Roger Federer n'a plus que l'Américain Andy Roddick comme obstacle à un quinzième Grand chelem, aujourd'hui en finale de Wimbledon, un record qui permettrait au Suisse d'asseoir son statut de plus grand joueur de l'histoire. Pour l'heure, Federer compte quatorze « majeurs » à son palmarès, soit autant que Pete Sampras. Mais à l'inverse de l'Américain, il les a tous gagnés grâce à sa victoire à Roland-Garros, le dernier qui lui échappait, en juin. Un succès permettrait à Federer de reprendre la première place mondiale à celui qui lui avait infligé, l'an passé à Wimbledon, une de ses « pires défaites », Rafael Nadal, qui, il y a six mois, semblait devoir prendre le dessus après sa victoire en finale de l'Open d'Australie. Les genoux douloureux de l'Espagnol, qui l'avaient diminué à Roland-Garros, l'ont privé de Wimbledon. Mais c'est à lui-même que Federer devra son retour dans le rôle principal : à Paris, il a été superbe de volonté ; à Londres, il a tutoyé la perfection. A en juger par sa conférence de presse à Wimbledon, vendredi, la victoire du Suisse semblait presque une formalité, y compris dans la tête de l'intéressé. Les amabilités sur le gros service de Roddick expédiées, il n'était question que d'histoire et de records. Federer, 28 ans, ne répugnait pas à s'étendre sur ses plus grands moments : son premier Grand chelem à Wimbledon à 2003, sa cinquième victoire consécutive à Londres en 2007, sa victoire sur Juan Carlos Ferrero en demi-finale de l'Open d'Australie en 2004 qui lui offrit la première place mondiale qu'il devait conserver quatre ans et demi (un autre record). Son tournoi immaculé ne peut lui donner tort. En demi-finale contre l'Allemand Tommy Haas, il a abandonné onze malheureux points sur son service, il n'a plus concédé une seule balle de break depuis trois matches. L'an passé, Federer présentait un parcours aussi parfait avant de s'incliner face à Nadal dans ce qui reste, selon beaucoup, comme le plus grand match de l'histoire. Mais malgré son très gros match pour sortir Andy Murray en demi-finale, Roddick n'est pas Nadal. Si Federer ressent peut-être un complexe face à l'Espagnol qui l'a battu cinq fois sur sept finales de Grand chelem, ce n'est absolument pas le cas contre Roddick, défait 18 fois sur 20, deux fois en finale de Wimbledon (2004 et 2005) et une fois à celle de l'US Open (2006). Le service de Roddick est immense, mais pas plus que celui de Karlovic, balayé par Federer en quarts. Dans le jeu, l'Américain est bien meilleur que le Croate et son niveau contre Andy Murray, vendredi, a surpris. En d'autres temps, il lui aurait autorisé l'optimisme. Mais dimanche, Roddick affronte celui qui, pour beaucoup, est le plus grand joueur de tous les temps, revenu au sommet de son art. Mais le n°6 mondial, battu l'an passé dès le deuxième tour par le Croate Janko Tipsarevic, revient de loin et croit en son destin avant sa première finale en Grand chelem depuis celle de New York en 2006. « J'ai eu des moments de doute, je me suis posé beaucoup de questions et je me disais : si tu ne dois jamais revenir au sommet, au moins donne-toi les chances de le faire », raconte Roddick.