Est-ce à dire que la poésie est l'heureux privilège de la jeunesse, non seulement persuadée de n'avoir pas le moindre péché sur la conscience, mais encore refusant purement et simplement de s'interroger la-dessus ? Et si l'interrogation s'impose malgré tout, alors ? Bios Diallo (1) préfère répondre calmement : « Sait-on Dans le corps de la nuit A quel vent ils appartiennent Ou s'adonneront quand on rattrapera ma langue Qui court les rues Surplombe les océans Fouille ordures et décombres ». Car Bios Diallo croit que le poète est celui qui aide ses semblables à surmonter le tourment de l'ineffable, en le nommant, en coulant la douleur dans « un moule rigoureux », en échange de quoi les gens secourent le poète en écoutant sa voie. C'est une liaison inverse. Une communication de cœur à cœur. En résumé, Bios Diallo nous dit : « Il faut aider les hommes à s'entr'aimer » ; et surtout à aimer… « La Terre » : « Je défie le verbe qui honnit l'arc Fouine dans les noms De la Terre Unique registre Sans migraines. » La vie en général, et la vie d'un individu en particulier, revêt une valeur spéciale lorsqu'elle se fonde sur une activité pleine d'inspiration, une création ou un travail élevant l'homme. Voilà qui concerne d'autant plus le travail du poète. Au reste, pas seulement aux sens des « affres » de la création. Le travail qui préside à la naissance du poème concerne l'âme, perpétuellement mise à l'épreuve et se mettant elle-même à l'épreuve au nom de sa haute responsabilité devant le temps, devant l'avenir, c'est la besogne de celui qui vit « avec un morceau de Terre au cœur. » « Je pose mes oreilles sur la porte de la terre Pour le son de demain tu l'as senti Oh ma mère Un jour fermé sur les paumelles Géode brandie par le buste Des musées de pus. » Peut-être rude à lire, plein de géniales métaphores Les os de la Terre (2) recouvre l'image des Mauritaniens d'aujourd'hui, le destin d'un peuple dans toute sa diversité religieuse et raciale comme la… Terre ! (1) Né en 1966 à Sili-Baby (sud de la Maurétanie). (2) Editions l'Harmatan. Le poème a publié aussi Les pleurs de l'Arc-en ciel chez le même éditeur.