Garé sur le bord de la RN12, Mohamed s'affaire au nettoiement de la cabine de son camion de dépannage. C'est également ici, à auteur du pont de Tazmalt El Kaf (7 km à l'est de la ville de Tizi Ouzou), près de chez lui, son lieu de travail. Il est aidé par son neveu, Mouloud, 25 ans, issus tous les deux du bidonville qui se trouve à 50 m du lieu de stationnement. Dans les mêmes baraquements habitent une trentaine de familles, originaires pour la plupart de la wilaya de Djelfa. Ils y sont depuis plus de cinquante ans. Pour vivre, les hommes pratiquent toutes sortes d'activités manuelles. «Je suis né et j'ai grandi ici. La seule fois où les autorités se sont intéressées à nous, c'est lors de la construction de la rocade sud de Tizi Ouzou. Parce qu'ils doivent, en effet, ouvrir une voie qui passera obligatoirement par l'emplacement de nos baraques», dit Mouloud, pressant un chiffon humide entre ses mains. Mise en service en été 2005, la rocade sud de Tizi Ouzou est toujours amputée d'une pénétrante qui devrait relier la RN12 à Boukhalfa en contournant le centre-ville. La réalisation de cet échangeur au niveau de Tazmalt El Kef piétine en raison de la présence d'un bidonville sur le tracé du tronçon routier. Les objectifs assignés à ce programme ne sont, à cet effet, pas atteints. La liaison de la RN12 à la rocade permettra de relier la localité de Boukhalfa et les wilayas de Boumerdès et d'Alger sans transiter par le centre-ville de Tizi Ouzou qui suffoque sous une circulation asphyxiante. Elle décongestionnera, par la même, la densité du trafic et éliminera les bouchons au niveau de l'Habitat (entrée est), du carrefour du 20 Avril à la Nouvelle-ville et au niveau du stade du 1er Novembre au centre-ville. Mais avant l'achèvement du projet, les familles qui occupent ces baraquements depuis des années doivent être relogées au préalable. Les autorités se sont engagées au recasement de ces ménages dans le cadre du programme de résorption de l'habitat précaire de 2004. L'opération touchera plus de 450 familles de la commune de Tizi Ouzou, selon des informations officielles. L'oncle de Mouloud, a estimé utile de présenter une décision d'attribution d'un logement signée par le secrétaire général de la wilaya qui date d'octobre 2004 où il est clairement stipulé que son détenteur «bénéficiera d'une somme de 500 000 DA qui sera versée à l'APC de Tizi Ouzou pour la réalisation d'un logement». Toutefois, les habitants que nous avons pu approcher se disent étonnés d'apprendre qu'au bout du compte, ils finiront dans des chalets après 6 ans d'attente. «6 ans, c'est le temps nécessaire pour réaliser des logements avec tous les aléas du terrain. Nous n'avons pas trop le choix, c'est vrai, mais ce n'est pas ce que dit la décision. Nous craignons qu'une fois installés dans ces chalets de transit nous y resterons à vie !», déclare le dépanneur. Oued Falli, au sud du chef-lieu de la commune de Tizi Ouzou. Sur une crête surplombant le chemin qui mène au centre d'enfouissement technique (CET), une cinquantaine de chalets sont en cours de construction sur les 100 prévus. Les travaux avoisinent à peine 40% d'avancement pour la première tranche, constate-t-on sur place. Chaque chalet est composé de deux compartiments ne dépassant pas les 50 m2. «Nous avons construit 50 chalets qui attendent leurs viabilisations», explique le chef de chantier. La viabilisation du site n'est pas encore entamée. A noter, que le même centre accueillera les 28 familles sinistrées du séisme de 2003 qui occupent actuellement les anciens entrepôts de l'Eniem sis à l'entrée est de la ville. D'autres sont sur la liste des bénéficiaires à l'image des occupants des baraquements de la «Base de vie pascale», située sur la rive du Sébaou, en face de l'hôpital d'Oued Aïssi. Pour Mouloud, le choix ne se pose même pas. Qu'ils partent dans ces chalets ou qu'ils restent, la précarité n'a qu'un seul nom.