Arnaque sur la véritable identité des ossements actuellement exposés au musée du Bardo à Alger dans le cadre du Festival panafricain. Selon nos informations, les 52 ossements exposés du 7 au 20 juillet ne sont pas ceux de la véritable Lucy, la plus célèbre australopithèque, tenue pour être l'une des ancêtres de l'humanité. Les fossiles qui se trouvent présentement au Bardo sont une réplique de la vraie Lucy. Contactée par El Watan, la directrice du musée d'histoire naturelle d'Addis Abeba affirme qu'il s'agit bel et bien d'une seconde réplique, la première se trouvant en Ethiopie (lire encadré). Où est alors la vraie Lucy ? Elle est actuellement exposée au Discovery Time Square Exposition (un building qui abritait autrefois la rédaction du quotidien The New York Times) où elle séjournera du 24 juin jusqu'au 25 octobre 2009. Un site interne (http://www.discoverytsx.com/lucy.php) est d'ailleurs entièrement consacré à cet événement new-yorkais. Interrogé sur la présence de Lucy aux Etats-Unis, M. Abraha Belai, rédacteur en chef du site www.ethiomedia.com, confirme dans un mail adressé à El Watan que les ossements originaux de Lucy se trouvent effectivement à New-York. Auparavant, ils ont été exposés à Seattle ainsi qu'à Houston au Texas. Preuve de la présence des vrais squelettes de Lucy sur le sol américain, des chercheurs de l'université du Texas, à Austin, en collaboration avec le gouvernement américain, avaient effectué en février 2009 des scanners pour étudier les ossements de cette fameuse femme âgée de 3,2 millions d'années. Présentée au public américain dans le cadre d'une tournée intitulée Lucy's Legacy : The Hidden treasure of Ethiopia, Lucy, arrivée aux Etats-Unis en août, devrait y rester jusqu'en 2013. L'accord du transfert de ce précieux fossile a fait l'objet d'intenses négociations entre Washington et Addis-Abeba. Une partie des fonds collectés via cette exposition devrait servir à financer la rénovation et la construction de nouveaux musées en Ethiopie. L'arrivée de Lucy aux Etats-Unis en août 2007 a provoqué une vive polémique au sein de la communauté scientifique. Certains paléontologues ont vivement critiqué ce voyage arguant que ce déplacement pourrait nuire à la bonne conservation du squelette, susceptible de subir ainsi des dommages irréversibles. Certains musées américains, le Smithonian à Washington et l'American Museum of National History à New York, avaient même refusé d'accueillir les restes de Lucy pour se désolidariser de cette initiative. Zeray Alemseged, paléontologiste éthiopien célèbre pour avoir découvert en 2000 Selam, une cousine de Lucy âgée de 3 millions d'années, estimait qu'un « fossile comme Lucy est si rare et si fragile qu'il devrait être déplacé d'un pays à un autre uniquement pour des raisons valables et dont profiterait la nation ». Il faut savoir que depuis la découverte des ossements en 1974, le public éthiopien n'a eu le privilège de voir la vraie Lucy que deux fois. Pour la protéger, cette dernière est d'ailleurs conservée dans une chambre forte, étant entendu que les ossements exposés dans un musée à Addis-Abeba ne sont qu'une réplique. L'usage des copies est d'ailleurs recommandé pour protéger les précieux ossements. Un accord signé en 1998 sous l'égide de l'Unesco stipule que les fossiles d'hominidés ne doivent sortir de leur pays d'origine que pour être soumis à des recherches dans un laboratoire étranger. L'accord recommande ainsi l'usage de répliques pour les expositions destinées au grand public. Contrairement aux Américains, les Algériens auront donc droit à une copie. Pourtant, la venue de ce fameux bipède en Algérie a été annoncée comme une véritable événement par le ministère de la Culture, grand ordonnateur du Panaf'. « L'Ethiopie a fait le nec plus ultra puisque dans tout ce qu'elle ramène, elle apporte Lucy, l'ancêtre de l'humanité, qui est exposée au musée d'Addis-Abeba, qui n'est sortie d'Ethiopie qu'une fois pour aller aux USA », affirmait fièrement Khalida Toumi, mardi 24 juin sur les ondes de la Radio Chaîne III. « C'est la deuxième fois seulement qu'elle voyage pour venir en Algérie. C'est un signe de respect, de considération et de confiance que les Ethiopiens ont fait pour l'Algérie et cette dernière est très touchée. » Elle y précisait que Lucy sera convoyée comme une VIP, entourée de tous les moyens de sécurité et d'assurances qui conviennent à cet illustre personnage. Interrogée au cours d'une émission, récemment diffusée par Canal Algérie, pour savoir comment les autorités algériennes ont-elles convaincu le gouvernement éthiopien d'autoriser la venue de Lucy en Algérie, Khalida Toumi expliquait que des experts éthiopiens se sont déplacés en Algérie avant d'être rassurés par les Algériens. Les responsables chargés de l'organisation de ce grand barouf africain ont-ils donc sciemment menti ? Il est permis de s'interroger... Pourquoi n'ont-ils pas expliqué d'emblée que les ossements exposés au musée du Bardo sont en vérité une réplique ? Pourquoi n'avoir pas précisé au public que la vraie Lucy est actuellement aux Etats-Unis où elle doit y rester pour une période de six ans ? Combien d'argent a-t-on déboursé pour faire acheminer en grande pompe une copie ?