnée en termes de soumission à la logique de l'autorité tutélaire, à minimiser de l'importance de l'implication des enseignants dans le résultat, à refuser son enracinement dans la communauté éducative, à demeurer en situation d'extériorité par rapport à l'école et à ses acteurs, le syndicalisme finirait par courir le risque de renoncer à lui-même. Il serait judicieux à présent de tenter de tirer du mouvement d'émancipation des professeurs de lycées, d'octobre de l'année 2003, quelques enseignements à partir desquels nous saurons mieux dire ce que sont nos priorités, ce que doivent être nos pratiques, ce qui nous paraît incontournable à prendre en compte dans nos choix stratégiques. Nous le faisons en affirmant d'emblée qu'analyser ce que nous sommes devenus et avons fait n'est pas mettre en cause les choix ou les personnes d'une histoire qui nous est collective et dont nous sommes partie prenante : «L'ignorance du passé ne se borne pas à nuire à la connaissance du présent, elle compromet dans le présent, l'action même.» Marc Bloch.
Bibliographie :
Borzeix Anni, 1984. Les pratiques syndicales face à l'organisation du travail. Paris, éd. Ouvrières
Durant Jean-Pierre, 1996. Le syndicalisme au futur. Paris, Syros
Elias Norbert, 1987. La société des individus. Paris Gallimard
Ion JAcques, 1997. La fin des militants. Paris, Atelier.
Touraine Alain, 1992. Critique de la modernité. Paris, Fayard.
L'auteur est enseignant et syndicaliste


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